La Légende du Chevalier du Soleil Histoire Parallèle # 4 : Ne te sers que d’une épée, à moins que nul ne te voie

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La Légende du Chevalier du Soleil : Histoires parallèles

Roman d’origine en chinois par : 御我 (Yu Wo)


Side Story #4: You May Only Use a Sword, Unless No One Sees You – traduit du chinois à l’anglais par Lucathia[PR!]
Histoire parallèle #4 : Ne te sers que d’une épée, à moins que nul ne te voie – traduit de l’anglais au français par Nocta
+ Travail de vérification par Yukomin

Il se remémora comment son maître l’avait une fois laissé avec pour exercice de donner mille coups d’épée avant d’annoncer qu’il partait rendre visite au prince (ou à la princesse). Cependant, pendant son absence, tout ce que Grisia avait réussi à accomplir se résumait à faire l’idiot. Quand son maître rentra et le découvrit…

À ce moment-là, Grisia crut qu’il se ferait frapper en punition, pourtant son maître se contenta de glousser froidement et de le saisir par le col avant de le jeter sur son cheval et de galoper avec lui hors de la ville…

Grisia découvrirait bientôt que la raison pour laquelle son maître ne l’avait pas frappé… était que même un de ses coups désinvoltes était suffisant pour l’expédier directement dans les bras du Dieu de la Lumière !

Neo l’emmena à un célèbre territoire de ténèbres, descendit de son cheval, et empoigna une fois de plus Grisia par le col. Dépourvu de toute crainte, il s’enfonça dans le territoire de ténèbres, sans même s’embarrasser de dégainer son épée de son fourreau. À la place, il se servit de ses poings pour massacrer les différents groupes d’hideuses créatures des ténèbres qui apparaissaient tout au long du chemin.

Il marcha jusqu’à ce qu’ils atteignissent l’endroit le plus reculé de la forêt où, par la suite, il relâcha enfin Grisia.

« Sais-tu où nous nous trouvons ? » Demanda froidement Neo.

« Dans la Forêt de la Lune Cachée… » Répondit timidement Grisia.

« … Ce n’est pas la Forêt de Keiran ? »

« Maître, c’est dans la direction opposée. Quand vous êtes sorti du Temple Sacré, vous auriez dû tourner à gauche, pas à droite. »

« Oh, pas étonnant. Je trouvais que c’était étrange. Je ne me souvenais pas qu’il y ait eu autant de créatures mortes-vivantes dans la Forêt de Keiran. » Neo pencha la tête. Finalement, il haussa les épaules et dit : « Oh et bien, le lieu est sans importance. Cet endroit pourrait même être mieux. »

En quoi est-ce qu’il serait mieux ? Grisia ne comprenait toujours pas la situation dans son ensemble.

Neo dit froidement : « Si tu oses désobéir à mes ordres, tu dois être prêt à accepter la punition qui s’ensuivra, mais je n’ai aucune intention de te frapper. Tu es encore trop petit… Je serais obligé de contrôler ma force pour ne pas te tuer par accident. Quelle plaie ! »

Est-ce que ça signifie que, quand je serai plus grand, vous me frapperez sans hésitation ? Le message implicite contenu dans les paroles de son maître était loin d’être rassurant.

« C’est pour cette raison que je vais laisser les autres te frapper à ma place. C’est très commode, car ainsi tu pourras également t’exercer et améliorer tes compétences pourries à l’épée… Oh ! Il y a des créatures des ténèbres en grand nombre ici, donc tu pourras même entraîner ta capacité à les gérer. On fait d’une pierre trois coups ! Pas mal, pas mal ! »

« Profite à fond de ton voyage de punition ! » Une fois que Neo eut terminé de parler, il bondit dans un arbre et disparut sans laisser de trace, abandonnant Grisia derrière lui.

« Maître ! »

Grisia était totalement sous le choc, mais il ne pouvait pas empêcher Neo de partir. Même s’il l’avait pu, il connaissait la personnalité de son maître. Une fois qu’il avait déclaré quelque chose, il ne laisserait rien ni personne le faire revenir sur sa parole.

N’ayant pas d’autre choix, Grisia ne put qu’observer ses alentours. D’immenses arbres qui atteignaient les cieux s’étendaient à perte de vue, avec des vignes de toutes sortes qui les recouvraient densément. Il ne savait pas s’il imaginait des choses ou non, mais il pensait que les vignes aux formes bizarres et colorées d’une façon étrange semblaient bouger de temps en temps. La forêt tout entière était lugubre et humide. Les rafales qui soufflaient dans les branches apportaient une odeur de pourriture, et on aurait dit que quelque chose rampait lentement dans les hautes herbes.

Un enfant ordinaire, âgé de treize ans, aurait certainement été terrorisé à en perdre toute raison.

Par chance, si Grisia possédait bien une qualité, c’étaient ses tripes. En plus, il avait été entraîné (torturé) par son maître pendant plus d’un an. Aussi, même si ses compétences à l’épée ne s’étaient jamais améliorées, il avait petit à petit gagné plus de courage qu’auparavant.

Bien que Neo eût proclamé que ce voyage était pour le punir et pour entraîner sa capacité à affronter des créatures mortes-vivantes, chaque fois que Grisia souffrait et était pourchassé à travers toute la forêt par une variété de créatures à différents stades de décomposition, de gros rires s’élevaient inévitablement à proximité…

Mon maître doit simplement penser que tout cela est très divertissant… C’était ce que croyait Grisia au fond de lui, mais cela lui permit bel et bien de se détendre un peu. Après tout, son maître traînait toujours dans les parages et ne l’avait pas véritablement abandonné sans se préoccuper de lui.

Quand vint l’heure de manger à la nuit tombée, Grisia chassa un lapin qui avait l’air comestible, quoiqu’avec beaucoup de difficultés. Il le cuisina au feu de bois jusqu’à ce qu’il fût luisant de graisse et qu’une odeur délicieuse emplît l’air, ne redoutant pas du tout qu’il pût attirer l’attention de grands prédateurs. Cette forêt ne contenait principalement que des créatures des ténèbres et des arbres, et les nez de ces créatures des ténèbres étaient soit pourris, soit en phase de l’être.

J’adresse mes prières au Dieu de la Lumière… Après avoir récité ses prières, Grisia leva le lapin. Juste au moment où il était sur le point de mordre dedans avec un « ahhh », une ombre noire passa en l’espace d’un instant, sa main fut soudainement plus légère, et le lapin avait disparu. Grisia releva la tête et jeta un regard plein de ressentiment vers sa gauche.

« Ne me regarde pas comme ça ! »

Neo tenait le lapin dans sa main, alors qu’il décrétait avec audace et confiance : « Que l’apprenti cuisine pour son maître, c’est ainsi que les choses se doivent d’être ! Ce lapin est à moi à présent. Va chasser d’autres gibiers. »

En quelque sorte, Grisia en resta sans voix. Il s’était trompé. La forêt comportait encore un grand prédateur appelé « Maître »…

Les yeux rivés sur son maître qui mordait dans le lapin sans aucun remords, Grisia fit la moue et s’indigna : « Maître, j’éprouve soudainement une envie irrépressible de pratiquer mes compétences à l’épée. »

« Oh ? » Neo lui jeta un regard et se moqua : « Tu veux te servir de ton épée pour prendre ta revanche sur moi ? Avec le talent que tu as pour manier une lame ? Si tu arrives à me frapper de ton épée sans me manquer, ton maître mourra joyeusement sans aucun regret, et ce même si tu me tranchais en deux et m’expédiais auprès du Dieu de la Lumière ! »

« Maître, vos paroles sont très vexantes et sans pitié… »

Quand il se réveilla au matin suivant, son maître avait depuis longtemps disparu, mais il ne s’en inquiétait pas outre mesure. La majeure partie du temps, quand son « maître n’était pas là », c’était toujours mieux que lorsque son « maître était là ».

Cependant, il devait admettre que, quand il ouvrit les yeux et découvrit qu’il était cerné par des créatures des abysses, son maître lui manqua terriblement.

« Ouan, ouan… »

Alors que Grisia fuyait, il pleura et cria à s’en époumoner : « Maître, où êtes-vous ? Ne me dites pas que vous n’êtes pas dans les parages ! Vous avez dû vous cacher pour vous moquer de moi, n’est-ce pas ? Ouan, ouan, maître ! Allez-y ! Moquez-vous de moi comme vous le faites d’habitude, je vous en prie ! Maître ! »

Boom !

Quand on courait en pleurant, on se retrouvait avec la vue brouillée par les larmes, ce qui nous rendait plus susceptibles de trébucher sur une branche. Au même moment, tout son corps se familiarisa intimement avec la terre.

J’ai mal…

Malgré le fait que la douleur fut intense, il n’oublia pas qu’une meute de créatures mortes-vivantes était à ses trousses, aussi il se remit aussitôt sur ses pieds et regarda derrière lui… Un visage à demi pourri — tellement décomposé que, même si la créature n’avait pas ouvert la bouche, il aurait quand même pu apercevoir la moitié d’une rangée de dents — se trouvait juste devant lui. À cet instant, le propriétaire de ce visage immonde l’attrapa par les épaules avec ses deux mains, et le reste des créatures des ténèbres qui étaient sur ses talons l’avaient depuis longtemps étroitement encerclé.

Il se figea.

Est-ce que je vais mourir ?

« Non… »

Grisia se couvrit la tête et hurla : « Ne vous approchez pas de moi ! »

« Grisia ! »

Il ignorait combien de temps s’était écoulé, lorsqu’un cri retentit au loin. Le garçon, qui étreignait encore sa tête dans la même position qu’auparavant, tressaillit et redressa son visage, appelant doucement : « Maître ? »

D’assez loin, un autre appel retentit, la voix contenant une certaine anxiété : « Grisia, où es-tu ? Réponds-moi ! »

« Maître, je suis ici ! Ici ! »

Grisia bondit immédiatement sur ses pieds et cria à pleins poumons. En un instant, une silhouette familière surgit.

À la vue de cette silhouette familière, pour la première fois de sa vie, Grisa se jeta dans les bras de son maître et se mit à pleurer toutes les larmes de son corps.

Face à cela, même Neo resta un peu déconcerté. Bien que Grisia eût l’air faible, il était en fait incroyablement têtu. Durant la dernière année, peu importe le genre d’entraînement extrêmement difficile auquel il avait dû faire face, même quand il s’était retrouvé maintes fois avec les larmes aux yeux, aucune de ces larmes n’avait jamais coulé.

Cette fois-ci, le visage de Grisia était couvert de larmes. Neo savait qu’il était allé trop loin, mais il ignorait comment réconforter son apprenti. Il ne put que tapoter légèrement le dos de Grisia en lui répétant : « Tout va bien, tout va bien. N’aie pas peur. Ton maître est là. Je ne laisserai rien te faire du mal ! »

Néanmoins, Grisia continua à pleurer pendant un long moment avant de réussir à se maîtriser, se plaignant entre deux hoquets brisés : « Maître, où étiez-vous passé ? J’ai vraiment cru que j’allais mourir, ouan, ouan… »

« Désolé, désolé, j’étais allé faire mes exercices matinaux. Quand je suis revenu, tu avais disparu. Ça m’a pris beaucoup de temps pour te trouver. J’étais mort d’inquiétude… »

« Maître, vous vous inquiétiez pour moi ? » Marmonna Grisia avec incrédulité. Il croyait que son maître ne l’aimait pas et regrettait de l’avoir choisi. Après tout, chaque fois qu’ils avaient une leçon d’entraînement à l’épée, son maître lui hurlait des choses vexantes du genre : « Même sans un chevalier de rechange, je pourrais sélectionner n’importe quelle personne sur la rue, et elle serait plus forte que toi ! »

En voyant l’expression d’extrême surprise sur le visage de Grisia, Neo changea immédiatement son ton. Il se frappa la poitrine et dit : « Je veux dire, heureusement que tu n’es pas mort. Sinon, le Pape et Judgment m’auraient réprimandé à mort, et je n’aurais probablement même pas trouvé le chemin pour sortir de la forêt. Quel manque de chance cela aurait été… »

À ce moment, Grisia comprit pleinement quelque chose.

Ce qu’il y avait de plus effrayant à propos du Chevalier du Soleil le plus fort de toute l’histoire, ce n’était pas sa force. Au lieu de cela, c’était son imprévisibilité, comment vous ne pouviez jamais savoir s’il allait vous emmener dans un endroit terrifiant. Pire encore, non seulement sa mémoire et son sens des responsabilités étaient inversés proportionnellement à sa force, mais en plus il n’avait absolument aucun sens de l’orientation !

Après que Grisia se fut quelque peu calmé, Neo eut enfin le temps d’observer la situation dans laquelle ils se trouvaient… où tout dans un rayon de vingt mètres autour de lui était gelé par la magie élémentaire de glace. La scène ressemblait presque à une exhibition de sculptures de glace de créatures des ténèbres.

Après avoir examiné la scène et noté que seul Grisia n’avait pas été transformé en sculpture de glace, il était évident que la personne ayant provoqué un tel phénomène ne pouvait être que lui.

