La Légende du Chevalier du Soleil – Histoire Parallèle
Roman d’origine en chinois par 御 我 (Yu Wo)
Unbeatable Part 4: We Are Unbeatable – traduit du chinois vers l’anglais par Dahlys[PR!]
Invincible Partie 4 : Nous Sommes Invincibles – traduit de l’anglais au français par Irina
+ Travail de vérification par Yukomin
Alors qu’ils étaient encore à l’extérieur de la ville, Aldrizzt arrêta soudainement de marcher. Il enfila d’abord son manteau et descendit la capuche jusqu’à son menton. Ensuite, il mit des gants. Après qu’il se fût emmitouflé de la tête aux pieds, il demanda à Neo avec un peu d’inquiétude : « De quoi ai-je l’air ? »
Puisque je me suis enveloppé comme ça, personne ne devrait pouvoir dire que je suis un elfe noir, n’est-ce pas ?
Neo l’examina attentivement et commenta ensuite : « Je pense que… »
Que penses-tu ? Aldrizzt attendit l’opinion de Neo nerveusement.
« Je pense que tu as l’air extrêmement louche. »
« … » Aldrizzt resta silencieux pendant un instant. Il lâcha sèchement, mécontent : « Ça va sans dire ! Je veux savoir si tu peux dire que je suis un elfe noir au premier regard ! »
Neo leva un sourcil et dit négligemment : « Qu’est-ce que ça peut bien faire si tu es reconnu ? »
Aldrizzt secoua la tête et fit remarquer : « Si les humains découvrent que je suis un elfe noir, ils vont définitivement nous chasser hors de la ville. Nous ne pouvons plus aller chasser dans la forêt. Dans ce cas, si nous ne pouvons pas non plus aller en ville pour acheter à manger, ne risquons-nous pas de mourir de faim ? »
Neo fronça les sourcils et cessa de protester contre le déguisement d’Aldrizzt.
Ensuite, ils pénétrèrent dans la cité. Neo n’était pas très intéressé par cette petite ville, mais Aldrizzt ne pouvait s’empêcher de regarder partout. Bien qu’il fût à la surface depuis quelque temps, il n’était jamais entré dans une cité auparavant. Maintenant qu’il était dans une ville, c’était évident qu’il allait être fasciné.
Étonnamment, cette petite ville près de la forêt était très vivante. Néanmoins, de nombreuses personnes portaient l’équipement des aventuriers et transportaient même des bagages. Puisqu’ils ne paraissaient pas être du coin, il s’agissait très fort probablement d’aventuriers en voyage.
Aussi, parce que les voyageurs étaient très variés, personne ne vint leur chercher des ennuis, malgré l’attirail d’Aldrizzt qui attirait pas mal de regards soupçonneux. Aldrizzt poussa un grand soupir de soulagement, il n’avait plus peur d’entrer en contact avec des humains.
Neo marcha avec confiance jusqu’à un bâtiment en briques avec un panneau « Guilde des Aventuriers du Continent » suspendu sur la porte. C’était également un endroit qu’Aldrizzt n’avait jamais vu auparavant. Il n’y avait pas foule à l’intérieur, puisqu’il y avait seulement un peu plus de dix personnes. Ils se tenaient face aux murs de chaque côté, par groupes de deux ou de trois, tous en train de consulter les annonces placardées aux murs.
Est-ce qu’il pourrait s’agir de la Guilde des Aventuriers dont on parle dans les livres ? Curieux, Aldrizzt demanda à son compagnon : « Es-tu déjà venu ici par le passé ? La route te semblait très familière. »
Neo pointa le toit et dit : « La Guilde des Aventuriers dresse toujours un drapeau sur son toit. S’il s’était agi d’une cité plus grande, je n’aurais peut-être pas été en mesure d’apercevoir ce drapeau. Mais, cette ville n’est pas très grande, alors je l’ai remarqué au moment même où nous sommes arrivés. »
Une fois qu’ils eurent fini de parler, il entra dans le bâtiment de la guilde. Aldrizzt le suivit précipitamment.
Quand ils furent à l’intérieur, Neo suggéra : « Tu devrais d’abord aller vérifier s’il n’y a pas une mission que nous pourrions prendre. Je vais enregistrer notre équipe et m’occuper de quelques menus problèmes. »
Aldrizzt acquiesça. Il marcha alors jusqu’au mur et observa les annonces avec curiosité.
Neo s’avança seul jusqu’au comptoir de la réception. Il commença par enregistrer le nom de leur équipe et se prépara à envoyer un message à la Cité du Bourgeon. C’était l’une des choses que Chasel lui avait dit qu’il devait faire quoiqu’il arrive. Quand l’un des Douze Chevaliers Sacrés voyageait, il devait impérativement envoyer au moins un message à la Cité du Bourgeon tous les mois.
Quoique, Neo avait l’étrange impression que cette règle avait principalement été créée pour son bien, puisque, parmi sa génération des Douze Chevaliers Sacrés, la majorité d’entre eux restait à la Cité du Bourgeon ou était rentrée dans leur ville d’origine. À part lui, personne d’autre ne semblait voyager.
Est-il vraiment nécessaire de s’inquiéter autant à mon sujet ? Vous voyez, je suis parti à l’aventure depuis un long moment maintenant. Ne suis-je pas encore en vie et bien-portant ? Qu’ont-ils tous à s’inquiéter pour rien ? Soupir !
Néanmoins, il était forcé de docilement effectuer ces choses triviales comme on le lui avait ordonné. Bien que Chasel ne l’effrayât pas le moins du monde, il serait pénible que ce dernier vînt à s’énerver réellement, particulièrement puisque tout le monde semblait avoir accepté de tout cœur quand celui-ci avait suggéré cette règle. S’il n’obéissait pas, il y avait un risque pour que onze personnes vinssent chercher les ennuis pour le récupérer.
Il obtint un crayon et du papier auprès des employés de la Guilde et commença à rédiger ce que Chasel lui avait demandé d’écrire : sa localisation, ses compagnons, ce qu’il allait faire ensuite…
Concernant son compagnon, Neo hésita un peu avant d’écrire qu’Aldrizzt était un elfe noir. Par la suite, il mentionna brièvement qu’ils étaient pourchassés par ses semblables. Évidemment, il le mentionna juste en passant et précisa même qu’il s’agissait là d’un problème bénin qu’il aurait tôt fait de résoudre.
En ce qui avait trait à sa localisation, il écrivit : « Je ne sais pas. » Pour ce qu’il allait faire ensuite, il inscrivit négligemment : « Explorer les alentours. » Il prévoyait d’écrire la même chose dans le futur.
Quand il eut fini d’écrire, Neo passa le message à l’employé de la Guilde, qui lui sourit et lui dit automatiquement : « Le coût total pour envoyer votre message et enregistrer votre équipe est de trente-cinq ducats d’argent. »
Neo fouilla dans ses poches et parvint à en extirper un ducat d’or et plus de dix ducats d’argent pour payer la facture.
