La Légende du Chevalier du Soleil Tome 2 – Les Tâches Quotidiennes des Chevaliers
Roman version d’origine en chinois par : 御我 (Yu Wo)
Chapter 1 : Eat Breakfast! – Traduit du chinois vers l’anglais par Evangeline[PR!]
Chapitre 1 : Mange Ton Petit-Déjeuner ! – Traduit de l’anglais vers le français par Nocta
+ Travail de vérification par LuluHime
« Capitaine-Chevalier du Soleil, Capitaine-Chevalier du Soleil… »
« Hmm… » Je m’affalai de l’autre côté du lit, enfonçant ma tête sous l’oreiller dans le procédé. Maintenant, je n’aurai pas à écouter cette histoire de « chevalier »…
« Capitaine-Chevalier du Soleil ! »
Attendez, je l’entends encore. Je sortis lentement ma tête de sous l’oreiller et m’assis. Même si mes yeux étaient ouverts, je ne voyais que des images floues et je n’arrivais pas à faire le point sur quoi que ce soit. Et donc, je pouvais dire immédiatement que ce n’était pas l’heure normale à laquelle je me levais !
Qui est l’enflure qui a osé troubler mon sommeil ?!
J’appelai d’une voix qui était une octave plus basse que d’ordinaire : « Puis-je demander si mon frère chevalier dehors a été inspiré par le Dieu de la Lumière pour venir et frapper à la porte de Sun afin de partager une discussion sur la bienveillance du Dieu de la Lumière ? »
Quelqu’un laissa échapper un soupir de soulagement de l’autre côté de la porte, mais ce soupir se transforma ensuite en un appel précipité et pressant : « Capitaine-Chevalier du Soleil ! C’est Adair ! Avez-vous oublié ? Aujourd’hui nous sommes dimanche ! »
« Le dimanche… est un jour de repos ! » Je m’affalai de nouveau dans mon lit, remontai la couverture et me roulai en boule.
« Non ! Capitaine-Chevalier du Soleil, aujourd’hui c’est votre tour de mener la messe de célébration à l’église. Avez-vous oublié ? Capitaine-Chevalier, Capitaine-Chevalier… »
Le volume des cris diminua graduellement. C’était très satisfaisant pour moi. Bien que je pusse dormir dans un brouhaha intense, je dormais encore mieux sans bruit. Si c’est dimanche, alors je vais simplement dormir jusqu’à midi et me lever pour… déjeuner…
BANG !
Je sautai hors du lit. Quoi ? Quoi ? Que se passe-t-il exactement ?
« Capitaine-Chevalier du Jugement, veuillez ne pas vous montrez aussi impoli… »
Je me retournai à temps pour voir Judgment claquer la porte, et cette fois il la ferma presque sur le nez d’Adair. Si je devais être le juge, alors j’aurais dit qu’Adair était celui qui se montrait impoli. Je n’arrivais pas à croire qu’il ait osé parler à Judgment d’une telle manière. Même moi je n’oserais pas !
« Ton vice-capitaine est aussi obstiné que d’habitude. Il ne pouvait pas te réveiller depuis l’extérieur, mais il refusait d’entrer pour essayer. »
Une fois qu’il eut fermé la porte, le visage sans expression de Judgment parvint à s’adoucir un peu. Il secoua la tête et dit : « Avec un vice-capitaine doté d’une telle personnalité, ce n’est pas étonnant que ta Section du Chevalier du Soleil soit constamment en train de causer des problèmes. Il y a trois jours, ils se sont ligués contre le troisième fils du Baron Gerland dans une bagarre, ce qui a rendu le baron si furieux qu’il s’en est même plaint au prince héritier. »
« Aaahhh… Cet incident m’a aussi donné la migraine », soupirai-je. « Mais, qu’aurais-je pu faire ? Comme tu le sais, Adair a simplement cette sorte de personnalité entêtée. »
Les yeux noirs et profonds de Judgment me fixèrent avec scepticisme, et il affirma : « Cette affaire me laisse un peu perplexe cependant. Le troisième fils du Baron Gerland est un chevalier très orthodoxe ; il ne semble pas être le type à provoquer délibérément la Section du Chevalier du Soleil. Bien qu’il ait été précédemment chargé de se débarrasser des corps dans l’incident du Chevalier de la Mort, il ne faisait que suivre les ordres du roi. »
« Je ne sais vraiment pas. Peut-être qu’il a marché sur Adair ou autre chose ? Comme tu le sais, je prends rarement part dans les affaires de la Section du Chevalier du Soleil ; je laisse Adair s’occuper de tout ! » déclarai-je en haussant les épaules, en affichant l’expression de celui qui ne sait rien.
En entendant cela, Judgment fronça un peu les sourcils mais ne dit rien. « Ce qui est fait est fait », ajouta-t-il doucement. « Dis-leur juste d’arrêter d’embêter le troisième fils du Baron Gerland, ou autrement Son Altesse, le Prince, en sera également préoccupée. »
Je promis d’un ton inoffensif : « Très bien, je transmettrai ton avertissement. »
Judgment me regarda encore et me rappela : « Tu devrais te dépêcher. La messe de célébration va bientôt commencer, et tu n’as que trente minutes pour te préparer. »
Je me figeai. Mener la messe de célébration… ah ! Ne me dites pas que c’est mon tour de diriger la messe de célébration de ce dimanche ?!
L’Église du Dieu de la Lumière tient une « messe de célébration » hebdomadaire pour le Dieu de la Lumière. Le programme est le suivant : le prêtre récite une longue série de déclarations, faisant l’éloge de l’amour du Dieu de la Lumière et parlant des exploits des générations précédentes de Chevaliers Sacrés. Ensuite, tout le monde chante des hymnes, puis pour finir – par le plus important – il y a une requête pour les donations… Humhum !
Donc, en conclusion, les Douze Chevaliers Sacrés mènent, chacun leur tour, la messe de célébration, et c’est probablement sur moi que ça tombe cette fois.
Judgment vit mon expression alarmée et sut que je m’étais enfin réveillé. Il continua : « Maintenant que tu t’en souviens, prépare-toi rapidement. Il reste encore trente minutes, ce qui devrait être plus que suffisant…. »
« Quoi ?! Seulement trente minutes ? » hurlai-je. « Comment trente minutes peuvent-elles être un laps de temps suffisant pour que je puisse brosser mes cheveux, appliquer mon masque facial, faire bouillir de l’eau pour repasser ma chemise, faire briller mes chaussures… »
Judgment tressaillit et déclara : « S’il en est ainsi, alors je vais prendre congé. » Puis, il partit promptement. J’imagine que la raison pour laquelle il s’était enfui si rapidement était probablement parce que, la dernière fois qu’il m’avait vu me badigeonner de mon masque facial vert, il se trouvait par hasard que j’étais dans le noir. Il avait eu si peur qu’il avait dégainé son épée et m’avait presque coupé en deux.
Pfff, il n’y a pas de quoi avoir peur, n’est-ce pas ?