Neo fronça les sourcils et demanda : « Comment se fait-il que tu connaisses un sort de glace à grande échelle ? Est-ce que tu as vu un autre magicien en faire la démonstration dans les rues ? »

« Non, c’est Ecilan qui me l’a appris. »

« Ecilan ? »

« … L’Apprenti-Chevalier de Glace. »

Le Chevalier de Glace, pas étonnant. La magie élémentaire de glace était en effet la signature caractéristique du Chevalier de Glace. Son front se plissa, et il demanda : « Grisia, quel âge as-tu cette année ? »

« Maître, vous avez encore oublié ? J’ai treize ans. »

Neo hésita un instant avant de le questionner de nouveau : « Et combien de temps s’est écoulé depuis que tu as utilisé la magie pour la première fois ? »

Grisia pencha la tête, réfléchissant un court moment avant de répondre : « Un an, six mois et treize jours. »

Quand il entendit cela, Neo fronça encore plus les sourcils. Même s’il ne comprenait pas grand-chose aux mages, Grisia n’avait étudié que pendant un an et demi, et de façon décousue en chapardant des sorts ici et là sans que personne ne le supervise ; en plus, il n’avait pas plus de treize ans cette année… Et même s’il étudiait réellement la magie, quel genre d’enfant serait capable de lancer une attaque magique aussi puissante ?

Impossible ! Neo réfuta immédiatement sa propre question. Si tous les mages étaient aussi puissants, le monde tout entier aurait depuis longtemps abandonné les autres professions.

Mais si les choses continuaient ainsi, lorsque Grisia prendrait ses fonctions de Chevalier du Soleil à l’âge de vingt ans, sa magie pourrait s’avérer être suffisamment forte pour pouvoir lui permettre d’affronter Neo. À ce moment-là, Grisia serait le Chevalier du Soleil, mais Neo, lui, aurait perdu la faveur du Dieu de la Lumière… Grisia ne viendrait pas prendre sa revanche, n’est-ce pas ?

En repensant à la manière dont il avait traité Grisia jusqu’à présent… Ah ! Peu importe à quel point il était sans honte, il ne pouvait pas affirmer avoir été un bon maître. Pour faire simple, quelle que soit l’idée qui lui passait par la tête, il l’enseignait, et une bonne partie de cet enseignement était des leçons expérimentales qu’il avait mises sur pied pour s’amuser, comme l’entraînement pour être élégant durant lequel il avait forcé Grisia à tomber constamment jusqu’à ce qu’il pût tomber avec une grâce au-delà de toute comparaison.

S’il venait à discuter de ses méthodes d’enseignement avec Judgment, ce dernier lèverait les yeux au ciel en entendant huit des méthodes sur dix. À une technique en particulier, il s’exclamerait même avec colère : « C’est de la maltraitance, pas de l’enseignement ! Essaie-la, si tu l’oses ! Même si je ne peux pas gagner contre toi, je peux toujours te le faire payer. » Et pour une seule de ces méthodes, il se pourrait qu’il dise avec hésitation : « Peut-être que cela vaut le coup de l’essayer. »

Cependant, parmi la liste précédente des dix méthodes d’enseignement, il en avait utilisé au moins cinq sur Grisia, incluant même celle qui lui vaudrait un « paiement » en retour… Dans tous les cas, il était en sécurité tant que Judgment ne le découvrait pas !

Est-ce que cela signifiait qu’il allait devoir mieux traiter Grisia à partir de maintenant ?

Peu importe, autant laisser tomber ! Même s’il se résolvait à mieux traiter Grisia à partir de maintenant, il y avait de fortes chances pour qu’il ait totalement oublié quand le soleil se lèverait demain. Ou, quand viendrait l’heure des leçons au maniement des armes, il se pourrait également qu’il oublie sa promesse, empli par des pensées de meurtre à l’égard de cet idiot incapable de manier une épée !

Neo mit de l’ordre dans ses pensées. En fin de compte, sous le regard perplexe de son élève, il déclara solennellement : « Grisia, tu dois savoir que, en tant que chevalier sacré et particulièrement en tant que Chevalier du Soleil, le leader des Douze Chevaliers Sacrés, tu ne dois pas faire de magie ! Cela enfreint complètement les principes de base des chevaliers sacrés. Les chevaliers sacrés doivent utiliser des armes. Et par-dessus tout, le Chevalier du Soleil, qui manie l’Épée Divine du Soleil, ne peut se servir que d’une épée… »

Après avoir dit cela, Neo prit soudainement en considération à quel point les compétences à l’épée de son apprenti étaient mauvaises. S’il lui disait qu’il pouvait seulement se servir d’une épée, il se pourrait qu’il ne survive pas jusqu’à ses vingt ans. Neo ajouta rapidement : « Et la lumière sacrée ! Tout au plus, tu peux utiliser la magie quand il n’y a personne dans les alentours. En résumé, ne laisse jamais personne te voir utiliser la magie ! M’as-tu bien compris ? »

Grisia s’empêtra dans ses mots, bredouillant : « Mais, maître… Mes… Mes… Mes capacités à l’épée… »

« Tu es seulement autorisé à te servir d’une épée. Il est impératif que personne ne te voie pratiquer la magie ! » Répliqua Neo froidement. « Ou bien peut-être veux-tu expérimenter par toi-même jusqu’où exactement le Chevalier du Soleil le plus fort de l’histoire peut t’emmener ? Est-ce que tu veux voir à quoi ressemble le dragon des légendes ? Ou est-ce que tu veux aller observer la silhouette d’un chevalier de la mort ? Peut-être que tu veux découvrir à quel point la demeure d’une liche immortelle peut être étrange… »

« C’est compris ! Je suis seulement autorisé à me servir d’une épée ! »

Grisia hocha la tête avec sincérité, puis ajouta silencieusement quelques mots pour lui-même : je suis seulement autorisé à me servir d’une épée… à moins que nul ne me voie !

Note de fin de page

Cette histoire bonus est quelque chose que Yu Wo a écrit, mais qu’elle n’est pas parvenue à utiliser dans les romans. Elle a partagé cette friandise sur son blogue, en pensant que ses lecteurs seraient heureux de pouvoir lire une histoire sur les leçons que Neo a enseignées à Grisia.

La Légende du Chevalier du Soleil Histoire Parallèle # 3 : Faire face aux ténèbres

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La Légende du Chevalier du Soleil : Histoires Parallèles

Roman d’origine en chinois par : 御 我 Yu Wo 


Side-Story #3: Facing The Darkness – traduit du chinois vers l’anglais par dahlys[PR!]
Histoire parallèle #3 : Faire face aux ténèbres – traduit de l’anglais vers le français par Nocta
+ Travail de vérification par Yukomin

Lesus du Jugement s’agenouilla au sol, avec la tête penchée et la main droite posée sur son cœur, alors qu’il priait devant le Symbole de la Lumière.

La chambre de prière avait été conçue avec soin afin que la pièce entière paraisse extrêmement sombre. Seule la fenêtre au-dessus du Symbole de la Lumière était ouverte, illuminant vivement le symbole.

Pour cette raison, le Chevalier du Jugement, tout vêtu de noir, était complètement enveloppé par les ténèbres, et on pouvait difficilement distinguer sa silhouette agenouillée devant le Symbole de la Lumière.

Le Chevalier du Jugement arrive, dépêchons-nous de nous en aller…

Vous ne savez qu’interroger des criminels enchaînés au mur ! Quelle sorte de Chevalier Sacré êtes-vous donc ?

Le Chevalier du Jugement est un homme cruel et sans cœur… Quoi qu’il arrive, ne le contrarie jamais !

Pardonnez-moi, pardonnez-moi… Les dieux ne sont-ils pas censés pardonner les pêcheurs ? Pourquoi ne me pardonnez-vous pas !?

Regarde-toi, entièrement couvert de vêtements aussi noirs que l’enfer. Quel genre de Chevalier Sacré es-tu donc ?

« Malgré le fait qu’il soit très occupé par son travail, le Chevalier du Jugement n’oublie jamais de prier la Lumière. Sun admire réellement un tel dévouement. »

En entendant soudainement la voix de quelqu’un, Lesus se pétrifia un moment avant de tourner la tête. La porte de la chambre de prière avait été ouverte, et une personne était appuyée contre l’encadrement. La lumière brillante provenant de l’extérieur faisait luire avec radiance ses cheveux blonds-dorés.

C’est si lumineux.

Lesus détourna le regard et garda la tête baissée. Il dit simplement : « Prier est à présent le seul moyen pour moi de confirmer que je suis bel et bien un Chevalier Sacré. »

Stupéfait, Grisia entra rapidement dans la salle et referma la porte. Il demanda : « Que s’est-il passé ? »

Lesus secoua la tête et répondit : « Je suis juste un peu confus. Je ne suis pas sûr de savoir si je suis réellement un Chevalier Sacré, ou si je suis… un bourreau. » Alors qu’il finissait cette phrase, sa voix devint presque trop faible pour être entendue.

Sous le choc, Grisia s’exclama : « Bien sûr que tu es un Chevalier Sacré, et tu es même le Chevalier du Jugement ! Lesus, si tu n’en es pas un, qui d’autre serait digne d’être appelé ainsi ? »

Lesus sourit faiblement et mentionna quelque chose qui n’avait rien à voir : « Grisia, sais-tu où se trouve le Symbole de la Lumière dans le Tribunal ? »

Déconcerté, Grisia répondit honnêtement : « Je n’y ai jamais prêté attention. »

« Afin de laisser les criminels se confesser et se repentir tout en regardant le Symbole de la Lumière, le symbole est placé sur le mur devant les criminels. Chaque fois que j’interroge des criminels, le symbole est illuminé derrière moi… Mon dos est toujours tourné au Symbole de la Lumière, alors que je fais face aux criminels et que je les interroge, en employant des méthodes plus cruelles qu’aucun d’entre eux n’ont jamais utilisées. »

Toutes sortes de méfaits malfaisants, d’appareils de torture, de coups de fouet, de sanctions à mort… Lesus se remémora les méthodes de torture auxquelles il était le plus communément exposé au quotidien. Aucune d’entre elles ne lui donnait l’impression d’être un Chevalier Sacré. Il n’éprouvait que le sentiment de faire face à une obscurité sans limite et que, s’il venait à perdre pied ne serait-ce qu’une fraction de seconde, il chuterait dans des ténèbres sans fin, pour ne jamais plus en ressortir…

Grisa répondit précipitamment : « Tu es le Chevalier du Jugement, et juger les criminels a toujours été la responsabilité du Chevalier du Jugement. Tu es donc forcément un Chevalier Sacré ! »

« C’est ce que tu crois ? Mais, j’ignore moi-même quand ce sera mon tour de sombrer dans ces ténèbres. » Lesus se leva et annonça brusquement : « Je devrais retourner au Tribunal. J’ai encore de nombreuses affaires à régler… et beaucoup d’audiences avec des criminels à conduire. »

Après qu’il eût fini de parler, il marcha en direction de la porte. Cependant, la voix de Grisia résonna derrière lui : « Lesus, même s’ils font face aux ténèbres avec le dos tourné à la Lumière, les Chevaliers Sacrés marchent tout de même sous la lumière, pas les ténèbres! »

Lesus s’arrêta.

« Si tu ne sacrifiais pas tes chances de faire face à la lumière, est-ce que la sécurité de la Cité du Bourgeon serait aussi splendide ? Et, pourtant, tu commences à regretter ta décision ? Lesus, regrettes-tu ton choix de te sacrifier pour que les citoyens puissent vivre dans la lumière ? »

Lesus se retourna et vit le Chevalier du Soleil qui se tenait dans l’obscurité avec une expression de tristesse sur le visage. Le Chevalier du Soleil demanda : « Lesus, regrettes-tu réellement d’avoir sacrifié tes chances de faire face à la lumière ? »

Même s’ils font face aux ténèbres avec le dos tourné à la Lumière, les Chevaliers Sacrés marchent tout de même sous la lumière, pas les ténèbres !

Bien que le Symbole de la Lumière derrière lui fût baignée dans la lumière du soleil, celui qui l’avait réellement sauvé était le Chevalier Sacré qui se tenait dans l’obscurité.

Si celui qui se tenait dans l’obscurité était la personne qui l’avait sauvé, peut-être qu’il pourrait aussi continuer à faire face aux ténèbres.

« Lesus ? »

Lesus sourit et questionna : « Grisia, même si je venais à sombrer dans les ténèbres, tu te contenterais de me ramener, n’est-ce pas ? »

« Bien sûr ! Nous sommes de bons amis après tout ! Par conséquent, Lesus, s’il-te-plaît, aide-moi à donner une leçon à Earth ! Cet enfoiré mérite d’être tabassé jusqu’à ce qu’il soit à moitié mort et à moitié paralysé ! On verra s’il ose encore exhiber devant moi la dernière femme qu’il a attiré par la suite ! »

« … »

Il semblerait que la question de savoir qui ramènera qui est encore incertaine !

La Légende du Chevalier du Soleil Histoire Parallèle # 2 : La vérité cachée

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La Légende du Chevalier du Soleil : Histoires Parallèles

Roman d’origine en chinois par : 御我 (Yu Wo)


Side-Story #2: Truth in Disguise – traduit du chinois vers l’anglais par Lucathia[PR!]
Histoire parallèle #2: La vérité cachée – traduit de l’anglais vers le français par AkaiiRia et Irina
+ travail de vérification par Nocta

Au sous-sol, Chikus donna des coups de pied aux quatre murs qui l’entouraient de toutes ses forces. Les murs étaient faits de pierres et, avec sa force actuelle, il lui était complètement impossible de les fracasser.