« Ahhh ! »
Entendant subitement un cri, Neo se retourna par réflexe. Quelqu’un regardait Aldrizzt avec horreur. Quand Aldrizzt fit un pas pour se rapprocher de lui, cette personne recula hâtivement de plusieurs pas et chancela même, tombant presque au sol.
Voyant cela, Aldrizzt semblait ignorer quoi faire. Il tira même inconsciemment sa capuche plus bas sur son visage.
Au même moment, les personnes autour semblaient trouver que quelque chose clochait. L’un après l’autre, ils observèrent Aldrizzt avec prudence.
La personne terrifiée fixa Aldrizzt et bégaya : « N-Noir… »
« Aldrizzt ! Allons-y. Je suis totalement mort de faim, alors allons chercher quelque chose à manger », le héla Neo. Il marcha jusqu’à Aldrizzt, attrapa le bras de son compagnon en un mouvement, et tira dessus sans sembler se préoccuper des gens qu’ils laissaient derrière.
« Il a vu mon visage », déclara Aldrizzt avec anxiété après avoir été tiré hors de la Guilde.
« Et alors ? » répliqua Neo, pas du tout inquiet. « Tu n’as rien fait dont tu doives avoir honte. Tu n’es peut-être pas aussi beau que moi, mais ton physique est quand même passable, bien qu’un peu noir. »
« Si je n’étais pas noir, je serais simplement un elfe ! » aboya Aldrizzt. Il continua nerveusement. « Quand même, il a découvert que je suis un elfe noir. J’ai peur que… »
Neo se tourna vivement vers lui, attrapa les épaules d’Aldrizzt et dit avec sérieux : « Aldrizzt, tu veux vivre à la surface et partir à l’aventure avec moi. Pensais-tu réellement que personne ne découvrirait que tu es un elfe noir ? »
« Je sais que c’est impossible, mais nous sommes actuellement poursuivis par mon peuple. Nous avons aussi été chassés de la forêt par les elfes… »
Neo l’interrompit impatiemment en affirmant : « Ne sois pas aussi râleur ! Il y a seulement cinquante elfes noirs à nos trousses. Si le pire venait à arriver, nous n’aurions qu’à les combattre. »
Aldrizzt secoua la tête. Il croyait que Neo ne connaissait pas non plus ce que représentaient « cinquante elfes noirs ». Non seulement chaque membre de sa race était doué au combat, mais ils étaient également des experts dans les embuscades et l’utilisation d’armes cachées. Pour résumer, bien que Neo ait été le Chevalier du Soleil, il serait absolument impossible pour deux personnes de vaincre cinquante elfes noirs !
Neo regarda autour de lui. Même si cette ville n’était pas très grande, il y avait un certain nombre d’auberges. Cela avait assurément un lien avec tous les aventuriers présents. Il ne put s’empêcher de marmonner : « Y a-t-il un bon endroit pour partir à l’aventure ? Pourquoi y a-t-il autant d’aventuriers ici ? »
« C’est juste derrière toi ! » répondit Aldrizzt. « Cette grande forêt est définitivement un bon endroit pour partir à l’aventure. »
« Vraiment ? » dit Neo avec suspicion. « Comment se fait-il que je n’aie pas le sentiment qu’il y a quoi que ce soit d’assez dangereux pour y mériter une aventure ? »
Aldrizzt soupira et expliqua : « Ce n’est pas dangereux uniquement parce que c’est toi et moi qui y étions. Je suis un elfe noir qui a plus d’une centaine d’années, et tu es le Chevalier du Soleil. Évidemment que nous ne pensons pas que c’est dangereux ! Je crains qu’il n’y ait pas beaucoup d’aventures dans ce monde que nous ne puissions gérer. »
« Oh, vraiment ? Ne sommes-nous pas pourchassés par cinquante elfes noirs en ce moment ? » rétorqua simplement Neo, tandis qu’il considérait l’auberge la plus luxueuse d’un regard et avançait vers elle sans hésitation.
Au moment où Aldrizzt aperçut cette auberge propre et ordonnée avec un mobilier plutôt somptueux, il se sentit en situation précaire. Il murmura rapidement : « Neo, as-tu de l’argent ? »
« Oui. » Neo ne mentait pas ; même après avoir payé la Guilde, il devait encore avoir soixante-dix ou quatre-vingts ducats d’argent.
Quand Aldrizzt entendit la réponse de Neo, il se calma. Bien qu’il n’eût jamais vu où Neo gardait son argent, si Neo disait qu’il en avait, alors c’était probablement le cas.
Au moment où ils entrèrent dans l’auberge, quelqu’un vint immédiatement à leur rencontre. Neo ordonna très naturellement : « Préparez une chambre pour deux, mais, d’abord, servez-nous à manger et de l’alcool. Je veux du vin d’au moins dix ans d’âge, de la soupe en entrée, la spécialité de votre chef comme plat principal — mais, il doit y avoir de la viande — et des fruits locaux pour les essayer. »
Pendant que Neo commandait la nourriture, Aldrizzt contempla l’intérieur de l’auberge. Il y avait peu de clients, mais la plupart d’entre eux ressemblaient à des marchands plutôt qu’à des aventuriers. Il semblerait que les aventuriers ne restassent pas souvent dans des auberges de haute classe. Les marchands ne paraissent pas s’intéresser à l’Aldrizzt momifié, mais ils étaient extrêmement intrigués par Neo, dont les actions étaient très raffinées. Aldrizzt en soupira de soulagement.
Après qu’ils se fussent assis, Aldrizzt observa Neo avant de soupirer à nouveau et de déclarer : « Si tu ne m’avais pas dit que tu étais un chevalier sacré, j’aurais pensé que tu étais un prince. Tu agis vraiment comme un aristocrate, et un de rang extrêmement élevé en plus. »
« Oh. » Neo haussa les épaules et expliqua : « J’entretenais une bonne relation avec la famille royale et je me rendais souvent au palais. Par conséquent, j’ai toujours voyagé avec le prince et la princesse. »
Ce qu’il ne disait pas, par contre, était que, chaque fois qu’ils voyageaient, les gens pensaient qu’il était le prince et traitaient le vrai prince comme son assistant.
« Assez parlé, mangeons ! Il est impoli de parler et de manger en même temps. »
Tu n’étais pas aussi exigeant quand nous étions dans la forêt, donc pourquoi parler soudainement de bonnes manières quand nous allons à l’auberge ? Aldrizzt était soupçonneux, mais il ne répondit pas et se contenta de manger en silence.
Durant les quelques jours suivants, sous le prétexte d’aller à la Guilde pour vérifier s’il y avait des missions adaptées qu’ils pourraient prendre, Neo passa toute la journée à se promener, jusqu’à ce qu’il eût exploré toute la cité. Aldrizzt, quant à lui, n’osa pas sortir, car il avait peur que des gens découvrent qu’il était un elfe noir.