De nos jours, je n’utilise que les masques faciaux roses.
En parlant de masques, c’était vraiment de la chance que j’en eusse préparé un tube frais la nuit dernière, ou autrement je n’aurais jamais pu finir de me préparer en trente minutes. Pour commencer je dus faire bouillir l’eau, puis je me lavai le visage. L’étape suivante fut d’appliquer le masque facial, et après cela, je me servis de ma main gauche pour peigner mes cheveux et de ma main droite pour faire briller mes chaussures. Quand l’eau bouillira, il sera temps de repasser la chemise…
Alors qu’il ne restait que cinq minutes, j’étais enfin prêt, et j’ouvris la porte lentement et gracieusement. Une fois que la porte fut ouverte, je vis qu’Adair se tenait dehors, m’attendant.
« Adair », le saluai-je avec un sourire.
« Oui, Capitaine-Chevalier du Soleil », me salua Adair promptement et respectueusement.
Je lui indiquai d’un signe que nous pouvions y aller.
« Sun a entendu dire que vous – toi et tes hommes – utilisiez la force physique contre le troisième fils du Baron Gerland… » Alors que nous marchions, j’affichai une expression pleine de tristesse et soupirai. « Faire preuve de violence n’est point un comportement que le Dieu de la Lumière, dans sa bienveillance, approuverait. »
« Mais, dans la cabane au terrain d’exécution, il vous a poignardé et blessé terriblement. C’est un crime impardonnable… » affirma Adair avec agitation.
« Adair ! » Je l’interrompis avec un ton dénonciateur. « Le Dieu de la Lumière nous a enseigné que peu importe à quel point un péché est sérieux, aussi longtemps que le pécheur est repentant, nous devons lui pardonner et l’accepter avec un cœur miséricordieux. C’est l’enseignement du Dieu de la Lumière. Le comprends-tu, Adair ? »
« Compris ! » Adair hocha la tête et murmura à voix basse : « Je le frapperai jusqu’à ce qu’il se repente. »
Je soupirai élégamment et le reprit : « Adair, tu ne comprends toujours pas. La Section du Chevalier du Soleil doit agir en accordance avec la bienveillance du Dieu de la Lumière. Tu ne peux pas apporter la violence sur les autres comme tu le souhaites. »
« Compris ! » Adair hocha la tête et murmura à nouveau : « Nous mettrons d’abord un sac sur sa tête, pour qu’il ne sache pas qu’il s’agit de la Section du Chevalier du Soleil. »
Oh Adair, Adair, pourquoi es-tu si intelligent ? Pas étonnant que je t’aie choisi comme vice-capitaine. J’hochai la tête, très satisfait.
Quand nous fûmes sur le point d’arriver dans l’immense Hall des Louanges, je m’arrêtai, me tournai, et dis à Adair avec un sourire : « Sous l’œil attentif du Dieu de la Lumière, avec Sa bienveillance illuminant la terre, je crois que les myrtilles croîtront certainement avec plus d’abondance, et que le blé sera également fleurissant. De même, le lait sera probablement aussi sucré que le miel ! J’offre mes remerciements au Dieu de la Lumière pour avoir offert à Son peuple de la nourriture à manger et des vêtements chauds à porter. »
Adair répondit poliment : « Oui, je vais aller préparer le petit-déjeuner : un sandwich à la confiture de myrtilles avec du lait, et peut-être que vous aimeriez également quelques biscuits au miel ? »
J’hochai la tête avec une satisfaction totale, et observai Adair tandis qu’il allait chercher mon petit-déjeuner. Sur son chemin, il rencontra un autre chevalier de la Section du Chevalier du Soleil et s’arrêta pour donner un ordre : « Va mettre un sac sur la tête de ce maudit chevalier de la dernière fois et tabasse-le jusqu’à-ce qu’il ne puisse plus prononcer un seul mot de repentance même s’il le voulait ! »
Ah ! Même moi je ne peux pas exprimer complètement mes intentions avec des mots aussi simples, Adair ! Avec un vice-capitaine comme toi, qu’est-ce qu’un capitaine pourrait souhaiter de plus ?…Excepté peut-être juste un sandwich aux myrtilles et du lait. Avoir été occupé cette dernière demi-heure m’a donné faim !
Hum… Devrais-je finir mon petit-déjeuner en premier, et ensuite aller diriger la messe ? Je ne suis le contrôleur que de nom cependant ; je suis en réalité seulement un accessoire. Les vrais conducteurs sont les prêtres.
« Yo ! N’est-ce pas notre très estimé et radieux Chevalier du Soleil ? Pourquoi n’est-il pas encore allé à l’intérieur, et à la place reste-t-il planté là, comme un pilier qui bloque le chemin ? Tss, tss ! Et c’est un pilier lumineux avec ça, si brillant et joli ! »
Ce genre de langage… j’hésitai, et me retournai pour voir de qui il s’agissait. Bien évidemment, c’était le Capitaine-Chevalier du Métal, de la « Cruelle Faction au Cœur de Pierre ». Tout le monde sur le continent savait que le Capitaine-Chevalier du Métal était tristement célèbre pour sa langue de vipère et ses paroles acerbes. Il pouvait probablement tuer quelqu’un avec ses mots. J’avais entendu dire que si vous veniez à parler avec lui pendant dix minutes, votre vie serait écourtée d’un an.
En dépit de ce qu’ils disaient, je ne pensais vraiment pas qu’on pût considérer ses mots comme empoisonnés. Parfois, je pensais même qu’il me complimentait. Par exemple, prenons ce qu’il venait tout juste de dire : « si brillant et joli ! » Est-ce qu’on pouvait vraiment qualifier cela d’acerbe ?
Il aurait dû dire : « Tes cheveux sont aussi jaunes que les excréments d’une grenouille. Tu es sûr que tu n’as pas confondu ton shampoing avec des excréments de crapauds ? Pas étonnant que j’aie toujours pensé que tu avais une drôle d’odeur : si tu y renifles de plus près, ça vient de te cheveux ! »
Ça, c’était ce que j’appelais une langue de vipère !
Aussi, je suspectais que la vraie personnalité de Metal ne fût vraiment pas du tout empoisonnée. En vérité, parce que je ne le connaissait pas très bien, je n’étais pas sûr de comment il était en réalité. Chaque fois que j’abordais le sujet avec Judgment, il semblait réticent à me dire quoi que ce fût de plus, et si Judgment n’était pas disposé à révéler quelque chose, alors le seul qui pût sans doute le faire parler était le Dieu de la Lumière.
Derrière Metal se trouvait un autre chevalier de la « Cruelle Faction au Cœur de Pierre » avec lequel j’étais plus familier. Le Capitaine-Chevalier de la Lune était connu à travers le continent comme le célèbre solitaire… Ahem ! Je veux dire qu’il était un célèbre narcissique. Avec sa personnalité hautaine, il ne s’entendait pas avec n’importe qui et adorait pointer son nez vers le haut, comme si personne n’était assez bien pour être dans son champ de vue.