Même s’il savait que ses actions étaient complètement inutiles, il ne pouvait tout de même pas rester là à ne rien faire. Tout ce qu’il pouvait voir devant lui était un voile de ténèbres. En tout temps, ces ténèbres envahissaient ses sens. Dès qu’il cessait de bouger, il se sentait comme s’il était sur le point d’être avalé par celles-ci…

Soudainement, la seule porte menant au sous-sol s’ouvrit.

La lumière subite le fit plisser des yeux. Il leva la tête et aperçut, à côté de la porte du sous-sol, des cheveux dorés scintillant sous les rayons de lumière. Parce que la source de lumière était située dans le dos de l’individu, malgré le fait que son visage et le haut de son corps étaient visibles, tout restait assez flou. Un halo de lumière entourait la personne, presque comme si son corps tout entier émettait de la lumière.

La personne qui venait d’arriver lui tendit la main et annonça avec un sourire : « Je t’ai trouvé. »

 

 

Durant la leçon d’entraînement, Neo, l’instructeur responsable d’enseigner le maniement de l’épée, marchait parmi les Douze Apprentis-Chevaliers Sacrés. Après les avoir examinés avec soin les uns après les autres, il se sentit totalement satisfait. La technique à l’épée de tous les apprentis-chevaliers pouvait être considérée comme au-delà des attentes qu’il avait eues pour eux. Il pouvait même affirmer que plusieurs d’entre eux étaient des experts dans cet art, qui avaient de loin dépassé toutes espérances.

Premièrement, il y avait l’Apprenti-Chevalier du Jugement. Pendant la sélection, Neo avait entendu dire que sa technique à l’épée était excellente, mais il n’aurait jamais songé que l’Apprenti-Chevalier de Glace pourrait tenir tête à l’Apprenti-Chevalier du Jugement lorsqu’on parlait du maniement de l’épée. Aussi, malgré le fait que l’Apprenti-Chevalier de la Forêt avait un air idiot sur le visage, sa technique à l’épée était également plutôt remarquablement bonne.

Cela mit Neo d’une humeur inopinément bonne. Être capable d’élever autant d’experts dans le maniement de l’épée signifiait qu’il aurait encore plus d’adversaires avec lesquels il pourrait faire des duels dans le futur. Ce ne pouvait être qu’une bonne chose.

« Hein ? Pourquoi mon épée a-t-elle encore disparu ? »

L’esprit de Neo s’arrêta pendant l’espace d’une seconde. Cette voix appartient à… Il tourna la tête pour regarder. Comme il le pensait, elle appartenait à son apprenti, Grisia, dont le visage était au moment même perplexe, tandis qu’il fixait ses mains vides.

« Attention ! »

Sur le côté, Chikus cria soudainement un avertissement. Au même moment, il se précipita en avant et mania adroitement son épée, allant dévier une épée qui volait en direction de quelqu’un d’autre.

Ceo tourna la tête pour voir ce qu’il se passait, les yeux grands ouverts, tandis qu’il poussait un petit cri de surprise à la vue de l’épée qui avait été envoyée au sol… Cette épée pointe directement sur moi !

Merci, Dieu de la lumière, elle a été déviée. Il relâcha son souffle et remercia vite Chikus.

Immédiatement, Chikus commença à bruyamment réprimander l’origine de ce fiasco. « Qu’est-ce que tu fabriques !? »

« Je suis vraiment déso… » Grisia ne parvint à compléter que la moitié de son excuse avant d’être agrippé par le col par-derrière. Sa personne tout entière fut soulevée. Il tourna la tête pour regarder, juste à temps pour apercevoir le sourire de son propre maître.

Bien qu’il y eût un sourire présent sur le visage de Neo, ses yeux ne montraient aucun signe de joie comme il lui ordonnait : « Présente-lui tes excuses. »

Grisia réagit immédiatement avec un sourire incomparablement brillant et typique du Chevalier du Soleil. Puis, il se tourna, baissant la tête en un geste d’excuse devant Ceo… Pour quelqu’un qui était retenu dans les airs par le collet, sa posture d’excuse voutée était véritablement assez gracieuse pour surprendre les gens.

Le teint de Ceo pâlit, alors qu’il s’empressait de dire : « Non, non, tu n’as pas besoin de t’excuser… »

Toutefois, Grisia avait déjà ouvert la bouche, articulant un discours long et exceptionnellement fluide. « Mon cher frère Ceo, bien que la lumière soit resplendissante, elle brûle aussi de mille éclats, de toute évidence capable de percer les plus profondes ténèbres du cœur de quelqu’un. Elle est si brillante que, pendant un instant, Grisia a été incapable de la supporter, faisant en sorte que Grisia perde sa poigne sur l’épée qui est employée pour causer des massacres. Comme nous sommes tous les deux des enfants du Dieu de la Lumière, Grisia espère que tu pardonneras à celui-ci sa bévue. Puisse Grisia s’aventurer jusqu’à jurer au soleil dans le ciel qu’il ne commettra plus jamais ce genre d’erreur impardonnable ! »

Avec une expression douloureuse sur le visage, Ceo écouta le discours en entier et soupira d’impuissance, en répondant : « Je te pardonne. Même si tu commets une autre erreur, ne t’inquiète pas à ce sujet. J’espère simplement que, la prochaine fois, tu ne t’excuseras plus jamais. T’écouter t’excuser me fatigue plus qu’autre chose… »

En entendant cela, Neo ne sut vraiment pas s’il devait rire ou pleurer. Il ne put se retenir d’admettre que, hormis le fait que la technique à l’épée de Grisia était complètement nulle, lui-même ne pouvait trouver aucune autre faute dans les autres compétences de Grisia… La capacité de Grisia à prétendre être élégant et à raconter des âneries était peut-être même un peu trop bonne. Cela donnait l’impression que Neo pouvait se relâcher avec les leçons de développement du personnage de Grisia dans le futur.

Neo tapa des mains et annonça à tout le monde : « La leçon d’aujourd’hui dans le maniement des armes se termine ici. Faites une courte pause, et ensuite allez rejoindre chacun de vos propres maîtres pour vos leçons habituelles. »

À cette annonce, tout le monde partit l’un après l’autre. Plusieurs lâchèrent même un soupir de soulagement. Bien que le Capitaine-Chevalier du Soleil arborât un sourire en tout temps sur son visage, personne ne croyait jamais qu’il souriait réellement.

Avant de s’en aller, Chikus jeta un regard noir à Grisia et déclara de façon provocante : « Si tu ne peux pas te servir d’une épée, dans ce cas dégage d’ici. » Toutefois, Grisia se contenta de sourire brillamment en réponse.

Comme c’est ennuyeux ! Chikus pressa le pas pour rejoindre la personne devant lui et héla : « Hé ! Attends-moi, Aivis. Tu veux bien t’entraîner avec moi ce soir ? »

Aivis scruta d’abord les alentours, s’assurant que le Capitaine-Chevalier du Soleil était déjà parti, avant de rouler des yeux à l’intention de Chikus et de rétorquer : « Pourquoi ne vas-tu pas demander à quelqu’un dans ta faction ? Tu sais parfaitement que je suis l’Apprenti-Chevalier de la Pierre, qui appartient à la faction du Chevalier du Jugement. Je ne m’entends pas bien avec les gens comme toi, qui sont dans celle du Chevalier du Soleil ! »

« Vraiment ? » Chikus renifla avec dédain et tendit immédiatement la main. « Si nous ne sommes pas amis, alors rends-moi mon argent pour le vin ! Tu n’as quand même pas oublié combien tu me dois, pas vrai ? »

« C’est… » Aivis changea sur-le-champ de sujet et lui demanda : « Tu ne viens pas de dire que tu voulais t’entraîner ce soir ? Pourquoi est-ce que tu n’amènerais pas quelqu’un de ta faction, et je vais aussi venir avec Ecilan ? Nous pouvons nous battre à tour de rôle, ou même à deux contre deux. »

Chikus s’y opposa : « Qui voudrait les amener avec soi !? Ce sont toutes des mauviettes ! »

Tu parles beaucoup trop fort. Grisia est encore là ! Aivis jeta un regard en direction de Grisia. Ce dernier passa à côté d’eux et s’aventura même à leur sourire.

Après que Grisia fut parti, Aivis sourit de façon désabusée et dit : « Tu fais sûrement erreur ? Il doit bien y avoir au moins une personne… »

Il hésita et prit un moment pour réfléchir. Ceo ? Hum, il est très timide. Il appartient probablement à la gamme de ce que Chikus considère comme « une mauviette ». Elmairy est hors de question lui aussi. Grisia… euh, ne parlons même pas de savoir s’il est une mauviette ou pas. Si nous nous entraînons au maniement de l’épée, nous ne devons absolument pas l’inviter.

En fin de compte, après y avoir bien songé, il soupira. « Je pense que je vais juste demander à Ecilan. Nous pouvons tous les trois y aller à tour de rôle… »

Chikus afficha un rictus dédaigneux.

 

 

« Tu n’as pas besoin de prendre davantage de leçons sur le développement de ton personnage. »

Le Chevalier de Flamme regarda son propre apprenti avec une sorte d’impuissance. Les deux mains de Chikus n’étaient jamais inoccupées, ayant toujours besoin de toucher à ceci ou de jouer avec cela ; il portait toujours son uniforme de chevalier n’importe comment, les taches sur sa chemise augmentaient sans arrêt, sans jamais diminuer ; et chaque fois qu’il ouvrait la bouche, sa voix portait suffisamment loin pour que le Temple Sacré tout entier puisse l’entendre.

Ce dernier ressemblait encore plus au Chevalier de Flamme des légendes qu’il ne lui ressemblait lui-même, lui qui avait été le Chevalier de Flamme pendant dix ans. Qu’y a-t-il d’autre à développer ?

Chikus renifla hautainement. Du fond de son cœur, il n’avait jamais eu une bonne impression de ces leçons de développement du personnage. Comment peut-on possiblement développer le personnage de quelqu’un ? Ce n’est qu’un ramassis de conneries !

« Je n’ai plus besoin de prendre de leçons ? Dans ce cas, je m’en vais m’amuser un peu ! »

Aller t’amuser pendant les heures de leçons ? Le Chevalier de Flamme s’empressa de dire : « Attends une minute ! »

« Qu’est-ce qu’il y a maintenant ? » Chikus se retourna, les bras croisés sur la poitrine. Il écrasa le sol avec la plante de son pied et déclara avec impatience : « Si tu as quelque chose à dire, alors crache le morceau ! »

Voyant son attitude, le Chevalier de Flamme se mit tout d’abord en colère. Est-ce vraiment le genre d’attitude qu’un apprenti devrait montrer envers son maître ?

Mais, à cet instant-là, il se rappela sur-le-champ que le mépris de Chikus, ainsi que son attitude écrasante et peu sophistiquée, était exactement ce que représentaient les caractéristiques propres au Chevalier de Flamme, bien plus parfaites que sa propre façade qu’il avait dû maintenir ces dix dernières années. Une fois qu’il réalisa ce fait, il ne sut plus s’il devait rire ou pleurer.

Même si quelqu’un me critiquait pour avoir laissé mon apprenti sortir s’amuser pendant les heures de leçons, cette personne n’aurait qu’à jeter un coup d’œil à la personnalité de Chikus et serait probablement d’accord pour dire que cet enfant n’a pas du tout besoin de leçons de développement !

Impuissant, il lâcha : « Oublie ça. Va donc t’amuser, essaie juste de ne pas dépasser les bornes. »

« Tu m’as rappelé et tu n’as rien à dire. Et puis quoi encore ? Tu n’as vraiment rien de mieux à faire… ? »

Chikus maugréa tandis qu’il s’éloignait d’un pas lourd.

En entendant cela, le Chevalier de Flamme ne put que forcer un sourire amer sur son visage.

 

 

Chikus se promenait dans les couloirs du Temple Sacré, saluant les chevaliers sacrés qu’il croisait, tout en réfléchissant à l’endroit où il voulait aller pour s’amuser un peu…

« Bégaye ! »

Le cri bruyant et soudain le fit brutalement sursauter. Il regarda autour de lui et avança vers la chambre d’où provenait le bruit. Discrètement, il jeta un coup d’œil à l’intérieur et vit que le Chevalier de la Terre ainsi que l’Apprenti-Chevalier Georgo étaient à l’intérieur. Le plus étrange était qu’il y avait également une guérisseuse, et que la guérisseuse paraissait même être une fille d’à peu près son âge.