Bien que Neo l’eût réprimandé, Neo ne pouvait rien faire pour améliorer la situation d’Aldrizzt, et il aurait été étrange de le traîner jusqu’à l’extérieur. En fin de compte, Neo laissa Aldrizzt faire ce qu’il voulait et, à la place, passa ses journées à se faire plaisir en visitant la Guilde des Aventuriers, des tavernes et en se promenant en ville.
« Neo ! Neo ! » cria Aldrizzt avec panique.
Neo grogna, s’étira paresseusement et s’assit sur le lit. Il demanda paresseusement : « Qu’y a-t-il ? J’ai trop dormi ? » Neo était plutôt surpris, puisqu’il se réveillait d’habitude à une heure fixe.
« Non, c’est le milieu de la nuit. »
« Dans ce cas, pourquoi m’as-tu réveillé ? » Mécontent, Neo ouvrit les yeux, seulement pour remarquer qu’Aldrizzt arborait une expression extrêmement horrifiée. Il resta bouche bée pendant un moment avant de demander : « Que se passe-t-il ? »
Aldrizzt, qui se tenait près de la fenêtre, tourna la tête vers Neo. Quand il vit que Neo était enfin réveillé, il pointa du doigt l’extérieur par la fenêtre et dit d’une voix tremblante : « Regarde… »
Neo se leva nonchalamment et regarda par la fenêtre. Il aperçut immédiatement de nombreuses torches qui brillaient vivement, et les gens qui les tenaient avaient même encerclé l’extérieur de l’auberge. À la lumière des torches, Neo pouvait voir que ces personnes étaient armées jusqu’aux dents avec des expressions tendues, mais emplies d’intention meurtrière.
Puisqu’Aldrizzt et lui n’avaient rien fait de mal en ville, la seule chose qui aurait pu provoquer une telle situation était le fait qu’Aldrizzt était un elfe noir.
Surpris, Neo émit plusieurs « tsk ». Il lâcha : « Les habitants de cette ville savent comment garder un secret. Je me suis baladé dehors ces derniers jours, mais je n’ai jamais senti d’animosité émaner de qui que ce soit. Serait-ce parce que ce sont tous des aventuriers ? »
Peut-être est-ce parce que tu es trop obtus ? pensa Aldrizzt silencieusement. Néanmoins, il n’était pas en état de se disputer avec son compagnon dans ce genre de situation. Inquiet, il demanda : « Neo, que devrait-on faire maintenant ? »
Neo répondit à la question d’Aldrizzt par un haussement de sourcil. Il n’avait pas d’idée bien définie en tête et songea plutôt, Je suis déjà pourchassé par des elfes noirs et des elfes, est-ce que les humains vont également rejoindre la mêlée ? Mon aventure est réellement devenue dangereuse et excitante !
Parce qu’il ne recevait pas de réponse de la part de Neo après avoir attendu un certain temps, Aldrizzt se tourna pour observer les humains rassemblés. Dans son cœur, il avait déjà pris sa décision. Il décréta simplement : « Neo, tu dois partir. »
Neo répondit naturellement de manière inattendue : « Évidemment que je pars ! Est-ce que tu insinues que je devrais rester et laisser des gens m’abattre ? »
En entendant cela, Aldrizzt sourit amèrement en son for intérieur. Neo était toujours tellement franc. Il ne s’était même pas donné la peine de décorer ses mots en disant des choses telles que « Il ne pouvait réellement pas supporter de laisser son compagnon derrière lui, mais il ne pouvait pas non plus s’opposer à sa propre race, donc il n’avait pas d’autre choix ».
Neo a vraiment dit qu’il allait partir avec une si grande franchise… Bien qu’il eût beaucoup de plaintes à formuler, Aldrizzt n’en exprima aucune à voix haute. Il murmura seulement : « Dans ce cas, au revoir. »
« Tu as fini de faire tes adieux ? »
« Oui. »
« Alors, on y va ! »
Hein ? Avant qu’Aldrizzt pût réagir, Neo l’avait déjà attrapé par la taille avec un bras, l’avait pris sur son épaule, s’était appuyé contre le rebord de la fenêtre avec l’autre, s’était penché à l’extérieur et avait sauté sur le toit. En cherchant désespérément dans les alentours un autre toit sur lequel il pouvait sauter, Neo râla auprès de son compagnon : « As-tu déjà appris le Sort de Vol ? Si oui, on pourrait s’enfuir en volant ! »
« Je ne peux pas l’apprendre aussi vite. Le Sort de Vol n’est pas facile à apprendre, et je ne suis pas très familier avec l’élément du vent », grommela Aldrizzt. Mais, il se rappela immédiatement quelque chose de plus important : « Neo, n’allais-tu pas partir ? »
« Évidemment », répliqua Neo, comme si la réponse était évidente. « Je suis déjà encerclé. Si je ne pars pas, cela ne revient-il pas à demander à être transformé en viande hachée ? »
…
Je voulais dire : ne vas-tu pas partir seul et laisser derrière toi un compagnon aussi problématique ? Toutefois, en voyant les actions de Neo à ce moment-là, ça ne semblait pas du tout être le cas. Aldrizzt sentit soudain que la conversation entre son compagnon et lui-même avait été comparable à celle entre une poule et un canard.
Neo traversa plusieurs toits. Il baissa le regard et se rendit compte que la foule en bas le suivait. Quelques-uns le copiaient même et étaient grimpés sur les toits. Néanmoins, ces personnes étaient probablement des voleurs agiles et d’autres classes similaires, donc même s’ils étaient grimpés sur les toits, ils n’osaient pas l’approcher trop rapidement. Au lieu de cela, ils gardaient leurs distances et calaient leur vitesse sur celle de Neo et d’Aldrizzt, en criant continuellement et en rapportant leur position aux personnes en bas : « L’elfe noir est là ! »
« Ne les laissez pas partir ! »
« Après eux ! »
Hormis le bruit des poursuivants de Neo et d’Aldrizzt, le reste de la ville était aussi silencieux qu’une cité fantôme. Dans le même temps, il n’y avait pas de lumière dans les rues, ce qui rendait leur poursuite d’autant plus facile. Tant qu’une personne trouvait le duo, tout ce qu’il avait à faire était de crier pour attirer une poignée d’hommes.
Ont-ils évacué les habitants en premier ? Ils se sont vraiment bien préparés ! D’un côté, Aldrizzt ne savait pas s’il devait applaudir la prévoyance des humains ou soupirer devant son destin inéluctable d’être capturé. Quoi qu’il arrivât, la seule chose dont il pouvait être sûr était qu’il était en effet un poids. S’il n’était pas entré dans la ville, alors ces habitants n’auraient pas été obligés d’être évacués pendant la nuit.