Ce geste m’avait fait le détester au début. Après tout, personne n’aimait être regardé de haut.
Cela n’avait duré que jusqu’à un certain jour, quand je l’avais surpris à quatre pattes sur le sol, à tâtonner avec ses mains, mais avec sa tête maintenue en hauteur.
Sans même regarder le sol, comment pouvait-il espérer trouver quoi que ce soit ? Bien que sa vue allât parfaitement bien, on aurait dit qu’il était aveugle. L’objet qu’il cherchait était situé juste à côté de son pied, mais il ne pouvait pas du tout le trouver. La scène n’aurait pu être plus hilarante.
Après l’avoir observé pendant une demi-heure, j’avais secrètement bien ri à ses dépens et je commençais à m’en lasser. J’étouffai un énorme bâillement, m’approchai, ramassai le marque-page en argent magnifiquement ouvragé, et le lui rendis.
« Merci. » Il prit le marque-page, laissa échapper un soupir de soulagement et sourit tendrement, contrairement à son apparence arrogante habituelle.
Je mordis dans la tarte à la myrtille qu’Ice venait tout juste de préparer pour moi et demandai : « Un gage d’amour de ta chère et tendre moitié ? »
« Comment as-tu su ? » Étonné, Moon se retourna pour me regarder, puis se figea quand il me vit. Je pouvais garantir qu’il était choqué de découvrir que c’était moi, le Chevalier du Soleil, qui l’avait ramassé pour lui.
Sa vraie nature ayant été révélée, il était complètement perdu, et bégaya avec embarras : « Capitaine-Chevalier du Soleil… »
Je pris une autre bouchée de la tarte à la myrtille et lui proposai : « Tu en veux ? C’est la tarte à la myrtille d’Ice. N’hésite pas, j’en ai aussi donné à Judgment. »
« …Merci. »
Pendant qu’il mangeait la tarte, il se plaignit parce qu’il devait garder son menton en hauteur tout le temps et que cela avait raidi les muscles de son cou au point où il ne pouvait même plus du tout regarder vers le bas…
Comme ce devait être misérable de ne pas pouvoir baisser la tête ! Moon observa le plafond et soupira. Il commença à décrire la tragédie de ne pas pouvoir baisser la tête : « Si quelque chose tombe sur le sol, je ne le trouverais probablement pas même après une demi-heure. »
J’hochai la tête, puisque je venais à peine de le constater moi-même.
Aussi, tu ne pourrais pas user de l’avantage de ta hauteur pour jeter un coup d’œil au décolleté d’une guérisseuse… Ahem !
Et le dernier fait, mais probablement le plus tragique d’entre tous, était que, quand il voulait embrasser sa petite-amie, il ne pouvait pas baisser la tête pour le faire. Comment pouvait-il embrasser une petite-amie qui était plus petite que lui avec son menton relevé ?
« Alors, comment t’en sors-tu ? Tu fais en sorte que ta bien-aimée se tienne sur des marches ? » demandai-je avec empathie après avoir entendu sa description.
« Je ne trouve pas d’escaliers à chaque fois et, de toute façon, ils sont généralement dans des lieux où passent les gens, donc ce n’est pas assez privé », répondit Moon honnêtement. « Alors, je dois me trouver une copine qui est plus grande que moi. »
« Comment !? Tu mesures au moins un mètre quatre-vingt, non ? »
« Ma copine mesure un mètre quatre-vingt-deux, et chaque fois qu’elle sort avec moi, elle porte des chaussures à plateforme de dix centimètres, ce qui la rend juste assez grande pour m’embrasser. »
Quelle… quelle tragédie !
Je soupirai devant le malheur de Moon de ne pas pouvoir baisser la tête, et je commençai à lui raconter mon propre conte tragique en tant que Chevalier du Soleil. « Le Chevalier du Soleil ne peut qu’aimer le Dieu de la Lumière, pas les femmes… »
J’avais à peine prononcé cette phrase que Moon hoqueta d’horreur. « Tragique ! Trop tragique ! Quelle tragédie ! »
Mince !
Eh bien, depuis ce jour, j’avais eu un nouvel ami qui n’était pas un ami dans la « Cruelle Faction au Cœur de Pierre ». De retour au présent, je souris à Metal et lui dis : « Ce doit être une bénédiction du Dieu de la Lumière, pour avoir permis à Sun de rencontrer ses deux frères en un matin aussi radieux. C’est un commencement parfait, mais Sun doit mener la messe de célébration, aussi Sun ne peut pas s’attarder et interagir trop longtemps avec ses frères. Quel dommage ; une fois que Sun aura fait l’éloge des miracles sacrés du Dieu de la Lumière, Sun viendra définitivement trouver ses frères pour échanger quelques mots sur la bienveillance du Dieu de la Lumière. »
Bien sûr, si je ne peux pas vous trouver, alors ce ne sera pas mon problème.
En entendant cela, le Chevalier du Métal et le Chevalier de la Lune se figèrent tous les deux, et Metal était si surpris qu’il oublia même d’user de ses paroles acerbes et empoisonnées. Il laissa échapper : « Chevalier du Soleil, tu ne sais donc pas qu’aujourd’hui est le jour de prière avant le couronnement du nouveau roi ? »
Le Chevalier de la Lune me fixa de sa façon arrogante avec son menton levé en l’air, mais on ne pouvait pas l’en blâmer. Pour une personne qui ne pouvait pas baisser la tête, c’était la seule manière par laquelle il pût regarder les gens !
Il ajouta : « Tous les Douze Chevaliers Sacrés doivent être présents, et moi-même j’ai dû venir. »
Le service de prière avant le couronnement du nouveau roi ? Comment se fait-il que je ne sois pas au courant ?
« Bonjour, Capitaine-Chevalier du Soleil. »
Alors que je me tenais là, pétrifié, le Chevalier de la Tempête s’approcha nonchalamment et me tapota l’épaule. « Eh bien, la performance en solo d’aujourd’hui est toute à toi ! Bonne chance ! »
Je me tournai lentement pour lui faire face, et je répétai une syllabe à la fois : « Performance en solo ? »
« … »
Storm retira très lentement sa main de mon épaule, et recula très lentement d’un pas en arrière, et demanda finalement, hésitant : « C’est exact ! Par tradition, au couronnement d’un nouveau roi, les Douze Chevaliers Sacrés doivent chanter un hymne tous ensemble, puis ensuite toi et Judgment devez chacun vous produire en solo. N’as-tu pas choisi l’hymne le plus difficile à chanter : L’hymne du Dieu de la Lumière ? Tout le monde est impatient de l’entendre, parce que cette chanson n’a pas été chantée depuis plus de vingt ans. »
L’Hymne du Dieu de la Lumière ? N’est-ce pas cette chanson avec un ton suffisamment élevé pour atteindre la résidence du Dieu de la Lumière, qui dure trente minutes, avec des paroles aussi longues qu’un livre entier, et qui est autrement considérée comme étant l’hymne de l’Église du Dieu de la Lumière avec le plus de mots grandiloquents ?