« Georgo ! Quand tu parles, bégaye, et quand tu vois une fille, tu dois rougi… Sale petit bâtard ! Ne drague pas la guérisseuse, pendant que je te fais des remontrances ! Éloigne-toi d’elle ! »

Voyant comment la guérisseuse rougissante et embarrassée avait presque mordu à l’hameçon, le cœur de Georgo se serra, mais il avait peur d’énerver son maître et de le rendre encore plus furieux. Celui-ci paraissait déjà être sur le point d’exploser. Il put seulement reculer d’un pas sans s’empêcher de grommeler : « Maître, vous ne bégayez plus… »

Le Chevalier de la Terre réalisa soudainement que ses paroles étaient trop fluides. Il s’empressa de tousser vigoureusement et dit : « J-Je suis juste un p-peu tr-trop agité. C-C’est entièrement ta faute, mon en-enfant ; pourquoi dois-tu être si t-têtu… Aaaah ! Tu me mets dans une rage folle ! C’est à toi que j’ordonne de bégayer, pas à moi ! Tu ferais mieux de bégayer quand tu parles, ou sinon je vais t’écraser mon poing dans le visage et te casser toutes les dents. On verra si tu peux encore parler avec fluidité par la suite ! »

En remarquant qu’il était sur le point de se prendre une raclée, Georgo adopta immédiatement une expression obéissante et hocha « sincèrement » la tête en répondant : « D’accord ! D’accord ! C’est bon, j’ai compris ! »

Le Chevalier de la Terre rugit aussitôt : « “D’accord ! D’accord”, ce n’est pas bégayer ! Tu dois dire : “D’accord, j-j’ai compris” ; et ne pas ajouter de mots malhonnêtes et hypocrites comme “c’est bon” ! De plus, qu’est-ce que c’est que cette expression ?! Tu penses que tu as l’air sincère et honnête ?! Tu as manifestement l’air mécontent ! Tu fais vraiment exprès de me provoquer… »

« Haha… » Chikus éclata d’un rire fort et se couvrit immédiatement la bouche à l’aide d’une main, secouant la tête tandis qu’il riait intérieurement.

Georgo ? Honnête et sincère ? Haha !

« Tu ferais mieux de la regarder ! »

Un autre hurlement retentit. Cette fois, Chikus ne sursauta pas. Il réalisa même que ce bruit ne venait pas de la chambre du Chevalier de la Terre, mais plutôt de la chambre à côté.

Que se passe-t-il, cette fois ? Curieux, il passa la tête dans le cadre de la porte de l’autre chambre.

Il jeta un coup d’œil à l’intérieur de la pièce, mais ne s’attendait pas à ce que la scène de l’entraînement dans cette chambre fût presque identique à celle de la pièce précédente. Comme précédemment, le maître et l’apprenti étaient présents, hormis que cette fois il y avait l’actuel Chevalier de la Tempête et l’Apprenti-Chevalier de la Tempête, en plus d’une guérisseuse, bien que la guérisseuse dans cette pièce fût beaucoup plus âgée. Elle paraissait être dans la vingtaine, et ses traits ainsi que sa silhouette étaient absolument magnifiques.

« Ceo, ouvre les yeux et regarde-la. » Le ton dans la voix du Chevalier de la Tempête approchait le zéro absolu.

Fournissant de gros efforts, Ceo leva la tête. Plutôt que de regarder la guérisseuse, il était plus approprié de dire qu’il la fixait avec un regard vide.

Voyant cela, le Chevalier de la Tempête demanda immédiatement à la jeune femme : « Guérisseuse, je vous en prie. »

« Aucun problème. » Dans l’instant, la guérisseuse plissa les lèvres sensuellement, et fit un clin d’œil au jeune et beau garçon, adoptant diverses positions séductrices, employant toutes ses compétences pour le séduire.

À cause de la colère manifeste de son maître et de son ordre glacial, Ceo fournit de grands efforts cette fois pour ne pas baisser les yeux, bien que son visage fût devenu depuis longtemps aussi rouge qu’une tomate, la couleur se répandant jusqu’à la pointe de ses oreilles.

« Embrasse-la. »

Voyant que son apprenti était enfin capable de regarder une femme sans se détourner, le Chevalier de la Tempête voulut saisir l’occasion pour avancer jusqu’à la prochaine étape ; néanmoins, une fois que les mots eurent quitté sa bouche, il vit immédiatement son apprenti agir comme si le monde était sur le point de s’écrouler. Soudainement, il se sentit comme s’il corrompait un innocent… Incapable de le supporter, il ajouta : « Tu peux l’embrasser sur la joue si tu préfères. »

« Maître, serait-il suffisant de juste nous tenir la main ? »

Ceo révéla une expression implorante, mais le visage de son maître restait figé. Il commençait même à montrer des signes qu’il allait de nouveau exploser, donc Ceo n’eut pas d’autre choix que d’obéir. Il se tourna vers la guérisseuse, dont le visage était depuis longtemps passé d’une expression envoûtante à une où elle ne semblait pas savoir s’il fallait rire ou pleurer.

Après lui avoir jeté un regard, Ceo n’était plus aussi nerveux qu’auparavant. Il se tourna pour observer la réaction de son maître, dont l’expression était toujours figée. Celle-ci donnait l’impression qu’il n’y avait pas de place pour la discussion. Dans ces conditions, Ceo prit son courage à deux mains et fronça les lèvres avant de se pencher, frôlant la joue de la guérisseuse. Il devint immédiatement complètement rouge et se précipita vers le coin le plus reculé de la pièce.

Voyant cela, le Chevalier de la Tempête se moqua de lui avec frustration : « Espèce de poule mouillée ! Ça fait déjà trois ans que tu t’entraînes, et pourtant tu donnes encore l’impression que te demander d’embrasser une femme revient à te forcer à embrasser un orc ! »

« Que venez-vous de dire ? » Demanda haut et fort la guérisseuse.

Le Chevalier de la Tempête se figea. La femme s’était approchée de lui et le frappait avec ses poings de toutes ses forces.

« Non, non, je veux dire que vous êtes aussi belle qu’un orc… Aaaaah ! Ne me frappez pas ; ma langue a fourché, c’était une erreur ! Je suis désolé, vraiment ! »

À ce moment-là, Chikus ne put plus supporter de regarder. Il se précipita dans la chambre et, avant que quiconque ait pu réagir, il attrapa la guérisseuse pour l’embrasser bruyamment sur la joue. Il s’exclama ensuite en regardant Ceo, qui s’était tassé dans son coin : « Ceo, regarde ! Qu’est-ce qu’il y a de si compliqué à donner un petit baiser ? »

« Exactement ! Ce petit frère est adorable ! » Déclara joyeusement la guérisseuse avant de déposer plusieurs baisers sur le visage de Chikus. Elle se détourna par la suite et déclara férocement à l’actuel Chevalier de la Tempête et son apprenti : « Vous n’êtes que des bons à rien ! »

« Petit frère, partons ! Ta grande sœur va te donner des bonbons. Je t’achèterai ce que tu voudras. »

« Vraiment ? » Les yeux de Chikus se mirent à briller, comme il s’écriait : « Dans ce cas, allons-y tout de suite, grande sœur ! »

La guérisseuse était ravie de se faire appeler « grande sœur »1. Elle se dépêcha de répondre : « Bien sûr ! Allons-y tout de suite. »

Elle attrapa Chikus, et ne négligea pas de lever les yeux au ciel à l’intention du Chevalier de la Tempête avant de quitter la pièce.

Derrière eux, ce fut avec stupéfaction que l’actuel Chevalier de la Tempête et son apprenti regardèrent Chikus et la guérisseuse quitter la pièce. Après un long moment, Ceo s’approcha timidement de son maître et s’enquit d’une petite voix : « Maître, il n’y a plus de femme ici. Est-ce que nous allons nous entraîner à quelque chose d’autre ? »

« Nous entraîner ? Attends, tu vas voir ! »

Le Chevalier de la Tempête saisit l’oreille de son élève et hurla furieusement : « Je me suis fait traiter de bon à rien à cause de toi ! Sale petite poule mouillée ! Sais-tu à quel point c’est humiliant pour un homme de se faire traiter de bon à rien ? Tu es le seul bon à rien ici ! Si dans un an tu continues à rougir en voyant des femmes, et si dans deux ans tu n’arrives toujours pas à leur lancer de clins d’œil, je… je dépenserai jusqu’à la dernière pièce d’or pour qu’un groupe de femmes prennent ta virginité par la force ! »

Ouch, ouch ! Avec une grimace misérable, Ceo glapit : « Je vous en prie, tout, mais pas ça ! Maître… Je vais faire de mon mieux ! Je le jure ! »

 

 

Après s’être séparé de la guérisseuse passionnée, Chikus tenait un sac de bonbons dans ses mains. Pourtant, il ne suivit pas son plan originel de sortir pour s’amuser un peu. Au lieu de cela, il continua d’espionner avec curiosité les leçons des autres Apprentis-Chevaliers.

Elmairy prenait soin de petits animaux. Et son maître se tenait à côté de lui, lui récitant des contes de fées. Un regard suffit à Chikus pour savoir qu’il allait mourir d’ennui s’il restait, alors il se retourna et poursuivit sa route.

Par la suite, il s’aperçut qu’il n’y avait personne dans la salle de classe du Chevalier du Nuage et de son apprenti. Chikus balaya du regard la pièce tout entière, mais ne trouva pas la moindre trace de leur présence.

« Comme c’est bizarre ! Se pourrait-il qu’il soit comme moi ? Peut-être qu’il n’a pas besoin de leçons ? » Chikus se gratta la tête et se tourna pour partir…

« Est-ce que tu me cherches ? »

Aaaaaah !

Chikus sursauta sous le coup de la surprise et pivota rapidement. Quelqu’un se tenait en effet derrière lui, sans dire un mot. En outre, son visage était pâle, sa silhouette fine et fragile, et ses cheveux couvraient la moitié de son visage…

« Je-je ne te cher-cherchais pas ! » Chikus bégayait tellement que même le Chevalier de la Terre aurait été fier de lui.

Le jeune Chevalier du Nuage pencha lentement la tête sur le côté et dit : « Ça fait un moment que tu te tiens dehors et que tu observes la classe. »

« … Tu étais à l’intérieur ? »

Le jeune Chevalier du Nuage hocha lentement la tête.

Comment c’est possible ? Il n’y avait clairement personne à l’intérieur tout à l’heure… Chikus sentit soudainement un courant d’air dans son dos et trouva rapidement une excuse : « J-Je cherchais le jeune Chevalier du Soleil. »

Le jeune Chevalier du Nuage hocha lentement la tête, leva délicatement la main pour pointer la pièce d’à côté. « Grisia est à côté. »

« A-Ah, merci ! »

Chikus se tourna pour se dépêcher de s’enfuir, mais après avoir effectué la moitié du chemin vers la porte, il pensa subitement à une question. Sa curiosité l’emporta sur sa peur, et il tourna la tête pour demander : « Est-ce que ton maître est dans la salle de classe ? »

L’Apprenti-Chevalier du Nuage secoua la tête : « Mon maître est allé faire une sieste sous l’arbre banian. »

Fiou. Si même le Chevalier du Nuage, un adulte, avait été à l’intérieur et qu’il ne l’avait pas vu… Alors, ç’aurait vraiment été comme apercevoir des fantômes en plein jour.

Chikus se tapota la poitrine et poussa un soupir de soulagement. Curieux, il continua à le questionner : « Dans ce cas, pourquoi ne l’as-tu pas suivi ? »

« Mon maître m’a dit de ne pas le déranger et de trouver mon propre endroit pour dériver. »

Dériver… Tu es sûr qu’il t’a dit de dériver ?

Chikus chassa cette pensée. « D’accord, retourne dans ta salle de classe et continue à dériver ! »

Après qu’il eut agité la main et cligné des yeux, il découvrit qu’il n’y avait plus personne devant lui.

« … »

Chikus se tut un bon moment avant d’être capable d’avancer vers la salle suivante. En passant sa tête par la porte, il marmonna pour lui-même : « J’espère que la situation dans cette chambre va être plus normale. Ce Grisia est mon futur leader. S’il est trop bizarre, je n’aurai aucune envie de suivre ses ordres. »

« Mon enfant, tu dois absolument aller à la rencontre des créatures des ténèbres sur une base régulière. »

Chikus s’arrêta. Pourquoi mentionne-t-il les créatures des ténèbres ? Immédiatement, il regarda à l’intérieur et vit que Grisia posait une question à son maître, le Chevalier du Soleil le plus fort de l’Histoire, qui a semé la peur dans le cœur de tous les membres du Temple Sacré.

« Maître, est-ce parce que le Chevalier du Soleil a juré de détruire toutes les créatures des ténèbres ? »

Après avoir entendu cela, Chikus trouva que c’était très censé. C’est probablement la raison !

Le Chevalier du Soleil agita son index, un mystérieux sourire présent sur son visage. « Non, non, tu dois aller à leur rencontre aussi souvent que possible pour évacuer tes émotions. »

« Quoi ? » Grisia ainsi que Chikus, qui se tenait de l’autre côté de la porte, affichaient des expressions très similaires, révélant un profond étonnement et du doute.