D’un autre côté, Neo commençait sérieusement à s’énerver, car il était incapable de semer ses poursuivants.
Ces elfes noirs qui attaquaient dès le moment où ils s’approchaient, il pouvait les tuer sans hésitation, mais dans ce cas-ci ils étaient tous humains. À l’exception des aventuriers, il y avait des personnes qui semblaient être des citoyens ordinaires parmi eux, donc il était réticent à les attaquer négligemment.
Après y avoir réfléchi, Neo put seulement dire, irrité : « Commençons par nous cacher dans la forêt. La plupart des gens ne peuvent pas nous y suivre. »
« Mais, les elfes nous ont interdit d’entrer dans la forêt », lui rappela Aldrizzt, sous le choc.
« Ignore-les. Dans tous les cas, les elfes ne sont pas aussi vicieux que les humains. Je ne crois pas qu’ils nous tueront si nous ne résistons pas ! Les humains, en revanche, se feront un plaisir de nous attacher à un bûcher et de nous brûler vif si nous ne leur résistons pas. »
En entendant cela, Aldrizzt resta muet. Est-ce que Neo sait qu’il est aussi un humain ?
Une fois que Neo eût pris sa décision, il ne se préoccupa plus de savoir si Aldrizzt était d’accord ou non. Il courut sur-le-champ jusqu’à la frontière de la petite ville. Puisque la ville n’avait pas de grandes portes, Neo balança un coup de pied dans la palissade et annonça qu’il quittait la ville.
Aldrizzt regarda derrière eux et son cœur sombra. Il révéla : « Ils nous suivent toujours. »
Neo émit un « mm » et accéléra sa foulée, tandis qu’il courrait vers la forêt. Quand il fut à environ cent mètres de la lisière, il s’arrêta net.
Perplexe, Aldrizzt demanda : « Neo ? »
Neo ne répondit pas, mais il n’en avait pas besoin. Aldrizzt avait déjà vu la raison pour laquelle Neo s’était arrêté de courir.
Une ligne entière d’elfes se tenait à la lisière de la forêt, avec leurs arcs prêts et une flèche encochée, comme s’ils attendaient qu’ils fassent tous les deux un pas de plus… Aldrizzt se retourna uniquement pour voir que le groupe d’humains les avait déjà rattrapés. Bien qu’ils eurent l’air d’avoir peur de s’approcher maintenant, une fois que plus d’humains se seraient rassemblés, ils les attaqueraient sans aucun doute.
Des humains devant eux et des elfes dans la forêt derrière eux…
Neo fronça les sourcils en voyant les elfes et se retourna pour regarder les humains. Il sentait que la situation actuelle devenait plutôt délicate. Qu’ils puissent gagner ou non était une chose, mais le plus gros problème était de savoir si oui ou non ils devaient attaquer. Les humains en face de lui étaient principalement des habitants effrayés et des aventuriers engagés, tandis que les elfes dans la forêt étaient connus pour faire partie d’une race bienveillante. Donc, à moins qu’il n’y fût contraint, il ne souhaitait ni les tuer ni les blesser.
Cependant, au vu de la situation actuelle, s’il ne les blessait pas, ils allaient probablement les blesser tous les deux…
« Pose-moi, Neo. » Aldrizzt descendit du dos de Neo et déclara calmement : « Neo, pars ! Nous nous sommes juste rencontrés par chance et ne sommes même pas des amis proches… »
« Alors, tu n’aurais pas dû m’aider à laver mes vêtements, à cuisiner, à faire les lits, et à chasser ! » Furieux, Neo lui coupa la parole et affirma à voix basse : « Tu t’es montré si généreux envers moi, si je te tournais le dos et partais maintenant, ne deviendrais-je pas un être méprisable, sans honte et ingrat ? À présent, tu devrais te taire et porter plus attention aux membres de ta propre race. As-tu remarqué qu’ils se cachaient dans les buissons des deux côtés ? »
Aldrizzt hocha la tête. Évidemment qu’il les avait remarqués. Il avait demandé à Neo de partir parce qu’il avait découvert que, en plus des humains et des elfes, les gens de son peuple se cachaient dans les buissons de tous les côtés, rendant leurs chances de fuite nulles.
Neo observa les elfes qui maintenaient leurs arcs levés, pensant qu’il n’y avait probablement pas beaucoup de place pour la négociation avec eux. Donc, il n’eut pas d’autre choix que de se tourner et de faire face aux humains. Aux humains qui semblaient prêts à les charger et à attaquer à tout moment, il affirma : « Je suis le précédent Chevalier du Soleil, Neo du Soleil. Au nom des Douze Chevaliers Sacrés de l’Église du Dieu de la Lumière, je vous jure que cet elfe noir a déjà abandonné les ténèbres et a choisi de suivre la voie de la lumière… »
Avant qu’il eût même pu terminer de parler, la foule humaine avait déjà commencé à hurler furieusement.
« Ordure ! Comment pourrais-tu être le Chevalier du Soleil ? »
« Le Chevalier du Soleil n’aiderait jamais un elfe noir ! »
« C’est un elfe noir qui ne cessera jamais de faire le mal. En aidant un elfe noir, tu as trahi tous ceux de ton espèce ! »
« Les traîtres doivent mourir… TUEZ-LE ! »
Au moment où quelqu’un prononça les mots « tuez-le », la foule humaine s’éveilla et se mit à crier au meurtre et à la tuerie. Quelques-uns brandirent même leurs armes avec des yeux injectés de sang.
« Vous voulez me tuer, moi, le traître aux humains, c’est ça ? » Neo était si livide qu’il rit à la place. « Vous devriez connaître votre place ! Même si vous êtes assez nombreux, je n’ai pas une haute opinion de gens comme vous. Si vous n’étiez pas humains, je vous aurais déjà tous tués d’un coup d’épée il y a longtemps ! »
Après avoir dit cela, il dégaina réellement son épée. Des rayons de lune cruels se reflétèrent sur la lame…
« Arrête ! »
Aldrizzt enlaça Neo qui fulminait et s’écria : « Tu ne peux pas faire ça ! Neo, tu ne peux pas les blesser, c’est ton peuple ! »
Outré, Neo rugit : « Lâche-moi, je dois massacrer ces idiots qui ne savent pas ce qui est bon pour eux ! Ils ne peuvent même pas te vaincre, et ils osent dire qu’ils veulent me tuer ? Me tuer, moi, Neo du Soleil ? Laisse-moi les tuer et nous ouvrir la voie ! »
« Non ! Tu ne dois pas être imprudent ! » Aldrizzt s’accrocha à lui aussi fermement que possible. Il ne laisserait jamais Neo tuer des humains.