Quelqu’un a dû me tendre un piège !
Après avoir vu mon sourire rigide et les frémissements au coin de ma bouche, Storm comprit finalement que choisir l’Hymne du Dieu de la Lumière n’était pas ma décision. Il s’avança lentement vers moi, et murmura à mon oreille : « J’ai entendu des rumeurs par les servantes du palais que le Baron Gerland est resté secrètement à l’affût d’une chance pour se venger de toi et ce depuis que ta Section du Chevalier du Soleil a assailli son fils. Le prince héritier n’a pas non plus semblé le lui interdire, comme il veut probablement que tu te ridiculises pour que ta popularité ne grandisse pas auprès de tout le monde. »
C’est donc ainsi qu’il en est ! Je savais que quelque chose se tramait !
Il n’y avait pas moyen que le Baron Gerland se plaignît de cette histoire auprès du prince héritier et qu’il abandonnât l’affaire juste comme ça. Bien sûr, le prince héritier devait être plus ou moins au courant de l’incident du Chevalier de la Mort et du rôle que j’y avais joué. Mon plan l’avait mené au trône, donc il n’exercerait probablement pas de revanche contre moi pour cela uniquement. Mais, le fait que j’avais osé piéger le roi dans une partie de mon plan l’avait sûrement alarmé un peu, puisqu’il était, après tout, le futur roi.
Storm suggéra : « Tu devrais tout simplement changer d’hymne. Ils voulaient sans doute juste te ridiculiser un peu en te forçant à changer de chanson à la dernière minute, plutôt que de réellement te faire chanter cet hymne. Si la chanson est mal interprétée et fiche en l’air toute la messe de célébration, le prince héritier ne sera pas content. »
Même si j’arborais toujours un sourire chaleureux sur mon visage, je ricanais intérieurement. Me tourner en ridicule ?
Vous devez plaisanter. Je suis le Chevalier du Soleil. Le Chevalier du Soleil doit même tomber gracieusement ; comment pourrait-on le ridiculiser ? Si mon maître apprenait que je m’étais couvert de honte devant le pays tout entier… Eh bien, les conséquences seraient suffisamment sévères pour me faire trembler de peur !
De plus, personne ne savait où diable se trouvait mon maître (qui vagabonde et vole le travail des autres) à l’heure actuelle. Il pourrait même se trouver ici dans l’assistance à me regarder chanter l’hymne !
« Mon frère Storm, avec les bénédictions du Dieu de la Lumière, Sun croit qu’il peut chanter avec succès l’Hymne du Dieu de la Lumière, afin de répandre la bienveillance et l’amour inconditionnel du Dieu de la Lumière. »
« Sun ! Ne fais pas l’idiot ! »
L’expression de Storm changea, et il vociféra avec précipitation : « L’Hymne du Dieu de la Lumière n’est pas quelque chose que l’on peut jouer sans répétition, et les hymnes nécessitent d’ajouter le pouvoir de la Lumière Sacrée pour être chantés. Même la majorité des prêtres ne peuvent pas supporter de déverser la Lumière Sacrée sans discontinuer pendant trente minutes… Non ! Tu dois aussi chanter un hymne choral avec les Douze Chevaliers Sacrés, et la chorale prendra dix minutes pour être effectuée. »
Bien sûr, je savais tout cela. Un soi-disant hymne ne consistait qu’à injecter le pouvoir de la Lumière Sacrée dans la chanson pour accomplir divers objectifs. Les musiques inspirantes pouvaient enthousiasmer une foule, les odes de bataille pouvaient multiplier la force des soldats, les mélodies pouvaient détendre les gens, et les ballades joyeuses rendaient les gens heureux. Les rumeurs racontaient qu’un vrai maître des hymnes pouvait même pousser les criminels à admettre leurs torts et à se repentir de leurs crimes simplement en chantant.
Bien évidemment, les vrais maîtres des hymnes étaient déjà devenus des légendes. Il n’y avait aucun moyen de confirmer qu’il était possible de pousser un criminel à éprouver du remord pour ses péchés. Donc, si vous vouliez vraiment faire en sorte qu’un criminel regrette ces crimes, le meilleur moyen était de l’envoyer vers Judgment. Je garantis qu’en moins de trois heures, il regrettera même d’avoir voler des goyaves à ses voisins quand il était jeune.
Quoi ? Vous dîtes qu’envoyer des criminels à ma Section du Chevalier du Soleil fonctionnerait aussi ?
Vous avez complètement tort, mes frères. Si vous envoyez le criminel à ma Section du Chevalier du Soleil, cela ne le rendrait pas repentant, cela le rendrait incapable de se repentir !
Après mon explication sur le fonctionnement des hymnes, tout le monde devrait savoir à présent qu’un hymne n’était pas simplement une chanson, mais une compétition de la capacité qu’un individu avait de se servir de la Lumière Sacrée. Un chant choral de dix minutes, puis trente minutes de solo faisaient un total de quarante minutes de dépense en Lumière Sacrée. J’évaluai la situation. Bien que ce fût en effet une quantité très importante qu’un chevalier sacré ordinaire ne pourrait jamais produire, pour un chevalier sacré qui aurait pu devenir le plus puissant pape de l’Histoire ce n’était pas du tout un problème !
Storm essayait encore de me convaincre de changer de cantique quand, après une série de bruits de pas urgents, le Chevalier de la Forêt surgit du Hall des Louanges. En voyant que nous étions à l’extérieur, il s’arrêta une seconde, mais ensuite il nous avertit rapidement : « Sun, pourquoi toi et les autres êtes-vous encore dehors ? Venez, tout le monde vous attend. »
« Mon frère Leaf, merci pour ton rappel. Sun pense que ce doit être le Dieu de la Lumière qui emprunte tes lèvres pour dire à Sun qu’arriver en retard serait la mauvaise ligne de conduite à tenir. »
Après avoir dit cela, je dirigeai le groupe vers le hall.
Le Hall des Louanges était le plus grand bâtiment de l’Église du Dieu de la Lumière. Il était construit en forme d’éventail avec le bout le plus pointu de l’éventail formant l’estrade. Le mur derrière la scène était fait de vitraux, et était arrangé en un énorme symbole du Dieu de la Lumière. Les rayons du soleil pénétraient à travers le verre depuis l’extérieur, faisant de la scène l’endroit le plus lumineux de tout le hall.
Au-delà, il y avait évidemment des rangées et des rangées de sièges par dizaines de douzaines. Habituellement, ces sièges étaient suffisants pour la foule qui venait assister au service de célébration. Cependant, pour un événement aussi important qu’aujourd’hui, les sièges étaient principalement occupés par la royauté. La seconde priorité était donnée aux gens riches et, en dernier, la foule de citoyens ordinaires. Les citoyens se tenaient essentiellement tous dans l’espace ouvert au fond.