Le Chevalier du Soleil continua sérieusement : « Réfléchis bien. Tu dois sourire toute la journée, pardonner chaque déchet humain, et louer le Dieu de la Lumière — que tu ne rencontreras probablement jamais dans ta vie — à chaque phrase. Si tu n’as pas un canal dans lequel déverser tes émotions, alors tu risques de finir par faire une dépression et ne plus être capable de mener à bien les devoirs du Chevalier du Soleil correctement. Si tu n’arrives pas à remplir tes devoirs correctement, tu vas perdre ton travail, et après avoir perdu ton travail, tu seras encore plus dépressif. Et à la fin, tu seras tellement déprimé que tu rejoindras le Dieu de la Lumière sur une base volontaire. Maintenant, tu ne veux surement pas connaître une fin aussi tragique, n’est-ce pas ? »

« … Non. »

« Je disais donc, mon enfant, que tu dois aller à la rencontre de créatures des ténèbres pour évacuer tes émotions au moins une fois par mois. Tu as bien saisi ? »

« Et si je n’en trouve pas ? »

« Ne t’inquiète pas, mon enfant. Voilà la carte de visite du nécromancien avec lequel l’Église a un contrat ; non seulement tu peux spécifier le type de créatures des ténèbres que tu veux, tu peux également considérer cela comme des dépenses professionnelles et les faire payer par l’Église. »

« … »

Grisia accepta la carte de visite sans manifester d’émotion. Toutefois, sans doute parce qu’il recevait fréquemment de nombreux chocs, il glissa nonchalamment la carte dans sa poche et leva la tête pour continuer à écouter les instructions de son maître dans les secondes qui suivirent.

Néanmoins, à ce moment-là, le Chevalier du Soleil frappa dans ses mains. « Bon, la leçon d’aujourd’hui est terminée. Je vais donc prendre congé. »

Stupéfait, Grisia s’enquit : « Maître, où allez-vous ? »

« J’ai un rencard avec la princesse… Non, je veux dire, j’ai un rendez-vous avec Son Altesse le prince pour discuter de choses importantes concernant le royaume et promouvoir les bonnes relations entre le palais royal et l’Église… Dans tous les cas, je dois partir tout de suite. Sinon, je vais être en retard. Ce n’est pas digne d’un gentilhomme de faire attendre une dame. »

Donc, Son Altesse le prince est une dame ? Grisia souligna, désemparé : « Mais Maître, c’est encore l’heure des cours en ce moment ! »

À cet instant, le Chevalier du Soleil avait déjà atteint la porte. En entendant les paroles de Grisia, il s’arrêta. Cela permit à Chikus, qui était toujours à l’extérieur, de soupirer de soulagement. Il avait failli manquer de temps pour se cacher. Il saisit donc l’opportunité pour se faufiler vivement derrière les longs rideaux présents dans le couloir.

Le Chevalier du Soleil répondit avec une certaine gêne : « Ah bon ? C’est encore l’heure des cours… C’est un peu problématique. La dernière fois, Judgment m’a dit d’agir plus sérieusement. Très bien ! Je vais te donner une mission dans ce cas. Va immédiatement voir le nécromancien sous contrat pour faire sa connaissance. »

Ayant fini d’annoncer la mission, il se tourna à nouveau pour partir.

Grisia s’exclama anxieusement : « Attendez ! Maître, n’allez-vous pas m’accompagner ? Vous voulez que j’aille rencontrer un nécromancien tout seul ? Vous pourriez au moins venir avec moi la première fois ? »

« Tu as déjà dix-huit ans ! N’agis pas comme un petit enfant gâté. »

Le corps du Chevalier du Soleil était déjà à moitié sorti de la salle, mais l’homme révéla tout de même une vague conscience de sa fonction en tant que maître. Il tourna la tête pour prévenir Grisia : « N’oublie pas ! N’attaque jamais le nécromancien ! Si tu ne l’attaques pas, il ne t’arrivera probablement rien. C’est tout ! Dépêche-toi ! »

Cela dit, il s’en fut, laissant Grisia derrière. Grisia se sentit plutôt lésé, tandis qu’il fixait la porte ouverte du regard, et dit sans s’adresser à quelqu’un en particulier : « Maître, j’ai seulement quinze ans… »

Évidemment, il n’y avait personne autour de lui pour lui répondre. Il soupira de résignation et sortit la carte d’affaires. Même si son maître avait donné l’impression qu’il cherchait une excuse quand il lui avait donné cette tâche, si Grisia considérait vraiment celle-ci comme une blague et qu’il ne la complétait pas sérieusement, son maître se transformerait à nouveau en Chevalier du Soleil le plus fort de toute l’Histoire.

« Tu vas vraiment partir à la recherche du nécromancien ? »

Grisia resta stupéfait. Quand il leva la tête, il reconnut immédiatement la personne devant lui. Après être resté un instant ébahi, il lâcha : « Apprenti-Chevalier de Flamme ? Pourquoi n’es-tu pas en classe… Oublie ça, fais comme si je ne t’avais pas posé la question. »

Après avoir parlé, il se souvint subitement qu’il était lui aussi l’un des membres qui n’avaient pas besoin de participer à ses leçons, et sa raison était que son « maître avait raté une leçon pour entretenir une liaison amoureuse avec la princesse ». Il ne pouvait pas énoncer cette raison à voix haute, alors peut-être que la raison de l’autre personne était également du genre à ne pouvoir être dite à haute voix.

Chikus cria : « Réponds-moi ! Tu vas vraiment partir à la recherche de ce nécromancien ? »

« Évidemment. » Grisia haussa les épaules et ajouta : « Mon maître m’a dit d’y aller, alors je dois y aller ! »

En entendant cela, Chikus fut lui aussi stupéfait, incapable de comprendre pourquoi le Chevalier du Soleil avait donné ce genre d’ordre. Toutefois, peu importe à quel point il essayait fort d’y penser, il n’y arrivait pas, alors il décida de cesser d’essayer de comprendre. Au lieu de cela, il avertit Grisia : « Les pires ennemis de l’Église du Dieu de la Lumière sont les créatures des ténèbres ; les nécromanciens sont ceux qui contrôlent les créatures des ténèbres. Tu dois déjà savoir ça, non ? »

Évidemment qu’il le savait. Grisia se frotta le visage et murmura : « Mais, mon maître m’a donné l’ordre… »

« Dans ce cas… il devait être en train de te tester ! » Chikus songea enfin à une raison, et hurla : « Peut-être qu’il essaye de te tester pour voir si tu irais réellement retrouver le nécromancien, trahissant ainsi les enseignements de l’Église ! »

Grisia ne pensait pas du tout que c’était le cas. Il comprenait trop bien son maître. Dans les classements de ce que Neo détestait le plus, « lui désobéir » se trouvait assurément dans le top trois. Même s’il trahissait les enseignements de l’Église, il s’en sortirait bien mieux que s’il défiait les ordres de Neo.

« Quoi qu’il arrive, je dois y aller. Au revoir, il se fait tard. Je pense que je devrais y partir tout de suite. » Grisia était un peu inquiet. Il était presque déjà le soir, et il voulait visiter le nécromancien pendant que le soleil était toujours levé.

« Tu… » Les yeux de Chikus étaient grands ouverts. Il dégaina son épée longue qui pendait à sa taille et cria : « Arrête-toi ! Je ne te laisserai jamais partir à la recherche d’un nécromancien ! »

Voyant que Chikus avait dégainé son épée, Grisia était réellement intimidé et, pendant un instant, il ne sut pas comment réagir… Après y avoir réfléchi un peu, il conclut que, puisque Chikus savait déjà qu’il s’en allait à la rencontre d’un nécromancien, dans ce cas cela ne devrait avoir aucune importance si Chikus découvrait également qu’il savait utiliser la magie, n’est-ce pas ?

S’il était exposé plus tard, tout ce qu’il aurait à faire serait de le nier jusqu’à la fin.

« Mur de Glace. »

Surpris, Chikus se retrouva bloqué par quatre hauts murs de glace qui atteignaient presque le plafond.

Depuis l’extérieur des murs de glace provint la voix de Grisia : « Après que je serai parti, les murs de glace vont disparaître. À ce moment-là, tu pourras sortir. »

Chikus était enragé au point d’exploser. Il leva son épée et frappa sauvagement les murs de glace, mais la glace était incroyablement solide. Il ne pourrait pas briser les murs en un si court laps de temps. Il gronda et beugla : « Sale enfoiré ! Laisse-moi sortir. Je t’interdis de partir à la recherche du nécromancien. Je te préviens, je vais le dire à mon maître ! »

La voix de Grisia dériva sans hâte vers lui. « Va lui dire. Tu peux aussi lui mentionner au passage que c’était un ordre du Chevalier du Soleil. »

« Grisia ! »  Les hurlements de Chikus se firent entendre derrière les murs de glace. « Je ne vais pas reconnaître quelqu’un comme toi en tant que Chevalier du Soleil, tu m’entends ? Sale traître ! »

Les pas de Grisia ralentirent un peu avant de se poursuivre et de s’éloigner.

 

 

Rageusement, Chikus alla sur-le-champ retrouver son maître et lui relata tout. Inopinément, la réponse qu’il reçut ne fut pas du tout ce à quoi il s’imaginait.

« Si c’est un ordre de Neo, alors on ne peut rien y faire. »

Le Chevalier de Flamme dit cela avec embarras. Une fois qu’il aperçut l’expression de stupeur de son apprenti, il soupira et lui donna un avertissement : « Ne va pas provoquer Neo. Il a un mauvais tempérament et il n’a pas peur de ton maître. Seuls Judgment et le Pape peuvent lui tenir tête quand ils travaillent ensemble. Autrement, il n’y aurait vraiment personne dans ce monde qui pourrait le garder sous contrôle. »

« Mais, Grisia est parti à la rencontre d’un nécromancien ! » Chikus déclara avec indignation : « Je ne vais pas reconnaître ce genre de personne comme Chevalier du Soleil ! Je vais démasquer sa véritable nature ! »

Après avoir dit cela, il se retourna et s’en alla avec colère.

« Sa vraie nature ? Alors, tu vas devoir démasquer beaucoup de personnes… »

Le Chevalier de Flamme observa son apprenti partir et se murmura à lui-même : « Même en excluant Neo, parmi les Douze Chevaliers Sacrés, lesquels correspondent véritablement à leurs homologues des légendes ? »

Mais, il se rappela tout de suite que son propre apprenti était vraiment comme le Chevalier de Flamme des légendes.

« Avec toi dans le coin, au moins il y a une personne qui n’aura pas besoin d’être hypocrite parmi la prochaine génération de chevaliers. »

Pensant de cette façon, il sentit qu’il était en fait chanceux de ne pas avoir besoin d’être comme les autres qui devaient entraîner leurs apprentis à devenir des personnes hypocrites. Cela le mit de meilleure humeur.

 

 

Furieux, Chikus se fonça dans les rues, courant et errant sans but pendant un bon moment avant de découvrir qu’il n’avait pas de destination en tête. Tout d’un coup, il ne savait pas où il devrait aller. Cependant, parce qu’il était encore en colère contre son maître, il ne pouvait pas rentrer au Temple Sacré. Ainsi, il ne put qu’errer sans but dans les rues.

Après avoir erré encore et encore, il remarqua subitement une silhouette familière… Grisia ?

Chikus était un peu perplexe. Cela ne faisait-il pas un bon bout de temps depuis que Grisia avait affirmé qu’il allait retrouver le nécromancien ? Pourquoi était-il toujours en train d’errer dans les rues ?

Ses soupçons ravivés, il jeta un coup d’œil aux sucettes tenues dans les mains de Grisia, se sentant en quelque sorte sans voix sur le moment… Il est d’abord allé acheter des bonbons ?

Voyant que Grisia était sur le point de s’en aller, Chikus le suivit sans la moindre hésitation.

Grisia continua à marcher jusqu’à ce qu’il atteigne le ghetto. C’était une zone que Chikus n’avait jamais visitée auparavant. Apercevoir les environs sales et en ruines l’étonna énormément. Les odeurs déplaisantes lui firent froncer les sourcils. Il n’arrivait vraiment pas à croire que ce quartier faisait également partie de la Cité du Bourgeon.

Bientôt, Grisia se pencha et pénétra dans une petite maison en bois, qui donnait l’impression d’être sur le point de s’écrouler.

Se pourrait-il que ce soit la résidence du nécromancien ? Juste au moment où il considérait la question de savoir s’il devrait prendre l’endroit d’assaut, Grisia sortit et agitait même la main pour dire au revoir à quelqu’un à l’intérieur de la maison. « Dans ce cas, je vais m’en aller à présent. Je reviendrai te voir la prochaine fois… D’accord, d’accord ! J’apporterai des sucettes à la fraise dès le début la prochaine fois. Je n’ai pas envie de devoir répéter ce qu’il s’est produit aujourd’hui, et devoir retourner en acheter. À la prochaine. »

La prochaine fois ? Les yeux de Chikus s’écarquillèrent. Ce type a l’intention de retourner visiter le nécromancien ?

Voyant que Grisia retraçait son chemin d’origine pour partir, Chikus hésita un peu, mais ne le suivit pas. Il dégaina son épée. Pas-à-pas, il s’approcha de la maison délabrée.

Une fois qu’il fut devant l’entrée de la maison, Chikus ouvrit la porte d’un coup de pied donné de toutes ses forces et hurla bruyamment à l’intérieur : « Sors de ta cachette, nécromancien ! »

À l’intérieur de la maison, il y avait de la poussière et des toiles d’araignées partout. S’il n’avait pas été certain que Grisia était entré dans cet endroit il y a à peine quelques instants, même Chikus n’aurait eu aucun doute sur le fait que personne n’habitait un lieu tel que celui-ci.