Non seulement les humains n’étaient pas effrayés de voir Neo sortir son épée, ils levèrent même leurs propres armes plus haut et commencèrent à le condamner haut et fort. Le contenu de leurs insultes était si horrible que même Aldrizzt ne pouvait supporter de les entendre, encore moins Neo.
Par conséquent, Aldrizzt serra Neo encore plus fort pour l’empêcher de charger et de tuer des gens.
Néanmoins, Neo n’avait plus l’intention de briser l’étreinte d’Aldrizzt. Il resta silencieux un moment. Puis, sans aucun avertissement, il relâcha un croissant d’aura de combat avec un balancement de sa lame, visant calmement et judicieusement devant les humains.
Voyant cela, Aldrizzt poussa un grand soupir de soulagement. Il avait cru que Neo trancherait directement en deux les gens qui l’avaient insulté.
À cet instant-là, la scène devint complètement immobile et silencieuse, à l’exception du nuage de poussières qui traversaient le ciel en s’élevant de la profonde tranchée horizontale creusée dans le sol. Quelques personnes qui ressemblaient à des citoyens en furent tellement terrifiées que leurs jambes devinrent aussi molles que de la gelée, ce qui les fit tomber au sol. Cependant, il y avait aussi les aventuriers expérimentés qui crièrent immédiatement : « Vous tous, n’ayez crainte ! De l’aide arrive, et ils sont seulement deux. De plus, les elfes dans la forêt vont nous aider. »
La présence des elfes avec leurs longs arcs semblait redonner du courage aux humains. Là aussi, ils ne savaient pas que les elfes ne feraient pas un mouvement tant que Neo et Aldrizzt n’entreraient pas dans la forêt.
Les elfes… Aldrizzt comprit finalement ce qu’il devait faire ! Il lâcha Neo, se retourna et courut vers la forêt… Pendant un moment, Neo en fut surpris. Il se tourna alors instantanément, le rattrapa précipitamment et agrippa le bras du mage sans aucun effort.
Par la suite, Neo fixa froidement Aldrizzt du regard. Se sentant coupable après avoir été fixé par les yeux sévères de celui-ci, Aldrizzt détourna le regard.
Comme il toisait Aldrizzt, Neo déclara avec une confiance absolue : « Tu pensais mettre fin à tout ça en courant vers la forêt et en laissant les elfes tirer sur toi jusqu’à ce que tu meures, n’est-ce pas ? »
Bien qu’il eût posé une question, il n’avait pas besoin de recevoir une réponse. Le corps d’Aldrizzt qui se raidissait soudainement lui suffit.
Neo renifla froidement avant de réprimander son compagnon : « N’y songe même pas. Moi, Neo du Soleil, je n’ai jamais laissé un compagnon mourir sous mes yeux ! Laisse-moi te dire, je ne laisserai aucun de ceux-là — cela inclut humains, elfes et elfes noirs — te tuer ! »
Sous le coup de la panique, Aldrizzt répliqua immédiatement : « Tu ne peux pas possiblement tous les tuer, et je ne te laisserai jamais faire une chose pareille. »
Neo promit simplement : « Je vais faire de mon mieux pour ne pas les tuer. Ce n’est pas si difficile. »
« Même si tu ne veux pas les tuer, les gens de mon peuple se cachent de ce côté. Ils ne vont sûrement pas rester là à regarder. Quand le moment arrivera, peut-être que toi, moi, les humains, et même ces elfes vont mourir de leurs mains ! »
Aldrizzt le supplia sincèrement : « S’il-te-plaît, Neo ! Même si tu ne me laisses pas entrer dans la forêt, laisse au moins mon peuple me ramener ! Ils ne me tueront peut-être pas, puisque nous sommes de la même race… » Pendant qu’il parlait, sa voix devint de plus en plus faible, car il ne pouvait même pas se convaincre lui-même de ses paroles.
Neo renifla avec dédain. Il ne croyait pas du tout que les elfes noirs laisseraient partir Aldrizzt. Il était possible qu’ils ne le tuassent pas immédiatement, mais ce serait uniquement parce qu’ils voudraient d’abord le torturer cruellement !
« Neo… » Quand Aldrizzt aperçut l’expression de Neo, il comprit immédiatement que Neo n’avait aucune intention de faire comme il avait dit.
Neo annonça sur un ton glacial : « Nous allons d’abord nous occuper des humains, et ensuite de ces elfes noirs. À présent, commence à préparer des sorts magiques pour m’aider, ou mets-toi sur le côté sagement ! »
Naturellement, Aldrizzt ne pouvait pas laisser Neo se battre seul. La seule chose qu’il pouvait faire était de réfléchir à quel sort magique minimiserait le plus les dégâts.
Tant qu’il avait son épée en main, Neo était paré pour la bataille. En même temps, les humains commençaient aussi à s’enflammer. Désormais, la bataille pouvait commencer à tout moment…
« Vous tous, cessez cette folie. »
Dans le silence, un simple ordre demandant aux gens de s’arrêter résonna. Le ton était très plat, mais il était aussi tellement imposant que personne ne pouvait l’ignorer.
Un certain nombre de personnes tournèrent la tête. Seulement alors, ils remarquèrent des gens formant une ligne en se tenant derrière eux. Ils n’étaient pas nombreux, juste onze. Les armures de ces chevaliers étaient toutes d’une couleur différente, et les armes qu’ils tenaient étaient également différentes — il y avait des épées, un arc, et même un grand bouclier —, mais ils avaient tous une chose en commun : un maintien solennel qui était si intense que personne ne pouvait détourner les yeux.
Qu’il s’agît de leurs armes ou de leurs vêtements, ces personnes ne semblaient pas être des aventuriers ordinaires. Ils se tenaient simplement là de manière détendue, mais ils relâchaient quand même une aura qui faisait sentir qu’ils ne devaient pas être sous-estimés. Ceci faisait comprendre à toutes les personnes que ces chevaliers n’étaient pas à prendre à la légère.
À la tête du groupe, une personne à l’allure très sombre se tenait au milieu de ces hommes en armures et les dirigeait. Non seulement ses cheveux et ses yeux étaient noirs, mais même les vêtements qu’il portait étaient totalement noirs. Tout son corps émettait une aura intimidante, particulièrement ses yeux dont le regard était aussi aiguisé que des lames de rasoir, ce qui faisait sentir aux personnes qu’ils regardaient qu’elles étaient interrogées.
Ce chef guida les autres à travers la foule humaine. Partout sur leur passage, les humains se poussaient pour leur ouvrir la voie… Finalement, ils se tinrent entre les humains et le duo.
D’un côté, Aldrizzt était réellement déconcerté. Il n’arrivait pas à comprendre pourquoi autant de personnes étaient apparues si soudainement et leva sa garde, car ils paraissaient très forts.
D’un autre côté, le regard de Neo se mit à se promener. Neo regardait tout — le ciel, le sol, l’herbe, et les elfes — à l’exception de ces onze personnes, et plus particulièrement ce chef vêtu de noir.