Je balayai l’audience avec mes yeux et repérai facilement le prince, qui serait bientôt le roi couronné. Il était assis au centre de la première rangée de sièges, et à ses côtés se trouvaient son chancelier et les nobles importants. Le Baron Gerland était lui aussi assis au premier rang, et deux chevaliers royaux se tenaient à chaque extrémité de la première rangée.
Le vieux Pape était assis à sa place habituelle sur le côté de la scène, et il portait même un mystérieux voile.
Le Chevalier du Jugement se tenait déjà sur le côté gauche de l’estrade, et les chevaliers de la Cruelle Faction au Cœur de Pierre se tenaient côtes à côtes à sa gauche.
Ma place était bien entendu sur la droite de l’estrade. Judgment et moi devions nous placer d’une façon telle que nous ne cachions pas le symbole du Dieu de la Lumière derrière nous. Je marchai jusqu’à ma place, Storm prit la sienne à ma droite, et Leaf alla à la droite de Storm.
Finalement, nous, les Douze Chevaliers Sacrés, nous tenions tous à nos propres places, tout comme les prêtres derrière nous qui étaient responsables de chanter les accompagnements. Devant, se tenait le Cardinal de la Lumière, qui était aux commandes. Toutefois, le Cardinal de la Lumière n’était pas une seule personne, mais deux1. L’un est la Prêtresse de la Radiance et l’autre, le Prêtre de la Brillance. Ils servaient en tant que mains gauche et droite du Pape. Au sein du Sanctuaire de la Lumière, leur position n’était inférieure qu’au Pape uniquement.
D’après la tradition, la Prêtresse de la Radiance était une femme qui se spécialisait dans la magie de guérison et de soutien. En contraste, le Prêtre de la Brillance était un homme et se spécialisait dans les choses telles qu’exorciser les démons et guider les âmes jusqu’au Dieu de la Lumière.
Il semblerait que nous fussions réellement un tantinet en retard, car le Cardinal de la Lumière ne dit rien et annonça simplement le commencement de la chorale. Un chevalier sacré vint alors nous distribuer nos livres d’hymnes. Quand il descendit de la scène, un des prêtres derrière nous commença avec une longue note, puis tous les prêtres se mirent à chanter. Ils chanteraient « la la la » pendant environ trois minutes avant que nous ne devions commencer.
Cet hymne n’était pas difficile pour moi, puisque, chaque année, pour célébrer l’arrivée du Dieu de la Lumière, il y avait toujours une grande session de célébrations, et les Douze Chevaliers Sacrés chantaient ensemble ce cantique particulier. Je l’avais chanté trois fois depuis que j’avais pris ma place de Chevalier du Soleil, donc il m’était presque aussi familier que le dos de ma propre main.
Il était même plus facile puisque c’était une chorale de douze personnes, donc même si la Lumière Sacrée de l’un de nous était faible, les autres pouvaient compenser.
De plus, les membres de la Cruelle Faction au Cœur de Pierre ne se spécialisaient pas dans l’emploi de la Lumière Sacrée. Ainsi, leur Lumière Sacrée n’était habituellement pas si forte, c’était donc à ceux de la Bonne Faction au Grand Cœur de combler la différence.
Comme tous les Douze Chevalier Sacrés connaissaient cet hymne de long en large, nous complétâmes l’hymne en entier sans une seule erreur peu de temps après. Ensuite, c’était l’heure du solo de Judgment. Il fit un pas en avant et commença à chanter de sa voix de baryton très profonde. Le ton de sa chanson était si bas qu’il fit plonger les cœurs de tout le monde avec lui.
Par chance, Judgment avait choisi un hymne court et simple à chanter. Cette chanson parlait simplement de comment les criminels seront jugés par la sévérité du Dieu de la Lumière. Le chant entier, même avec la chorale des prêtres au milieu, durait cinq minutes tout au plus. Le solo de Judgment ne faisait qu’environ deux minutes.
Mais, ce n’était pas parce qu’il était fainéant. Comme mentionné précédemment, les membres de la Cruelle Faction au Cœur de Pierre n’étaient pas connus pour la puissance de leur Lumière Sacrée. Vu que leur Lumière Sacrée était si faible, on leur permettait de choisir les hymnes les plus simples à chanter.
Au contraire, puisque j’étais le leader de la Bonne Faction au Grand Cœur, je n’étais pas autorisé à choisir un hymne simple. C’était particulièrement vrai aujourd’hui, comme il s’agissait de la cérémonie de célébration précédant le couronnement du roi. Si je sélectionnais un hymne facile à chanter, cela pourrait même être vu comme un acte irrespectueux envers le roi.
C’était aussi l’une des raisons pour lesquelles j’avais choisi de ne pas changer de chanson. Si je chantais vraiment l’Hymne du Dieu de la Lumière, le prince héritier serait très satisfait, et il ne me causerait pas plus de problèmes pour ce que j’avais fait. Après tout, je ne chantais définitivement pas cet hymne juste parce que j’avais peur que, si je venais à me ridiculiser, mon maître m’expédierait auprès du Dieu de la Lumière. Absolument pas… Eh bien, en tout cas pas entièrement.
Judgment finit son hymne et retourna à sa place originelle. Puis, ce fut mon tour. J’avais à peine fait quelques pas en avant que la foule commença à applaudir, et les acclamations étaient même plus bruyantes que celles lors des grandes cérémonies annuelles de célébration. Il semblerait qu’ils savaient déjà que je chanterais l’Hymne du Dieu de la Lumière cette fois-ci. Donc, la nouvelle que le Chevalier du Soleil devait chanter l’Hymne du Dieu de la Lumière – que personne n’avait chanté depuis vingt ans – s’était répandue, et seul le Chevalier du Soleil lui-même n’était pas au courant.
Il n’y avait pas d’accompagnement au début de l’Hymne du Dieu de la Lumière, aussi je dus commencer par moi-même.
Je pris une profonde inspiration et vérifiai que j’avais suffisamment de Lumière Sacrée pour chanter deux fois l’Hymne du Dieu de la Lumière. Puisque c’était le cas, je décidai que je ferais aussi bien d’utiliser un peu de Lumière Sacrée en extra pour que, dans le cas où je chanterais un peu faux, personne ne remarquât rien.
Je relâchai une grande quantité de Lumière Sacrée, au point où même mon corps brillait faiblement. Je fermai les yeux, mais je pouvais encore entendre les hoquets émerveillés de la foule. Je rouvris les yeux et chantai les vers d’ouverture :
La lumière naquit, transperçant les ténèbres, délivrant un rayon de brillance, apportant un espoir infini…
Ma voix perça les cieux, et le Hall des Louanges résonna avec le son de son écho et avec la Lumière Sacrée. C’était comme si le Dieu de la Lumière était présent. En un instant, tout le monde devint silencieux, me fixant juste du regard.
Je suis foutu…
Dès que j’eus chanté les premières lignes, je sus sur-le-champ que j’étais foutu. Ça ne le ferait simplement pas sans pratique. J’avais commencé trop haut, et cet hymne avait un ton vraiment aigu, avec beaucoup de glissements d’une note élevée à une note encore plus élevée dans le milieu. Maintenant que j’avais commencé si haut, comment étais-je censé aller encore plus haut ?