Avec des pas furieux, il écrasa la demeure de ses pieds, coupant unilatéralement le centre de la table couverte de poussière, l’envoyant valser sur le côté. Il cria : « Cesse de faire semblant ! Je sais que tu es là, nécromancien. Sors de ta cachette ! J’ai vu Grisia te parler ! »

« Petit, je ne me rappelle point t’avoir invité. »

Une voix féminine résonna tout à coup. Le cœur de Chikus manqua un battement. Pourtant, il ne parvenait pas à figurer d’où provenait la voix, et il ne voyait personne non plus.

« Grisia t’a-t-il dit de venir ? »

Chikus s’exclama : « Ça n’a rien à voir avec cet enfoiré ! Je suis là pour te régler ton compte ! »

« Cet enfoiré… Est-ce là comment tu t’adresses au futur Chevalier du Soleil ? Est-ce vraiment la bonne conduite à suivre, Apprenti-Chevalier de Flamme ? »

La propriétaire de la voix semblait avoir deviné l’identité de Chikus par son habillement.

« Je ne vais pas accepter cet enfoiré comme étant le Chevalier du Soleil ! » Chikus s’écria : « Il est en contact avec des ordures diaboliques dans ton genre. Il n’est pas qualifié pour être le Chevalier du Soleil ! »

« Des ordures diaboliques ? Tu dis que Grisia est… que ce petit bonhomme est diabolique ? Hahaha, héhéhé ! »

« Pourquoi est-ce que tu ris ! » Chikus hurla avec force : « Il a des connexions avec une nécromancienne comme toi. S’il n’est pas diabolique, alors qu’est-ce qu’il est au juste ? »

« Oh ? Ta définition de ce qui est diabolique est beaucoup trop simple ! Mais… » La voix changea soudainement de joyeuse à sévère : « Le savais-tu ? Ce sont les gens comme toi que je méprise le plus, ceux qui se croient des défenseurs de la justice, Apprenti-Chevalier de Flamme. »

Le sol se mit brusquement à trembler. Chikus s’empressa de réciter une incantation, émettant de la lumière sacrée par les mains. Toutefois, cette lumière sacrée était seulement suffisante pour disperser une partie de l’illusion dans la maison. Ce n’était pas assez pour lui laisser voir la vraie situation à l’intérieur de la demeure.

Bien qu’il ne pût pas voir clairement la scène qui se déroulait à l’intérieur, il voyait bel et bien la silhouette d’une petite fille. La fillette tenait même une sucette dans sa main, et marchait lentement dans sa direction. Même s’il devinait en quelque sorte que cette petite fille était la nécromancienne, il ne pouvait pas se résigner à abattre son épée sur celle-ci.

La fillette marcha jusque devant lui et déclara : « Si tu détestes Grisia à ce point, dans ce cas je n’ai pas besoin de me montrer prévenante à son égard et à celui de Neo et te laisser partir. En fait, héhé… si je te tue, il se pourrait même qu’il me remercie ! »

« Quel ramassis de conneries est-ce que tu… »

Avant qu’il ne fût parvenu à terminer, une silhouette plongea soudainement sur lui. Malgré le fait que l’épée de Chikus fût dégainée, ce dernier était incapable de réagir dans sa panique. Il ne put que lever sa lame devant sa poitrine pour parer les attaques de son adversaire.

Il fut forcé de reculer de quelques pas. Quand il leva la tête pour regarder, il découvrit que la personne qui l’avait attaqué avait un visage couleur de cendre, des yeux complètement sans âme, et même quelques zones sur son corps qui donnaient l’impression qu’il avait été rapiécé par endroits. Il n’avait pas du tout l’air d’un être vivant… c’était une créature des ténèbres !

C’était une créature des ténèbres portant un tablier et tenant un balai.

Chikus se rendit tout à coup compte que l’arme dont la créature morte-vivante se servait pour l’attaquer était en vérité un balai… Il songea immédiatement que c’était un peu ridicule ; une petite fille qui était nécromancienne, plus un mort-vivant qui portait un tablier… Pourquoi était-ce si différent de l’image du nécromancien diabolique et de la créature des ténèbres qu’on lui avait enseigné par le passé ?

Mais, même si ce n’était qu’un balai, une fois brandi par une créature monstrueuse et balancé dans sa direction, Chikus ne pouvait pas se permettre d’être imprudent. Il n’avait pas oublié qu’il venait d’être obligé de reculer de plusieurs pas à cause de ce balai.

Prêt mentalement, Chikus ne fut plus acculé par le mort-vivant. Au lieu de cela, il lui tint tête comme il échangeait des coups avec son adversaire. Une fois qu’il commença à relâcher de la lumière sacrée pour l’aider, il prit même le dessus. Bientôt, battre la créature des ténèbres se tenant devant lui ne serait plus qu’une question de temps.

« Ta force n’est pas mal ! Cette créature des ténèbres était un épéiste expert quand il était encore vivant ! » La petite fille rit, tandis qu’elle disait : « Mais… je ne peux pas te laisser le tuer. Si tu le tues, dans ce cas je n’aurai plus personne pour faire mon ménage à ma place ! »

À ce moment-là, le plancher se mit à trembler si violemment que Chikus ne pouvait presque pas tenir debout. Heureusement, la créature des abysses ne l’attaqua pas pendant ce temps. Cependant, tout d’un coup, il sentit le plancher céder sous ses pieds. Avant qu’il n’eût eu le temps de se débattre, il s’effondrait déjà, tombant dans des ténèbres pures, seulement capable d’entendre la voix mélodieuse et pourtant sans merci de la fillette…

« Apprenti-Chevalier de Flamme, une fois que tu découvriras que tu es mort et que tu t’es transformé en une diabolique créature des ténèbres, je me demande quel genre d’expression tu révéleras ! »

 

 

Merde ! Merde ! Foutue nécromancienne ! Foutu Grisia !

Après être tombé dans les ténèbres, il avait compris qu’il avait été emprisonné quelque part, et risquait d’être transformé en créature morte-vivante d’ici peu par la nécromancienne. Pourtant, il n’arrivait toujours pas à trouver de moyens pour s’enfuir. Il ignorait depuis combien de temps il luttait ou combien de fois il avait maudit haut et fort la nécromancienne. Juste au moment où il songeait qu’il allait réellement mourir dans ce lieu maudit… une personne qui rayonnait de lumière fit pénétrer une lueur éblouissante dans le sous-sol et tendit une main vers lui.

« Je t’ai trouvé ! »

Chikus fixa la personne qui venait d’arriver. Une fois qu’il eut reconnu son visage, il prononça son nom : « Grisia ? »

Bien que la personne qui venait d’arriver fût quelqu’un qu’il ne voulait absolument pas voir, après avoir été emprisonné dans le noir pendant aussi longtemps, tant qu’il pouvait voir quelqu’un… qui était cette personne importait peu !

En entendant Chikus parler, Grisia poussa un soupir de soulagement : « Dieu de la Lumière, merci ! Tu vas bien. Vite, sors de là ! »

Grisia avait la main tendue ; néanmoins, quelques gouttes de liquide dégoulinaient du bout de ses doigts. Chikus leva la main pour les attraper, avant de s’apercevoir que le liquide en question était du sang frais. Pris au dépourvu, il s’écria : « Du sang ! »

Avec nonchalance, Grisia répondit : « Oh, je me suis juste battu avec la créature des ténèbres qui gardait la porte. »

Chikus leva la tête pour examiner attentivement Grisia et finalement découvrir qu’il avait le visage couvert de coupures. Il semblerait que la situation ne fût pas aussi simple que Grisia l’affirmait. Incapable de s’en empêcher, Chikus demanda : « Pourquoi es-tu venu me sauver ? »

« Qu’est-ce que tu racontes ? » Le questionna Grisia, surpris. « Tu es l’Apprenti-Chevalier de Flamme, l’un des futurs Douze Chevaliers du Soleil. Qui devrais-je sauver, si ce n’est toi ? »

Ah, c’est comme ça qu’il voit les choses ? Chikus tendit le bras et saisit la main devant lui, mobilisant une force suffisante pour sauter hors de la cave.

« Grisia ! Qu’est-ce que tu as fait à mon corps de ménage ? »

Ils sursautèrent tous les deux avec surprise. Chikus regarda dans toutes les directions, ses yeux jaillissant presque de leurs orbites. Les murs s-sont roses, et le sol est aussi rose, et la nappe sur la table de bois est aussi rose, et il y a même un coussin en forme de gâteau sur le lit rose ! Ça ressemble franchement à la chambre d’une petite fille…

Sur la chaise longue, qui n’était pas très loin de l’endroit où ils se tenaient, était allongée une petite fille. Ses traits étaient délicats et plutôt mignons, bien que sa peau fût également rose, une couleur de peau qui n’était pas du tout naturelle chez les humains. Si vous la contempliez trop longtemps, vous auriez la chair de poule sans même le remarquer !

La mâchoire de Chikus faillit lui tomber. La maison d’une nécromancienne, la nécromancienne elle-même… ça ressemble vraiment à ça ?

« Il y a un problème, Rose ? Ton corps de ménage me brutalisait, donc je me devais de riposter ! » répondit Grisia avec innocence.

« Il te brutalisait ? » Railla Rose. « Je pense que la vérité doit être l’exact opposé, non ? De toute évidence, tu as utilisé ta lumière sacrée pour l’attaquer sans hésiter, alors il n’a pas eu d’autres choix que de se défendre. Arrête de mentir comme un arracheur de dents, Grisia. J’ai vu tout ce qu’il s’est passé. »

« Si tu as vu tout ce qu’il s’est passé, pourquoi n’es-tu pas venue à ma rescousse ? Je me suis quasiment fait massacrer », la gronda Grisia.

« Comment oses-tu continuer à me parler ainsi ? C’était mon plus beau corps de ménage. Maintenant, il est retourné à la poussière, parce que tu l’as bombardé de ta lumière sacrée. Comment comptes-tu me rembourser… Ah ! Je sais, il y en a un encore plus beau et plus frais ici ! »

Les yeux de Rose se dirigèrent vers Chikus et un sourire malicieux s’épanouit sur son visage ; toutefois, une fois associé à la signification de ses paroles, son sourire ne pouvait que lui donner la chair de poule.

Grisia sourit largement dans l’instant suivant, et répondit à la chose « non humaine » qui était assise sur la chaise longue : « Rose, l’Apprenti-Chevalier de Flamme ne voulait vraiment, vraiment pas dire ça ! Il ne reviendra jamais pour essayer de te dénoncer. Même s’il le faisait, ce serait un geste inutile. Tu es la nécromancienne spécialement employée par l’Église, après tout ! Tu ne veux pas réellement t’opposer à l’Église, n’est-ce pas ? »

Quel discours ! Pour jouer à la fois le bon et le méchant. Le prochain Chevalier du Soleil est tellement amusant. Les jours à ses côtés pourraient ne pas être trop ennuyeux après tout. Rose sourit secrètement, mais en surface elle révéla une expression mécontente en répondant : « Ne mentionne pas l’Église pour me restreindre ! Je ne la crains pas. Si j’avais peur, vivrais-je encore ici ? Réfléchis à cela, Grisia. Pourquoi l’Église tolère-t-elle ma présence ici ? »

Grisia répondit franchement : « Parce que l’Église ne veut pas t’affronter directement… »

Entendant cela, l’expression de Chikus s’aigrit. Se pourrait-il que le Dieu de la Lumière à qui il avait juré sa loyauté et que l’Église du Dieu de la Lumière qu’il allait servir pendant trente ans craignent une simple nécromancienne ? Une flamme brulante de colère s’alluma dans son cœur. Ce genre de Dieu, ce genre d’Église, il n’y a rien de mal à l’abandonner !

« Mais, ça ne veut pas dire que l’Église a peur de toi ! »

Grisia se mit soudainement à crier : « C’est la capitale. Il y a ici beaucoup de citoyens. T’affronter directement causerait beaucoup de dommages collatéraux. Tu ne te préoccupes pas des citoyens ordinaires, mais l’Église ne peut pas se permettre d’être aussi négligente ! Tant que tu ne blesseras personne, l’Église tolèrera que tu vives ici. En revanche, ne va pas t’imaginer que tu peux faire tout ce dont tu as envie. Si tu as l’audace de commettre un crime haineux, l’Église du Dieu de la Lumière ne te laissera jamais t’en tirer comme ça ! Moi, Grisia, le prochain Chevalier du Soleil, j’en fais le serment ! »

L’air hagard, Chikus fixa Grisia, dont chacun des mots l’avait profondément stupéfié. Il n’avait jamais songé que l’Église pût avoir ce genre de notion… C’était donc uniquement pour ne pas blesser d’innocents ?

Après avoir entendu ces paroles, Rose se contenta de glousser et de répliquer cavalièrement : « C’est seulement l’Apprenti-Chevalier de Flamme. Ce n’est pas comme s’il s’agissait de l’un des Douze Chevaliers Sacrés en titre. L’Église pourrait ne pas réagir de manière inconsidérée, puisqu’ils ont déjà un chevalier de rechange en cas de problème. Grisia, il est extrêmement désobéissant. Pourquoi ne pas le remplacer par un autre ? Tu sais, je suis en train de t’aider en fait ! »

« Le remplacer ! Comment pourrais-je remplacer mon frère ? »

Après avoir hurlé ceci, Grisia articula en détachant chacun des mots les uns après les autres : « Si tu oses tuer mon Chevalier de Flamme, tu devras me tuer aussi, ou sinon je viendrai définitivement te détruire pour le venger ! »

Un garçon d’à peine quinze ans qui n’a évidemment pas la capacité de me blesser est réellement en train de discuter de me tuer ou pas ? C’était censé être très drôle, mais elle ne savait pas pourquoi elle avait d’un coup l’impression que…

Si je le tuais vraiment avec l’autre, il deviendrait probablement un Chevalier de la Mort, se relevant de la tombe pour venger son futur Chevalier de Flamme, n’est-ce pas ? Il est vraiment divertissant.