Le chef jeta un regard à Neo, puis se tourna pour faire face à la foule. Il décréta simplement : « Nous sommes les Douze Chevaliers Sacrés de l’Église du Dieu de la Lumière. Je suis le Chevalier du Jugement. Maintenant, est-ce que quelqu’un pourrait me dire pourquoi vous encerclez notre Chevalier du Soleil ? »
Le Chevalier du Soleil ? Au début, tout le monde fut confus, mais ils se rappelèrent immédiatement ce que « tout le continent savait » à propos du Chevalier du Soleil : des cheveux dorés, des yeux bleus et une prestance belle et gracieuse.
À part les elfes, une seule personne correspondait à cette description, et c’était précisément celle qui se tenait aux côtés de l’elfe noir.
À ce stade, Aldrizzt fixa Neo avec une totale stupéfaction. Embarrassé et incapable de continuer à prétendre qu’il ne connaissait pas ces personnes, ce dernier demanda : « Chasel, tout le monde… Pourquoi êtes-vous là ? »
Au moment où le groupe de chevaliers sacrés entendit sa question, ils se retournèrent tous et levèrent les yeux au ciel à l’intention de leur Chevalier du Soleil. Après tout, la seule raison qui les avait poussés à venir était pour lui porter secours. Sinon, serait-ce possible pour ces onze personnes de passer par hasard tous ensemble à ce moment précis ?
« Les Douze Chevaliers Sacrés ? » La foule commença à s’agiter.
« Pourrait-il s’agir d’imposteurs ? »
« Non, ce sont les vrais ! » Quelqu’un les reconnut et s’écria : « Je suis déjà allé à la Cité du Bourgeon auparavant. Ce sont les véritables Douze Chevaliers Sacrés ! »
« Les Douze Chevaliers Sacrés sont apparus dans cette petite ville ! Oh mon Dieu de la Lumière ! »
« Mais, l’elfe noir… »
Le silence tomba dans la foule.
Chasel du Jugement attendit jusqu’à ce que tout le monde eût arrêté de s’agiter avant d’expliquer : « Inspiré par le Dieu de la Lumière, cet elfe noir a abandonné le mal et a embrassé la bonté. Bien que je trouve une telle action suspicieuse et que je pense que tous les criminels devraient subir un procès, le Chevalier du Soleil est déterminé à l’accepter avec un esprit ouvert et bienveillant. Aussi, pour le laisser expérimenter davantage la bienveillance du Dieu de la Lumière, tout comme pour sentir davantage l’amour du Dieu de la Lumière envers le monde, le Chevalier du Soleil l’a laissé voyager avec lui afin de lui prêcher les principes du Dieu de la Lumière. »
« Je vois. » Comme s’ils comprenaient subitement, tout le monde commença à louer : « Le Chevalier du Soleil est vraiment quelqu’un de bienveillant ! Il accepte même de pardonner à un elfe noir. »
C’était la première fois que Neo réalisait à quel point Chasel était doué pour raconter des absurdités !
Aldrizzt regarda Neo avec 10 000 % de suspicion, tout en pensant, Neo a même songé à tuer des humains pour résoudre son problème ! En quoi est-il bienveillant ?
À ce stade, la plupart des humains avaient posé leurs armes. Peu importe à quel point ils étaient braves, ils n’osaient pas user de leurs épées sur les Douze Chevaliers Sacrés.
Neo s’avança jusqu’aux côtés des Douze Chevaliers Sacrés et les salua d’abord d’un bref coup d’œil. Il se retourna ensuite, mais au lieu de faire face aux humains ou à la forêt, il regarda en direction des buissons… Il dit sévèrement : « Écoutez bien, elfes noirs cachés dans l’ombre. La radiance du Dieu de la Lumière brille maintenant sur Aldrizzt. Si jamais vous osez à nouveau le contaminer avec vos ténèbres, l’Église du Dieu de la Lumière ne vous le pardonnera jamais ! »
Quand ils entendirent que des elfes noirs se cachaient à proximité, tous les humains poussèrent un cri de surprise. Un certain nombre d’entre eux commença à s’approcher des Douze Chevaliers Sacrés.
De leur côté, les elfes qui étaient restés silencieux jusqu’à présent s’exclamèrent subitement, légèrement choqués, avant de se mettre à murmurer entre eux. Cette fois, les elfes parvinrent à une décision beaucoup plus rapidement que précédemment. Ils décochèrent des flèches en visant les buissons pour vérifier, et quelques grognements étouffés retentirent.
À présent, les elfes ne visaient plus Neo et Aldrizzt avec leur arc, mais pointaient plutôt leurs armes vers les buissons à la place. Même leurs yeux étaient devenus très aiguisés et alertes.
En comparaison à un elfe noir solitaire, ils haïssaient évidemment beaucoup plus un groupe d’elfes noirs.
« Neo, devons-nous nous battre ? » demanda Chasel.
Neo fronça les sourcils comme il réfléchissait à la question. Il répondit alors : « Non, ces elfes noirs sont en désavantage. Ils ne choisiront pas de riposter. Il n’est pas nécessaire de les chasser et de tous les tuer. »
Chasel acquiesça d’un signe de tête. Il avait lui aussi vu les mouvements dans les buissons, mais ces mouvements s’éloignaient au lieu de se rapprocher. De plus, les elfes ne semblaient pas enclins à les massacrer, à en juger par la manière dont ils avaient envoyé leurs flèches. Leur but paraissait être de repousser les elfes noirs, plutôt que de les tuer.
À ce moment-là, un elfe s’avança. C’était l’elfe femelle nommée Evaclair. Elle ne portait aucune arme ; à la place, elle s’avança vers Neo et décréta : « Je m’excuse pour ma grossièreté, Chevalier du Soleil de l’Église du Dieu de la Lumière. Puisque même l’Église du Dieu de la Lumière, qui hait les ténèbres au plus haut point, a accepté cet elfe noir, ce dernier a certainement embrassé la lumière. Nous, les elfes, sommes aussi soulagés d’entendre cela. »
Après s’être excusée, Evaclair tourna la tête pour sourire à Aldrizzt. Elle lui dit : « Nous sommes vraiment désolés pour la requête déraisonnable dont nous vous avons gratifié. Je vous prie de ne pas la prendre pas à cœur. Désormais, vous pourrez entrer et quitter la forêt librement. »
Aldrizzt ouvrit la bouche, mais aucun mot ne sortit. Son cœur était empli de tant de gratitude qu’il ne pouvait presque pas empêcher ses yeux de déborder de larmes.
Neo tapota l’épaule d’Aldrizzt et rappela aux elfes : « Son nom est Aldrizzt. Rappelez-vous bien son apparence et son nom. Si jamais vous l’attaquez dans le futur, nous vous réclamerons justice, même si vous êtes des elfes ! »
Evaclair hocha la tête et retourna dans la forêt.