À ce moment-là, j’entendis des hoquets de stupeurs mêlés d’admiration venant des Douze Chevaliers Sacrés derrière moi. Ils avaient tous répété l’Hymne du Dieu de la Lumière, et bien sûr ils savaient jusqu’à quelle hauteur cette chanson montait. J’ignorais qui, mais quelqu’un dit doucement : « Le premier vers était absolument merveilleux. Tu es admirable, pour commencer sur une note aussi haute. »
Admirable ? Je n’ai pas commencé si haut délibérément. Je suis sur le point de pleurer !
Les notes dans l’Hymne du Dieu de la Lumière devaient être soutenues dans un seul souffle pendant si longtemps que certaines phrases me suffoquèrent presque jusqu’à-ce que j’eusse atteint une partie où je pouvais prendre une autre respiration.
Pour les autres chevaliers sacrés, la partie la plus dure de cette chanson était l’immense émanation de Lumière Sacrée qui était au-delà des capacités normales d’un chevalier sacré. Mais, pour moi, émettre de la Lumière Sacrée n’était pas un problème ; le problème c’était que cette chanson était excessivement difficile à chanter !
Diantre, la fin du prochain vers est incroyablement interminable !
Je posai gracieusement mes mains sur mon diaphragme et le pressai avec force, poussant l’air à sortir de toutes mes forces. Presser, presser, presser…
Famine, maladies, désastres naturels, le mal disparaît sans laisser de traces sous la gracieuse lu –(je pressai)–(je continuai de presser)–(je pressai très fort)–mière !
À cet instant, je fermai la bouche avec des larmes dans les yeux. Remercions le Dieu de la Lumière que j’eusse finalement complété avec succès… la première partie. Bien qu’à la fin, quand je n’avais plus pu faire sortir davantage d’air, ma voix eût tremblé un peu, c’était le dernier de mes soucis pour le moment. Ensuite, il y avait une minute d’accompagnement, aussi je ferais bien de me détendre et de relaxer autant que possible.
Alors que je me détendais, mes mains relâchèrent également leur prise sur mon diaphragme, uniquement pour découvrir que… j’avais extrêmement faim !
J’avais déjà très faim avant, mais je venais à l’instant de chanter tellement fort et j’avais appuyé sur mon diaphragme avec une force telle que j’étais devenu plus affamé que jamais. Mon estomac vide paraissait ne pas avoir été nourri depuis des jours.
La foule époustouflée reprit pied dans le présent, et le hall fut rempli par les bruits d’applaudissement. Ils submergèrent même la chorale des prêtres, et tout le monde poussa des cris d’acclamation.
« C’est un miracle ! Une voix si merveilleuse, je n’avais jamais réalisé que le Chevalier du Soleil était un si fantastique soprano masculin. »
« Regardez ! Les yeux du Chevalier du Soleil sont même baignés de larmes ; il a dû ressentir la présence du Dieu de la Lumière durant la chanson ! »
« Le vibrato dans la dernière note était splendide ; il a exprimé la passion des paroles à la perfection ! »
À ce moment-là, Leaf qui se trouvait derrière moi murmura : « Sun, c’était génial à l’instant, mais peux-tu continuer ? Veux-tu que je te remplace ? »
En entendant cela, je pensai béatement, Leaf tu es vraiment un type si sympa, je t’adore à la folie !
J’étais sur le point de dire oui à Leaf quand Storm l’interrompit : « Ça ne marchera pas. »
Il expliqua rapidement : « La partie du milieu de l’Hymne du Dieu de la Lumière est la plus longue, s’étendant sur presque vingt minutes. Relâcher en continu l’équivalent de vingt minutes de Lumière Sacrée, tu es le seul parmi les douze d’entre nous qui puisse faire ça, Sun. Finis simplement celle du milieu, et ensuite Leaf et moi nous t’aiderons à chanter la dernière partie. »
En entendant l’explication de Storm, même le Leaf au grand cœur ne persista pas.
À cet instant, mes yeux dérivèrent vers le Chevalier de la Terre. À part moi, Earth avait la meilleure capacité avec la Lumière Sacrée. Eh bien, le bouclier, qui était sa spécialité, était fait avec l’Aura de Combat combinée avec un peu de Lumière Sacrée, qui était ce qui lui concédait des qualités de protection si fortes. Pour lui, vingt minutes ne seraient pas du tout un problème.
« Héhéhé, dé-désolé Sun, ma voix est trop basse, il n’y aucune chance pour que je puisse chanter l’Hymne du Dieu de la Lumière. » La sympathie était écrite sur le visage d’Earth tandis qu’il s’excusait, pourtant ses yeux brillaient de malice devant mon malheur, sans aucune once de sympathie.
Bien qu’Earth dît la vérité à propos de sa voix, qui était juste un peu plus haute que celle de Judgment, il n’avait vraiment aucun espoir de chanter l’Hymne du Dieu de la Lumière, et c’était vraiment de ma propre faute si j’avais commencé par une note si haute… Mais, quand je vis ce sourire suffisant sur son visage, je fus rempli de mépris.
Qui plus est, j’aperçus le prince héritier et le Baron Gerland au premier rang. Le premier affichait son gentil sourire habituel tandis que le deuxième avait une expression vraiment odieuse collée sur le visage. Il me fixait comme s’il n’arrivait pas à croire que j’étais capable de chanter cet hymne.
Ce sont ces deux ordures !
Me forcer à chanter un cantique aussi incroyablement difficile que l’Hymne du Dieu de la Lumière sans me prévenir à l’avance était suffisamment mesquin, mais me faire chanter avec un estomac vide était simplement enrageant !
Ils ne savaient donc pas que quand j’avais faim, mon niveau de glucose devenait anormalement bas ? Pour un amateur de sucreries tel que moi, avoir un taux de sucre bas dans le sang faisait tourner mon humeur à l’orage. Même moi je ne pouvais pas vous dire quel genre de choses j’étais capable de faire quand j’étais de mauvaise humeur !
« Je vais finir cette chanson seul ! »
« Quoi ? »
En entendant mes mots, Storm et Leaf restèrent tous les deux abasourdis l’espace d’une seconde, et tous les autres Chevaliers Sacrés ne purent s’empêcher de me fixer du regard, chacun avec une expression différente dans les yeux. Certains brillaient avec admiration, d’autres montraient une lueur de désapprobation, mais la plupart d’entre eux étaient simplement inquiets.
Juste à ce moment, la minute d’accompagnement toucha à sa fin. J’ignorai les appels étouffés mais pressants de Storm et de Leaf, inspirai profondément et commençai à chanter la partie suivante.
Vous, pécheurs, baissez vos têtes et repentez-vous. Même dans l’obscurité couverte d’ombres, vos transgressions n’échapperont pas au jugement. Que les Justes lèvent leurs têtes et observent. Tant que le soleil brille encore sur la terre, la lumière ne sera jamais vaincue.