Rose leva la tête pour contempler Grisia. Elle était vraiment intriguée par le genre de Chevalier du Soleil que l’actuel Apprenti-Chevalier du Soleil deviendrait dans le futur.

Ses lèvres s’arquèrent en un fin sourire, la fillette ayant pris une décision dans son cœur.

 

 

Deux adolescents qui n’étaient ni des adultes ni des enfants marchaient vers le soleil couchant. Les cheveux de l’un des garçons étaient rouges comme les flammes, tandis que ceux de l’autre étaient aussi étincelants que le soleil.

« Grisia. » Chikus se figea et tourna la tête pour dire : « Merci d’être venu me secourir aujourd’hui. »

Grisia, qui était en train de lécher une sucette à la myrtille, baissa sa sucette, embarrassé, quand il aperçut l’expression très sérieuse de Chikus. Il répondit, tout aussi sincère : « Ce n’est rien ! Tu avais disparu depuis trois jours. Nous étions tous inquiets à ton sujet. Tout le monde te cherchait, particulièrement ton maître. Je crois qu’il n’a pas dormi pendant ces trois jours ! C’est par hasard que je suis tombé sur toi. En plus, Rose voulait seulement dix sucettes à la fraise et un beau cadavre en échange de te laisser partir. Donc, je n’ai pas fait grand-chose ! »

En entendant cela, Chikus examina Grisia, dont le visage était toujours couvert de coupures. Ces blessures avaient déjà été traitées par un sort de Soin Modéré, pourtant elles n’avaient pas entièrement disparu. De toute évidence, ces blessures étaient sérieuses.

Comment ce type, dont les compétences à l’épée sont réputées pour être complètement nulles, a-t-il vaincu cette créature des ténèbres ?

Chikus se tut pendant un bon moment. À l’instant où un Grisia confus était sur le point de l’interroger sur son regard fixe, Chikus se décida enfin à parler.

Détachant soigneusement chacun de ses mots, il dit : « Grisia, tu es mon Chevalier du Soleil, mon frère, le genre qui ne peut pas être remplacé non plus. »

Intrigué et perplexe, Grisia le regarda et déclara, comme une évidence : « Évidemment ! Sinon, que pourrais-je être d’autre ? »

Entendant sa réponse, Chikus éclata de rire.

« Rentrons, à présent ! » Lui rappela Grisia. « Ton maître paraissait très inquiet ! »

« D’accord. »

Ils s’éloignèrent de plus en plus. Seule leur conversation avançait lentement à la dérive.

« Est-ce que tu veux une sucette ? J’en ai à la myrtille, à la fraise et au chocolat. Quelle saveur préfères-tu ? »

« Qu’est-ce que tu racontes ? Je suis l’Apprenti-Chevalier de Flamme ! Je suis censé me gorger de viande et engloutir du vin. Pourquoi est-ce que je voudrais d’une sucette ? »

« Tu n’en veux pas ? Dans ce cas, Ecilan va être très triste. Il les a faites lui-même ! Fabriquer des confiseries est son passe-temps. Il m’a dit que son père était un célèbre pâtissier dans la cité ! »

« Les Chevaliers Sacrés de la faction du Chevalier du Jugement ne sont-ils pas censés être tes ennemis jurés ? »

« Ah ! C’est vrai, mais Lesus est une très bonne personne ! Il me défend contre ceux qui m’attaquent, m’achète des tartes à la myrtille, et se bat même contre les chiens qui me mordent ! »

« … »

« Donne m’en une au chocolat. »

Note de bas de page

1 grande sœur : En chinois, c’est « petite grande sœur ». Les Chinois ont des termes différents en fonction de si la sœur en question est plus âgée ou plus jeune que soi. La guérisseuse est ravie d’être appelée « petite grande sœur », ce qui met en avant à sa jeunesse.

La Légende du Chevalier du Soleil Histoire Parallèle # 1 : Pour vous tous

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La Légende du Chevalier du Soleil : Histoires Parallèles

Roman d’origine en chinois par : 御 我 Yu Wo 


Side Story #1: For You All – traduit du chinois vers l’anglais par Lucathia[PR!]
Histoire parallèle #1 : Pour vous tous – traduit de l’anglais vers le français par Irina
+ Travail de vérification par Yukomin

« Sun. »

Neo s’arrêta dans ses pas et se retourna élégamment, en s’exclamant : « Ah ! Mais, ne serait-ce pas notre grand et très respectable Pape ? »

En entendant cela, le Pape se figea dans son mouvement et regarda avec précaution le Chevalier du Soleil, qui souriait encore plus radieusement que d’habitude. Avec un peu de suspicion, il demanda : « Sun, t’ai-je énervé récemment ? »

« Ho, ho, comment le grand Pape peut-il avoir fait quelque chose qui ait pu énerver Sun ? C’est juste que je m’interroge sur qui a bien pu raconter à mes frères Chevaliers Sacrés que j’utilise la magie afin de maintenir mon apparence au début de la vingtaine ? »

« …Oh ? » Le Pape eut un sourire doux, et afficha une expression pleine de doute, en disant : « Y a-t-il réellement quelqu’un affirmant cela ? Quelle personne ignorante ! Il ne sait pas que le Chevalier du Soleil est naturellement magnifique. Même s’il atteint 30 ans cette année, il n’a pas changé depuis qu’il est devenu le Chevalier du Soleil.

– Pape, tu es également toujours aussi jeune et “mignon” !

– Ha ha ha. » Les deux se regardèrent et rirent de bon cœur.

Le visage de Neo s’assombrit, et il dégaina l’Épée Divine du Soleil. Farouchement, il dit : « La prochaine fois que tu oses aborder le sujet de mon âge, je vais te tuer. »

« Qui ne sait pas que le Chevalier du Soleil va avoir trente ans cette année ? » Le Pape était tellement furieux qu’il en tremblait. Il pointa vers Neo le sceptre qu’il avait en main. « Tu n’es pas autorisé à dire que je suis mignon encore une fois, ou je vais tout mettre en œuvre pour me débarrasser de toi, même si je dois y laisser la vie. »

Alors que les deux se menaçaient mutuellement, un bruit de pas soudain se fit entendre.

Quelqu’un vient ! Neo et le Pape rangèrent leurs armes immédiatement et adoptèrent respectivement un sourire élégant et une expression solennelle. Avec une expression curieuse, le Pape demanda : « Chevalier du Soleil, il y encore dix candidats pour la sélection du Chevalier du Soleil de cette année. As-tu déjà pris une décision ? »

Neo marmonna : « Cette année, il y a beaucoup de personnes douées, mais si je devais vraiment en sélectionner une, je pense que j’ai encore besoin d’y réfléchir… »

« Tous les deux, arrêtez de jouer la comédie. Ce n’est que moi. »

La personne qui venait d’apparaître était habillée entièrement en noir, et même ses yeux et ses cheveux étaient noirs. Il avait de profonds creux entre les sourcils et paraissait être une personne ordinairement solennelle. Néanmoins, en ce moment, il y avait un sourire impuissant sur son visage. Il avança jusqu’aux deux personnes et s’adressa à Neo qui avait effacé son sourire.

« Sun, il y a beaucoup de personnes talentueuses parmi tes candidats, mais le nombre de mes candidats est restreint. Tous sont des individus pourris jusqu’à la moelle, déshonorés et malintentionnés. J’ai peur que si je ne choisis pas le seul bon petit parmi eux, Lesus, la première personne que le Dieu de la Lumière jugera sera moi. »

« Lesus ? » Neo révéla une expression perplexe.

Le Pape roula ses yeux vers lui, mécontent, et expliqua : « La dernière fois, quand tu es venu assister à l’entraînement des candidats pour le Chevalier du Jugement, c’était celui dont les compétences à l’épée était les meilleures. »

« Oh, cet enfant ! » Neo acquiesça d’un signe de tête.

« Neo ! Tu ne peux donc pas te rappeler d’autres choses que les compétences à l’épée ? » déclara Judgment d’un air impuissant. Voyant l’expression indifférente de Neo, il put seulement soupirer et demander ce qu’il voulait vraiment savoir : « Tu as pas mal de personnes douées. Qui vas-tu choisir ? Roland ? Arthur ? Angus ? »

Ce n’était pas seulement Judgment qui montrait de la curiosité, mais également le Pape qui commençait à regarder Neo fixement. Néanmoins, Neo leur rendit simplement leurs regards, sans expression.

Judgment, sentant que quelque chose clochait, s’enquit : « Ne me dis pas que tu n’arrives même pas à te rappeler du nom d’un seul candidat… »

Neo haussa les épaules et répliqua : « Je me rappelle de Roland. Il est doué à l’épée. »

« Tu es vraiment… »

Neo ajouta, avec une réalisation soudaine : « Oh, oui, et Grisia. »

« Grisia ? » demanda Judgment, plein de doutes.

« L’enfant qui est très bon avec la magie sainte ? » cria immédiatement le Pape. « Pas question ! Je veux le faire entrer dans le Sanctuaire ; tu n’es pas autorisé à le choisir ! »

Un peu surpris, Judgment questionna Neo : « Te rappelles-tu de Grisia, parce qu’il est doué pour utiliser la magie sainte ? »

« Non, c’est parce que… » continua Neo en fronçant les sourcils. « Ses capacités à l’épée sont tellement catastrophiques que c’est difficile pour moi de les oublier, même si je le voulais ! »

Le Pape sourit immédiatement. « Si c’est le cas, tu ferais mieux de ne pas le choisir. Sa magie sainte est tellement bonne que je me suis rappelé de lui au premier coup d’œil. C’est un guérisseur ! Définitivement pas un chevalier ! »

L’un ne regarde que les compétences à l’épée, et l’autre ne regarde que la magie sainte. Il n’y a pas vraiment de différences entre vous deux. En lui-même, Judgment eut un sourire ironique.

« S’il en est ainsi, as-tu l’intention de choisir Roland ? »

Judgment hocha la tête, approuvant : « Je me souviens aussi de lui, ses compétences à l’épée sont plutôt décentes, et il semble être un enfant droit. »

« Alors, tu vas choisir Roland ? »

Neo y réfléchit, et il ne lui paraissait rien de vraiment problématique avec ce choix. Mais, encore, à part avoir de bonnes ou de mauvaises capacités à l’épée, il ne pouvait pas vraiment faire la différence entre les enfants. Néanmoins, le Chevalier du Soleil doit-il réellement être jugé sur la base de ses capacités à l’épée ?

Voyant l’hésitation de Neo, Judgment le questionna, perplexe : « Tu sens qu’il n’est pas approprié ? »

« Non », répondit Neo en fronçant les sourcils. « J’ai juste besoin d’y repenser un peu plus. »

 

 

« Pourquoi veux-tu devenir le Chevalier du Soleil ? »

Pour éviter d’avoir la tentation de choisir un enfant en se basant uniquement sur leurs compétences à l’épée, Neo commença à poser des questions à chaque candidat en privé.

Pour la justice.

C’était la réponse la plus commune. Neo souriait et demandait en retour : « Qu’est-ce que la justice ? »

Quand ils entendaient cette question, les enfants hésitaient.

Neo ridiculisait secrètement la réponse dans son cœur. Pour la justice ? Comment un enfant de 12 ans peut-il comprendre le sens du mot justice ? Plus probablement, c’était la réponse donnée par l’éducation des chevaliers ignorants.

« Pourquoi veux-tu devenir le Chevalier du Soleil ? »

Neo considéra le garçon aux cheveux bruns devant lui, et il espéra vraiment que la réponse de cet enfant serait différente ; parce que cet enfant était Roland. Étant l’enfant avec les meilleures compétences à l’épée, il était inévitablement digne. Son regard était extrêmement déterminé, et on pouvait dire que c’était un regard qui avait été entraîné à travers de longues périodes de difficultés.

« Je veux discipliner tous les malfaiteurs. » Les yeux de l’enfant révélaient du ressentiment.

Neo fut stupéfait pendant un moment et commença à rire amèrement intérieurement. Cette réponse en est une que Judgment voudrait entendre… Pourquoi suis-je celui qui l’entend ?

Il réfléchit un peu et lui demanda : « Dans ce cas, pour quelle cause es-tu prêt à sacrifier ta vie ? »

Tous les mots de Roland résonnèrent alors qu’il dit : « Afin de discipliner tous les malfaiteurs, je serais prêt à faire tout ce qu’il faudra, même si cela signifie que je dois sacrifier ma vie ! »

Petit, tu t’es vraiment trompé. Tu aurais dû aller rivaliser avec Lesus et donner à Judgment un peu plus d’options. Neo put seulement continuer de se forcer à sourire.