Aldrizzt l’observa partir. Dans le même temps, il contempla également les elfes dans la forêt. La plupart lui sourirent quand ils découvrirent qu’il les regardait. Cela le fit se sentir extrêmement ému…
Neo se tourna pour faire face à Chasel. Il haussa un sourcil et demanda : « Est-ce vraiment une bonne idée d’utiliser les noms de l’Église du Dieu de la Lumière et des Douze Chevaliers Sacrés ? N’avons-nous pas déjà pris notre retraite ? »
« Tu t’inquiètes vraiment pour ce genre de détails ? » le taquina Chasel. Après avoir reçu un regard de Neo, il sourit et répondit : « Avant de venir, j’ai envoyé un messager à Grisia avec un message verbal. J’ai expliqué brièvement que tu avais des ennuis, et j’ai aussi ajouté qu’il se pourrait que j’aie à utiliser le nom des Douze Chevaliers Sacrés. Je crois qu’il trouvera une méthode pour garder ce problème secret. Bien que les compétences à l’épée de ton élève soient terribles, sa capacité à régler des problèmes est bien meilleure que la tienne. »
En entendant cela, Neo renifla dédaigneusement. Il répliqua : « Vous devriez vous occuper de vos affaires. Même si vous n’étiez pas venus, j’aurais pu résoudre ce problème seul ! »
« Oui, oui », rétorqua Chasel, à moitié convaincu. Il se tourna pour faire face à l’elfe noir et s’enquit demanda : « Es-tu Aldrizzt ? »
« Oui… » Aldrizzt sursauta sur le coup de l’émotion.
D’une part, comparé à Neo, qui avait précédemment été à la tête du Temple Sacré, Aldrizzt était beaucoup plus effrayé par le précédent Chevalier du Jugement. Après tout, Aldrizzt fréquentait Neo depuis quelque temps maintenant. C’était tout simplement impossible d’être effrayé par quelqu’un qui ne savait rien faire à part manier l’épée.
D’autre part, Chasel semblait très strict. De plus, le Chevalier du Jugement n’était pas connu pour sa gentillesse.
Chasel toisa Aldrizzt. Avec une trace de sourire, il confia : « Hormis posséder une belle apparence et des capacités à l’épée exceptionnelles, Neo est inutile. Par conséquent, je vais devoir te confier la responsabilité de te charger de tout le reste. »
« Hé, hé ! Qu’entends-tu par-là, Chasel ? » protesta Neo.
Aldrizzt sourit. Comme il regardait la foule qui se dispersait et les elfes amicaux, il dit avec gratitude : « Je n’aurais jamais imaginé que ce conflit puisse se résoudre ainsi. Il n’a pas été nécessaire d’employer la violence, et aucun innocent n’a été blessé dans le processus. »
« Évidemment », dit Chasel, confiant. « Nous sommes les Douze Chevaliers Sacrés, et notre parole est plus convaincante que la violence. Est-ce que tu comprends enfin, Neo ? »
Neo se contenta de renifler avec froideur. Alors qu’il rengainait son épée, il répliqua : « Je pensais que j’allais enfin pouvoir me battre tout mon saoul ! Vous n’êtes vraiment que des fouineurs. »
« Du début à la fin, as-tu déjà frappé le premier ? » demanda Chasel, un peu abasourdi.
« Non », répondit Neo en secouant la tête.
« C’est en effet vraiment surprenant ! Je pensais que tu démarrerais un massacre pour résoudre tous tes problèmes ! » Après avoir dit cela, Chasel remarqua l’expression pleine de doutes d’Aldrizzt. Il sourit et s’enquit : « Croyais-tu que Neo ne pouvait pas vaincre cinquante elfes noirs ? C’est quelqu’un qui, à lui tout seul, a attaqué plus de cent-cinquante bandits armés, ce qui incluait des archers et des mages. En fin de compte, il les a tous exterminés… Néanmoins, à ce moment-là, il avait encore la faveur du Dieu de la Lumière. Ce n’est plus le cas. »
Aldrizzt se figea sous le choc. Un homme seul contre plus de cent-cinquante bandits armés ?
« Même sans la faveur du Dieu de la Lumière, je suis toujours aussi fort ! » souligna instantanément Neo.
À cet instant-là, un chevalier avec une série de couteaux pendue à sa taille éclata de rire et rétorqua : « Tu es peut-être toujours aussi fort qu’avant, mais tu n’es plus impossible à tuer ! Neo, à ce moment-là, n’as-tu pas été blessé plus de dix fois et presque tué ? »
« Huit blessures ! Combien de fois dois-je me répéter, Metal ? J’ai seulement reçu huit blessures. De plus, j’ai marché jusqu’au Temple Sacré par mes propres moyens, donc je n’ai pas vraiment failli être tué ! » Neo tourna la tête et commença à se disputer sans fin avec Métal.
D’un ton moqueur, le Chevalier du Métal dit : « Oh ? Je me rappelle que quelqu’un s’était évanoui sur l’escalier du Temple Sacré et ne parvenait plus à se lever. Leaf, le Chevalier Sacré le plus sympa d’entre nous, a même dû te porter jusque dans le Temple Sacré. »
« Si tu n’avais rien dit, j’aurais tout oublié… » Neo tourna la tête pour faire face à un autre chevalier qui portait un arc. Il s’exclama avec colère : « Leaf! Cette fois-là, tu as saisi l’opportunité pour me frapper plusieurs fois ! Tu as totalement ignoré le fait que j’étais sérieusement blessé ! »
Le Chevalier de la Forêt, qui portait son arc sur son dos, fit immédiatement glisser son arme entre ses mains et encocha une flèche avant de répondre : « Ah bon ? N’étais-tu pas censé n’avoir que des blessures mineures ? Serais-tu en train d’admettre que tu étais sérieusement blessé à ce moment-là ? »
« Bien sûr que non… »
Avec une courte hésitation, Aldrizzt déclara : « Plus de cent-cinquante bandits armés… S’il est si fort, alors nous aurions réellement pu tuer cinquante elfes noirs à nous deux. Néanmoins, quand nous étions pourchassés, Neo n’a jamais pris l’initiative pour attaquer. »
Chasel sourit simplement et devina : « Je suppose que c’était probablement parce qu’il ne voulait pas massacrer ton peuple sous tes yeux ? Le tempérament de Neo a toujours été mauvais, et il résout tout avec son épée. C’est seulement quand il a atteint l’âge de quarante ans qu’il a commencé à contrôler un peu son sale caractère, soupir… »
« Neo a dit qu’il avait seulement trente ans », l’interrompit Aldrizzt, sans expression.