Même si la première partie m’avait presque étouffé, la deuxième était beaucoup plus simple, en dépit de porter le nom de « Tueur de Chevalier Sacré ». Parce qu’elle nécessitait vingt bonnes minutes de déversement constant de Lumière Sacrée, presque aucun chevalier sacré ne pouvait la finir. Toutefois, la chanson en elle-même était assez simple à chanter, aussi cette partie était un jeu d’enfant pour moi qui débordais pratiquement de Lumière Sacrée. J’avais un autre problème cependant… C’était trop ennuyeux !
Parce que la première partie était si difficile, je ne m’étais concentré que sur le chant et je n’avais pas eu le temps de songer à quel point j’étais affamé. Mais, à présent, avec la deuxième partie insipide qui ne m’imposait aucun stress, je ressentais constamment le vide de mon estomac. J’avais tellement faim que je croyais que, si ma voix était aussi sonore et claire, c’était à cause de l’écho provoqué par mon estomac vide.
J’avançai lentement et tranquillement à travers la partie du milieu, et il y eut des applaudissements à la fin, mais ce n’était aucunement proche de la réception reçue après la première. Ce n’était pas de leur faute par contre ; ce n’était pas une prouesse simple de se souvenir d’applaudir un tant soit peu devant une situation aussi soporifique. Ensuite, il y avait une autre minute d’accompagnement, ce qui me donnait un peu de temps pour me reposer.
« Sun, tu n’as vraiment pas besoin de notre aide ? » demanda à nouveau Leaf, cette fois sur un ton beaucoup plus pressant.
« Ne te force pas à continuer ! Tu as déjà relâché une immense quantité de Lumière Sacrée, et tu devras surpasser la Lumière Sacrée des prêtres dans la dernière partie, aussi ce sera encore plus difficile que précédemment », m’implora Storm.
Libérer de la Lumière Sacrée n’est pas le problème… Le problème c’est que je meurs de faim !
La troisième partie avait un ton incroyablement haut qui était extrêmement long, et pouvait être considérée comme la partie la plus difficile de tout le cantique. Une fois que je commencerai à chanter, cela m’infligera tellement de stress que j’oublierai momentanément la douleur de la faim !
« Mon frère Storm, mon frère Leaf, je vous prie d’avoir foi en Sun qui, avec la bénédiction du Dieu de la Lumière, pourra définitivement compléter l’Hymne du Dieu de la Lumière. »
Après que j’eus dit cela, plus aucune protestation ne s’éleva derrière moi.
La minute d’accompagnement était presque terminée, et ensuite la partie finale de l’Hymne du Dieu de la Lumière commença officiellement. Le premier vers était très éclatant et retentissant, symbolisant la lumière transperçant les ténèbres… ce qui était aussi un moyen de réveiller la foule somnolente après la deuxième partie.
Je semblais avoir accompli ce travail à merveille, comme une grande partie de la foule avachie se redressa instantanément et, d’après l’expression sur leur visage, je pouvais voir qu’ils avaient reçu une sacrée frayeur et avaient complètement retrouvé leurs sens à présent.
Alors que je commençais vraiment à m’absorber dans la musique, je voulus regarder de haut et avec dédain le Baron Gerland. Au lieu de cela, je le surpris avec le dos tourné en train de cligner de l’œil à quelque chose dans le coin. Seul un petit chevalier ordinaire se tenait là, aussi le Baron Gerland n’était probablement pas en train de flirter avec lui.
Après que le chevalier eut reçu le signe du Baron Gerland, il hocha la tête, sortit un parchemin et, ce faisant, il jeta même un regard sinistre vers l’estrade.
S’il n’est pas en train d’essayer de me jouer un sale tour, alors mon nom n’est pas Grisia !
Le tome que ce chevalier avait sorti ressemblait à un parchemin magique. Un parchemin magique était créé quand un magicien transcrivait ses pouvoirs sur un papier spécial produisant un parchemin qui pouvait être vendu aux autres. Ce genre de parchemin magique pouvait relâcher une seule fois un sort, et le genre de magie libérée dépendait de ce que le magicien avait inscrit dessus. Une fois que le sort était relâché, il ne devenait rien d’autre qu’une feuille de papier inutile.
Très peu de magiciens peuvaient transcrire leurs sorts sur des parchemins ; de plus, le parchemin requérait l’utilisation d’un type de papier et d’encre spécial. En conséquence, son prix exorbitant n’était pas seulement le résultat des coûts du produit actuel en lui-même, mais il incluait aussi les autres dépenses variées accumulées durant sa fabrication. En tant que tels, les parchemins magiques étaient considérés comme étant l’un des produits consommables disponibles les plus coûteux.
Un objet aussi précieux devait indéniablement être quelque chose que le Baron Gerland avait donné à ce chevalier dans le but express de m’humilier. C’était la définition même du gaspillage !
Si vous m’aviez à la place donné l’argent que vous avez utilisé pour le parchemin, peut-être que je me serais ridiculisé pour vous, même sous le risque d’être vu par mon maître !
J’allais simplement et commodément prendre ce parchemin, tandis que j’empêcherais ce type d’accomplir son affaire louche, comme compensation pour mon stress mental !
Alors que je chantais l’hymne, j’observai le chevalier du coin de mes yeux. Quand j’en eus presque terminé avec la chanson, ce type entra enfin en action. Il leva son bras, cependant il ne lança pas le sort. C’était comme s’il attendait encore quelque chose.
J’y réfléchis et… oh j’ai compris ! Il doit attendre le grand final où je suis censé avoir épuisé presque toute ma Lumière Sacrée. Ainsi, j’aurais dépensé toute cette énergie et je serais pourtant quand même incapable de compléter l’Hymne du Dieu de la Lumière. Comme c’est méprisable ! Pas étonnant que le Baron Gerland l’ait envoyé faire son sale boulot.
Mais, aussi méprisable que vous puissiez être, seriez-vous capable d’être aussi méprisable que moi… ? Ahem ! Je veux dire, aussi intelligent que moi ? Songeant au parchemin magique qui était sur le point de devenir mien, je ne pus m’empêcher de chanter encore plus haut et encore plus fort qu’avant !
Il ne reste que le verset final, alors attends-moi, mon parchemin magique !
Que les Louanges soient rendues à la lumière. Quand j’eus chanté ce verset, je relâchai une grande quantité de Lumière Sacrée. La lumière balaya le hall comme une tempête, en jaillissant même par les portes et les fenêtres, aveuglant tout le monde. Cependant, c’était impossible pour la lumière de bloquer ma propre ligne de vue, et je vis clairement que le chevalier du Baron Gerland était lui aussi pétrifié par l’afflux soudain de Lumière Sacrée.
Maintenant ! Pendant que personne ne pouvait y voir clairement, je voulus utiliser un Sort de Paralysie pour entraver ce chevalier, mais quand je n’étais qu’à mi-chemin dans le lancement du sort, je ressentis tout à coup des vertiges. Oubliez l’idée de chanter l’incantation, je ne parvenais même pas à empêcher mes jambes de se ramollir.