 

 

« Hé, as-tu décidé qui prendre ? »

Neo se retourna pour faire face à Judgment qui s’approchait de lui à courtes enjambées. « Je ne suis pas sûr », répondit-il, un peu perdu.

« La sélection a lieu demain, et tu n’es toujours pas sûr ? » s’étonna Judgment, surpris.

Neo resta silencieux un moment, et s’enquit en retour : « Judgment, as-tu demandé à ton jeune Chevalier du Jugement pourquoi il souhaitait devenir le Chevalier du Jugement ? »

Judgment hocha la tête. « Évidemment. La réputation du Chevalier du Jugement n’a jamais été très bonne, et à chaque génération on peut compter sur les doigts d’une main les candidats valables. Mais, Lesus est doué à l’épée, et sa conduite morale est bonne également. Quoi qu’il fasse, il promet de grandes perspectives, donc j’étais aussi curieux de savoir pourquoi il voulait devenir le Chevalier du Jugement. »

« Attends une minute. » En entendant cela, Neo devint encore plus curieux à propos d’autres sujets et ne put s’empêcher de le questionner : « Puisque tu dis ça, pourquoi es-tu devenu le Chevalier du Jugement en premier lieu ? »

Judgment rit. « Tu me connais depuis près de vingt ans déjà, et tu me poses la question seulement maintenant ? Ce n’est pas un peu trop tard pour ça ? Et, si on faisait un échange avec nos réponses ? Pourquoi voulais-tu devenir le Chevalier du Soleil ? »

« Je… » Neo eut l’air absent quand il répondit : « J’ai oublié. »

« Ça te ressemble bien… »

« J’ai vraiment oublié ! Et, je n’ai pas vraiment besoin de raison, n’est-ce pas ? » affirma Neo, avec impatience. « Quel enfant de douze ans ne veut pas devenir le Chevalier du Soleil ? »

« C’est vrai. Le Chevalier du Soleil est glorieux et impressionnant, différent du Chevalier du Jugement qui est rejeté où qu’il aille. »

L’entendant proférer cela, Neo resta silencieux un moment. En fin de compte, il lui demanda : « Le regrettes-tu ? »

« Non ! Je ne le regretterai jamais. »

Judgment se retourna et fixa Sun directement, tandis qu’il expliquait : « Mon père était un ivrogne. S’il n’y avait que la boisson, ça n’aurait pas été important. Mais, quand il était ivre, il voulait frapper quelqu’un. D’abord, il a battu ma mère à mort, l’a poussée dans une rivière et a ensuite clamé qu’elle s’était noyée. Quand bien même j’avais tout vu du début à la fin, j’avais seulement huit ans et personne ne m’avait cru. Plus tard, il a perdu une nouvelle fois le contrôle et a battu ma petite sœur de trois ans à mort. J’avais douze ans à cette époque, mais je n’ai pas dit un mot à propos des crimes de mon père. Je me suis simplement présenté à la sélection du Chevalier du Jugement et ai été choisi comme Apprenti-Chevalier du Jugement. Par la suite, j’ai parlé à mon maître de ce sujet et l’ai laissé juger mon père. »

Neo était muet. Il était collègue avec Judgment depuis vingt ans, mais n’avait jamais su que Judgment avait un passé aussi lourd. Était-il vraiment trop obsédé par son entraînement à l’épée ?

« De ce fait, quand j’ai posé la question à Lesus, je m’étais déjà préparé à entendre qu’un criminel allait pénétrer dans le Tribunal », admit Judgment calmement. « Néanmoins, contrairement à mes attentes, il a refusé de me dire qui était le pécheur. Tout ce qu’il a dit était qu’il souhaitait devenir le Chevalier du Jugement, parce qu’il espérait que tous les pécheurs du monde n’auraient pas une autre chance de commettre un péché. »

« Alors, es-tu satisfait avec cette réponse ? »

Judgment eut un léger sourire en répondant : « Je n’ai pas le droit d’être insatisfait, car je suis incapable de penser à une meilleure réponse. Donc, Neo, as-tu aussi posé cette question ? »

« Oui ! » Neo haussa les épaules et ajouta, hésitant : « Mais, toi et moi sommes différents. Je ne peux pas trouver de réponse satisfaisante… Je… Je ne sais même pas moi-même quel type de réponse serait la bonne. »

Judgment demanda : « As-tu posé la question à tous les candidats ? »

« Non… » Neo fronça les sourcils en répondant : « Il y a toujours Grisia, mais à l’épée… »

« Va et demande-lui ! » dit Judgment avec un sourire. « Même moi, j’ai été capable de trouver un candidat satisfaisant dans un panier d’œufs pourris. Ne me dis pas que tu ne crois pas pouvoir trouver ton Apprenti-Chevalier du Soleil ? »

 

 

Neo observait fixement Grisia en silence, qui était dans un état affreux de la tête aux pieds. Ses vêtements étaient sales et déchirés à plusieurs endroits, et sa figure comportait plus de zones blessées que de zones intactes. Si vous vous demandiez quelle partie ressemblait au Chevalier du Soleil, la réponse serait probablement uniquement sa couronne de cheveux dorés, qui restaient incomparablement brillants malgré le désordre.

« Tu t’es bagarré ? »

« Je me suis fait tabasser. » Quand Grisia parla, il irrita la blessure au coin de sa bouche. Il grimaça un moment, puis sourit de manière encore plus rayonnante qu’avant. « Mais, c’est bon. Roland m’a aidé à les frapper en retour. »

« Tu n’as vraiment aucune valeur au combat. » Neo roula des yeux vers lui. « Tu dois combattre tes propres batailles ! »

« Pourquoi le devrais-je ? » nia aussitôt Grisia vigoureusement. « Ils étaient dix ! Roland et moi n’étions que deux personnes ! Deux gagnants contre dix est déjà très impressionnant ! »

« Tu ne veux pas plutôt dire un vainqueur contre dix ? » Sans aucune gaieté, Neo ajouta : « Avec tes compétences à l’épée, tu ne peux même pas t’occuper d’une seule personne. »

Même si Roland est doué à l’épée, peut-il gagner contre dix personnes ? Un éclair de doute traversa le cœur de Neo.

« J’ai aidé aussi ! » protesta bruyamment Grisia.

Neo restait encore incrédule.

Grisia cria : « Même si je n’ai pas pu l’aider à battre nos ennemis, j’ai pu l’aider à bloquer leurs attaques. Je l’ai aidé à repousser les ennemis et j’ai même trouvé du renfort ! Si je n’étais pas allé trouver Lesus, même Roland n’aurait pas été capable de vaincre dix personnes ! »

« Tu connais Lesus ? » Neo ne put s’empêcher de soupirer. Malgré le fait que cet enfant ne fut pas très fort, il connaissait toutes les personnes qui l’étaient… C’est un genre de talent aussi, non ?

« Je ne le connais pas », répondit Grisia, d’un ton ferme mais agité.

« … » Neo resta silencieux un peu avant de rappeler à Grisia : « Tu viens juste de dire que tu étais allé trouver Lesus. »

« Oh oui ! » répliqua Grisia naturellement. « La première fois que je l’ai vu, je savais déjà qu’il devait être quelqu’un de bien. Tout ce qu’il a eu besoin de voir, c’était que Roland et moi étions juste deux, et qu’on était largement dépassé. Quelle que soit la raison, il va forcément nous aider à nous en sortir ! Alors, quand j’ai vu que Roland ne pouvait pas gagner, évidemment je l’ai tout de suite laissé pour aller chercher Lesus ! »

C’est aussi un genre de talent, d’être une personne méprisable… Neo se tut un instant, n’ayant presque plus aucun espoir, comme il posait la question : « Oublie ça. Laisse-moi te demander : pourquoi veux-tu devenir le Chevalier du Soleil ? »

Une fois qu’il eut entendu la question, les yeux de Grisia se mirent à briller.

« Parce que je veux être à votre place ! »

« Ma place ? » Neo haussa un sourcil. Voulait-il dire qu’il désirait la position du Chevalier du Soleil ? Mais, cette façon de le dire semblait un peu étrange.

Grisia commença à gigoter, excité, remuant les mains dans tous les sens pendant qu’il parlait. « Oui ! Je veux votre place ! Vous avez beaucoup de personnes à votre droite et à votre gauche. J’ai compté. Il y en a onze ! Je veux qu’ils soient à mes côtés. Ce serait comme avoir onze frères. Ça doit être génial ! »

Neo rigola tout haut. « Même si tu deviens le Chevalier du Soleil, ils ne seront pas à tes côtés. Ceux à tes côtés seront la prochaine génération des Douze Chevaliers Sacrées. »

« Euh ? » demanda Grisia, apparaissant comme s’il n’avait pas bien compris. « La prochaine génération ? Est-ce qu’il y aura toujours onze personnes ? »

« Évidemment. »

« Alors, ça me va », répondit Grisia avec un sourire heureux. « Il y en a toujours onze ! Ce serait bien qu’il y en ait onze, mais s’il y en avait un en plus, ce serait encore mieux. Six à droite, six à gauche, ce serait formidable ! »

Neo ne put vraiment pas dire ce qu’il pensait d’une réponse pareille, donc il put seulement poser la question suivante : « Dans ce cas, dis-moi, pour quelle cause serais-tu prêt à sacrifier ta vie ? »

Grisia était comme tous les autres enfants de douze ans, qui n’avaient jamais songé à une telle question. Il baissa la tête, plongé dans ses pensées. Neo n’était pas pressé, il attendit donc patiemment que Grisia eut fini de réfléchir.

Finalement, Grisia sourit en relevant la tête. Par hasard, le soleil de midi glissa sur ses cheveux dorés de façon tellement éblouissante que Neo en fut presque aveuglé.

« Afin de protéger… Je serais prêt à sacrifier ma vie. »

 

 

Quand Neo inspecta tous ceux qui étaient présent, il s’aperçut que pratiquement tous les regards étaient focalisés sur lui. Neo sourit un peu et cria énergiquement : « J’ai décidé que le prochain Chevalier du Soleil serait Grisia ! »

Tout le monde se tut brutalement. Peu après, un cri d’indignation éclata.

« Pourquoi ai-je été choisi ? »

Grisia était évidemment très choqué. Même s’il s’avançait, il ne cessait de jeter des regards en arrière, du coin de l’œil, vers un certain ami.

« Eh bien… »

Neo jeta un coup d’œil à Roland, dont le visage, les bras et les mollets n’étaient pas couverts par des vêtements, et où l’on pouvait à peine trouver une blessure. Il baissa ensuite la tête pour regarder Grisia, dont la peau était couverte d’écorchures. Il sourit en déclarant : « Peut-être est-ce à cause de tes magnifiques cheveux blonds ! »

 

 

C’était complètement absurde !

Les Douze Chevaliers Sacrées et un chevalier du roi, qui allait bientôt épouser la princesse, allèrent jusqu’à se réunir dans la chambre du Chevalier du Soleil, à ouvrir le cellier et à descendre dans la cave à vin cachée. Maintenant, ils étaient rassemblés dans une salle de prière à boire du vin. Tous avaient bu plusieurs bouteilles et étaient tellement intoxiqués qu’ils ne pouvaient plus être décrits que par deux mots : « complètement bourrés ».

Voyant cela, Roland, qui n’aimait pas trop boire, soupira, mais il se sentait aussi étrangement détendu. Les actions absurdes des authentiques Douze Chevaliers Sacrées faisaient presque paraître le fait qu’il fût un Chevalier de la Mort résidant dans le Temple du Dieu de la Lumière pas si absurde en comparaison.

Car, quelle que fût l’absurdité d’une telle chose, rien ne serait plus absurde que le fait que le Chevalier du Soleil possédât une cave à vin sous sa chambre.

Roland regarda vers le Chevalier du Soleil qui était le plus absurde de tous. C’était une chose difficile à faire, mais avec les essais de tout le monde de le faire rouler sous la table, Grisia était tellement ivre que son visage était complètement rouge et ses yeux étaient embués.

C’était tellement différent de tout ce qu’il avait jamais imaginé à propos de l’image du Chevalier du Soleil. Pourquoi était-il le Chevalier du Soleil ?

Roland ne put faire autrement que d’admettre que cette question l’avait tourmenté depuis que Grisia avait été choisi dix ans auparavant. Il tenta de se rappeler du passé et conclut que les questions que le précédent Chevalier du Soleil lui avait posées devaient avoir aussi été posées à Grisia. Se pourrait-il que ses réponses eussent été meilleures que celles de Roland ?

« Grisia.

– Oui ?

– Pourquoi voulais-tu devenir le Chevalier du Soleil ? » demanda Roland, exprimant enfin la question qui le taraudait depuis des années.

« Pour vous tous, évidemment ! »

Nous ? Roland fixa Grisia. Il était tellement ivre qu’il chancelait. Était-il possible qu’il fût trop ivre pour savoir ce qu’il disait ? Roland fronça les sourcils, mais ne put s’empêcher de s’enquérir : « Alors, pour quelle cause es-tu prêt à sacrifier ta vie ? »

« Ah ? Qu’est-ce que tu as dit ? »

Grisia s’effondra sur la table, un sourire idiot sur le visage. D’une voix forte, Roland répéta sa question : « Pour quelle cause es-tu prêt à sacrifier ta vie ? »

Grisia regarda Roland. Il les regarda tous et sourit, ivre.

« Pour vous tous ! »