Chasel fit une pause avant de murmurer : « Ne lui dis pas que j’ai exposé son mensonge. Il déteste par-dessus tout qu’on lui rappelle qu’il est vieux. »
En entendant cela, Aldrizzt décida de confirmer quelques-unes de ses hypothèses concernant Neo. Il l’interrogea : « Et il est très vaniteux ? »
« Exactement », acquiesça immédiatement Chasel.
« Il va au-delà de ses limites pour maintenir son image ? »
« Personne n’est meilleur que lui pour ça. Il a même élevé un apprenti qui se dépasse tout autant. »
« Il préfèrerait mourir plutôt que d’admettre qu’il s’est trompé ? »
« C’est plus difficile de lui faire admettre qu’il s’est trompé que de le tuer ! » Extrêmement satisfait, Chasel hocha la tête et dit : « Aldrizzt, il semblerait que tu le comprennes très bien. Dans ce cas, dans le futur, je vais devoir te charger du lourd fardeau appelé Neo. »
« Puis-je refuser ? » s’enquit Aldrizzt, son visage n’arborant aucune expression.
« Tu peux. Mais, si tu refuses, l’Église du Dieu de la Lumière ne te protégera pas. Donc, si tu veux marcher librement à la surface, tu devras prendre soin de lui. »
« Est-ce une menace ? » Bien qu’il eût dit cela, Aldrizzt avait un sourire sur le visage. Le Chevalier du Jugement ne l’effrayait plus.
Chasel dit chaleureusement : « Ne te méprends pas, le Dieu de la Lumière n’emploierait jamais une méthode aussi vile que la menace… »
Aldrizzt considéra Chasel avec une grande méfiance.
« …mais, l’Église du Dieu de la Lumière le fera. »
Bien que cela ne fît pas très longtemps depuis que les Douze Chevaliers sacrés eussent pris leur retraite et fussent partis sur leurs chemins respectifs, dans le passé, ils avaient rarement été séparés pendant une aussi longue période de temps. Donc, une fois que la situation fut résolue, ils retournèrent tous à la taverne et eurent une soirée arrosée… mais, la seule personne qui ne pouvait pas boire était Neo lui-même.
C’était parce que « tout le continent savait » que le Chevalier du Soleil ne supportait pas l’alcool ! Dans une taverne où il était entouré par des citoyens curieux, Neo ne pouvait définitivement pas se permettre de boire de l’alcool.
Alors qu’il voyait tous les autres vider une bouteille après l’autre, Neo perdit presque contenance. En rugissant le mot « DEHORS ! », il chassa tout le monde de la taverne et traîna Aldrizzt jusqu’au comptoir pour payer l’addition, planifiant de courir jusqu’à une ville où personne ne savait qu’il était le Chevalier du Soleil pour boire autant qu’il le souhaitait.
« Trois ducats d’or ? »
Au moment où il entendit le montant de l’addition, Neo se figea. Il se retourna pour… OH NON ! Ils étaient tous réellement partis, il ne pouvait donc pas leur demander de l’argent. « Je vois… Euh ! Je pense qu’il est encore tôt, et le soleil ne s’est pas encore levé, donc je suppose que je vais attendre que le soleil se lève avant de partir. »
Après avoir entendu la réponse de Neo, le tenancier resta stupéfait. Souriant largement, il dit : « C-C’est… Vous avez l’argent pour payer l’addition, n’est-ce pas ? »
À ce moment-là, sans compter le tenancier, même Aldrizzt fixa Neo avec 10 000 % de suspicion. Neo dévoila immédiatement le sourire commercial du Chevalier du Soleil et dit poliment : « Hmm? Qu’avez-vous dit ? Mes plus sincères excuses, moi, Neo du Soleil, je ne vous ai pas entendu clairement. »
Le tenancier se figea un moment. Seulement alors, il se rappela que la personne en face de lui n’était pas un citoyen ordinaire, mais plutôt le Chevalier du Soleil ! Juste le fait de se rappeler qu’il venait d’insinuer que « le Chevalier du Soleil voulait partir sans payer » lui donna des sueurs froides. Pensant qu’il n’était jamais trop tard pour réparer ses erreurs, il se reprit : « Je voulais dire, voulez-vous manger quelque chose avant de retourner dans votre chambre ? »
« Je ne serais pas contre », dit Neo avec élégance et naturel. « Dans ce cas, servez-nous à manger, je vous prie ! »
Après qu’ils eussent mangé de tout leur content, ils retournèrent dans la chambre. Aldrizzt planifiait de rattraper un peu le sommeil en retard, quand il remarqua que Neo commençait à empaqueter ses vêtements. Avant qu’Aldrizzt ne comprît la situation, Neo avait déjà fini de faire ses paquets. Neo se retourna et annonça : « Allons-y, Aldrizzt ! »
« Quoi ? » Aldrizzt eut le regard perdu dans le vide pendant un moment avant de répondre, confus : « Le soleil ne s’est même pas encore levé, où veux-tu aller ? »
Neo resta silencieux un instant avant de répondre : « …Dans la forêt, pour inviter Evaclair à rejoindre notre équipe ? »
Aldrizzt fut surpris quand il entendit les paroles de Neo. Il se demanda : Pourquoi n’a-t-il pas invité Evaclair quand nous étions dans la forêt tout à l’heure ? Pourquoi le faire maintenant, au milieu de la nuit ? Et pourquoi la réponse de Neo ressemble-t-elle à une question, et pas à une affirmation ?
« Vite, vite ! » insista Neo. « Si nous ne les rattrapons pas vite, les elfes vont être trop loin ! »
Aldrizzt plissa les yeux et dit d’un ton dangereux : « Neo ? »
« Hmm? Y a-t-il un problème ? » Neo employa l’ultime technique du Chevalier du Soleil : le sourire rayonnant. Néanmoins, cela n’avait absolument aucun effet sur Aldrizzt qui connaissait bien la personnalité de Neo. Les yeux d’Aldrizzt se plissèrent à nouveau, tandis qu’il devenait mille fois plus soupçonneux qu’auparavant.
Neo n’eut pas d’autre choix que d’arrêter de sourire et de répondre honnêtement : « J’ai seulement soixante-dix ducats d’argent. »
« …Neo, séparons-nous, d’accord ? »
« Nous séparer ? Tu viens juste de promettre à Chasel de veiller sur moi ! Et avec toi parti, qui va m’aider à laver mes vêtements, à chasser, à cuisiner, et à faire le lit ? »
« Chasel ? »
« Ne raconte pas d’âneries, sa cuisine est si mauvaise que même les globs s’enfuiraient. »
« Tu veux parler de ta cuisine, non ? »
Comme ils sortaient par la fenêtre, ils n’oublièrent pas de se disputer. Ils s’enfuirent toujours plus loin…
Le jour suivant, une aventure épique pour des aventuriers légendaires démarra quand le tenancier hurla de désespoir : « AHHH ! Le Chevalier du Soleil s’est enfui sans payer ! »
Leur histoire commença officiellement ici.
— FIN —