Soudainement, quelqu’un me soutint et m’aida à me redresser. Je regardai, mais je ne vis qu’une ombre noire descendre à toute allure de l’estrade, pile où se tenait ce chevalier.
Ce devait être Judgment qui, dans cette lumière éblouissante, ne pouvait possiblement rien y voir. Le seul qui était peut-être capable de voir quelque chose était le vieux Pape, cependant Judgment avait quand même pu me relever avant de se précipiter à l’emplacement exact de ce chevalier. Tsss, quelle capacité absurde !
La lumière persista pendant dix secondes avant de s’estomper graduellement, et tout le monde me fixait du regard, abasourdi. Je gardai un visage solennel et jetai un regard du coin de l’œil au chevalier qui avait voulu me lancer une attaque en traître. Le chevalier était déjà allongé misérablement sur le sol avec le parchemin dépassant de sa bouche, et le coupable qui l’y avait coincé là se tenait déjà derrière moi comme s’il n’avait jamais quitté mon côté.
Judgment, oh Judgment, pourquoi n’as-tu pas pris le parchemin avec toi ? C’est un tel gâchis que de le laisser coincé dans la bouche de ce type !
Après avoir fait le deuil du parchemin, je fixai le Baron Gerland en affichant un rictus devant son échec. Quand il vit que l’hymne s’était conclu à la perfection, il se tourna vers son chevalier avec un froncement de sourcil, mais quand il aperçut le destin misérable qu’avait subi son chevalier, son visage blanchit de peur.
Voyant cela, je reniflai en mon for intérieur. Vous n’êtes qu’un sale petit chevalier et vous vouliez comploter contre moi ? Baron Gerland, vous avez gravement sous-estimé l’ignominie… Euh, l’intelligence du leader des Douze Chevaliers Sacrés !
« Ce cantique est dédié à Sa Majesté le prince héritier, qui est sur le point de monter sur le trône. Je suis certain que le Royaume du Son Oublié recevra la bénédiction du Dieu de la Lumière sous votre règne, nous menant vers l’aube d’un nouvel âge d’or. » Quand j’eus terminé, je saluai gracieusement le prince héritier et retournai avec calme à ma place parmi les Chevaliers Sacrés.
En entendant cela, le Prince sourit, content, et applaudit même en proclamant : « Quelle performance ! Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un Chevalier du Soleil si parfait. »
À présent, tout le monde dans le hall était enfin réveillé. Tout le monde, du citoyen ordinaire aux chevaliers royaux et même les autres membres de l’Église du Dieu de la Lumière, tous commencèrent à acclamer et à crier incessamment : « Longue vie au Chevalier du Soleil ! Longue vie au roi ! Longue vie au Dieu de la Lumière ! »
C’est ça ! Acclamez le roi davantage, et rendez le prince héritier encore plus heureux, les pressai-je dans ma tête. Je regardai discrètement le prince. Ah ! En ce moment, son sourire est presque aussi lumineux que celui d’un Chevalier du Soleil.
Bien entendu, tout le monde adorait quand les gens faisaient leur éloge. S’il recevait suffisamment de louanges, le prince dira toujours que j’étais parfait en dépit du fait que j’avais déshonoré son père. Grâce à toutes les acclamations, il fallut un moment aux prêtres pour calmer la foule. Finalement, ils annoncèrent le prochain événement sur l’agenda : « La Tournée d’Inspection du Nouveau Roi. » Pour dire les choses clairement, le but de cet évènement était d’aller parader dans les rues et d’informer tout le monde au sujet de qui était le nouveau roi ; alors mémorisez son visage dans vos têtes et ne l’offensez jamais la prochaine fois qu’il fera une tournée d’inspection.
Le prince héritier se leva en premier, et deux rangées de chevaliers royaux se dépêchèrent de lui ouvrir un passage. Puis, ils quittèrent majestueusement le Hall des Louanges.
Le deuxième à partir fut le Pape, mais sachant que ce vieux machin adorait se comporter de façon mystérieuse, au point de s’envelopper d’un voile, qui sait si oui ou non c’était véritablement lui. Pour ce que j’en savais, cela aurait pu être juste une doublure, et le vrai Pape était déjà parti prendre son petit-déjeuner !
Ensuite, ce fut au tour des Douze Chevaliers Sacrés de quitter le hall. En tant que leader, j’étais, bien entendu, à leur tête. Quand je passai à côté de Judgment, je lui chuchotai rapidement : « Merci pour tout à l’heure ! »
Quand je descendis de l’estrade, et que je fus certain que mon maître ne pourrait pas me voir, je trébuchai immédiatement et rencontrai presque le sol avec un gracieux contact corporel total. Par chance, Leaf et Storm qui se trouvaient derrière moi sentirent que quelque chose n’allait pas et me soutinrent de chaque côté.
« Sun, Sun ! Est-ce que ça va ? » s’enquit Leaf, inquiet.
Je répondis faiblement : « Je… Je… »
Je suis en train de mourir de faim !
« Après avoir utilisé une quantité aussi importante de Lumière Sacrée, ce n’est pas possible que tu ailles bien », dit Storm d’un ton pressant. « Leaf, arrête de lui poser des questions, et veille simplement à aider Sun à rester debout. »
« Oui, oui », répondit Leaf en hochant la tête vigoureusement.
« Adair ! »
J’aperçus soudainement mon vice-capitaine qui se tenait près d’une porte sur le côté, tenant un plateau avec un sandwich aux myrtilles et du lait. Toutefois, son hésitation était affichée sur tout son visage, comme s’il n’était pas sûr s’il devait ou non s’approcher. Voyant cela, je commençai à me débattre, essayant de me libérer de Leaf et de Storm pour pouvoir mettre mon cher petit-déjeuner à l’endroit où il appartenait : dans mon pauvre estomac gargouillant.
« Pas besoin d’appeler ton vice-capitaine maintenant, nous allons te porter. Ne t’inquiète pas, Storm et moi serons tes béquilles pour la journée. »
Blaze m’empoigna étroitement et indiqua à Adair de partir d’un geste de la main, lui disant qu’il n’avait pas besoin de venir plus près. Adair me fixa avec des yeux grands ouverts, tiraillé entre venir et partir.
« La parade commence, allons-y. » annonça Storm rapidement, et il m’entraîna avec Blaze.
Non, non, non ! Relâchez-moi !
J’ai tellement faim ! Mon sandwich aux myrtilles, mon lait, mes biscuits au miel ! Blaze, Storm ! Relâchez-moi !
Adair ! Mon petit-déjeuner !
Note de bas de page
1 La Prêtresse de la Radiance et le Prêtre de la Brillance : les caractères chinois pour le Cardinal de la Lumière sont 光明祭师 (guāng míng jì shī), où 光(guāng) veut littéralement dire Radiance et 明(míng) veut dire Brillance.
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